QUAND Joseph Roy choisit la voie de l’homéopathie pour exercer la médecine, la discipline alternative compte déjà quelques dizaines d’années de pratique. Son inventeur, Samuel Hahnemann, en a posé les fondements plus d’un siècle auparavant. Fondée sur l’antique principe de similitude, elle fonctionne par dilution de substances actives et s’affiche en rupture avec la médecine classique qui, par opposition, applique la méthode du « soin par les contraires ».
De cette philosophie thérapeutique, Joseph Roy va faire sa vocation. Né à la toute fin du XIXe siècle, il n’a que 23 ans lorsque se déclare le premier conflit mondial. En tant que jeune médecin, il est tout de suite mobilisé. Le lieu de son affectation ? La ville de Dijon et ses environs qui vont être le théâtre des étonnantes découvertes du scientifique. En effet, et comme beaucoup de chercheurs à cette époque, Joseph Roy s’inscrit pleinement dans la lignée de Louis Pasteur, frappé de plein fouet par l’influence du grand homme. Passionné de biologie, il se focalise sur l’univers microbien et ses liens avec la pathologie. Or n’a t-il pas à sa disposition un gigantesque champ propice à l’investigation ? La guerre, contexte de prédilection pour les infections, maladies et épidémies en tout genre, lui fournit en effet, à sa fatale manière, l’occasion d’entreprendre des recherches poussées. Et ce qui retient toute l’attention du jeune médecin est de réussir à isoler l’agent responsable de la grippe. La terrible pandémie que l’on appelle grippe espagnole fait malheureusement bien trop parler d’elle, décimant les individus par dizaines de millions à travers le monde entre 1918 et 1919. La France n’échappe pas à l’hécatombe, tout particulièrement la population des soldats, affaiblis par les conditions de survie, qui tombent par milliers sous sa vague.
Oscillant élément.
Hanté par la volonté d’enrayer la progression de la terrible affection, Joseph Roy multiplie les observations réalisées à partir du sang des malades. C’est ainsi qu’il découvre un élément animé d’un mouvement oscillatoire latéral qu’il prend pour un microbe. Logiquement, il le nomme « oscillocoque ». Puis il poursuit des recherches qu’il effectue cette fois sur les organes d’animaux - cœur et foie de canard - dont il pense qu’ils abritent eux aussi le germe en question. Heureuse intuition… À nouveau, le médecin déniche le fameux « oscillocoque », microbe à la danse si particulière. C’est alors qu’entrent en scène les inclinations scientifiques de Joseph Roy, car celui que l’homéopathie a déjà convaincu s’emploie d’emblée à mettre au point une dilution à partir de l’élément aux mouvements oscillatoires trouvé dans les organes du canard. Assisté dans son travail par Paul Chavanon, médecin homéopathe spécialisé dans la sphère ORL, il tente d’affiner sa préparation. Rapidement, celle-ci montre des propriétés dans le traitement des symptômes grippaux.
Forts de leur découverte, les confrères poursuivent leurs investigations jusqu’à déterminer une hauteur de dilution - 200 korsakovienne, une forme galénique - les globules, présentation courante à l’époque - et une posologie à ce qui est d’ores et déjà le médicament Oscillococcinum 200K du Dr Joseph Roy. C’est sous cette dénomination que la formule homéopathique est brevetée au cours des années 1930. Mais il faudra attendre le milieu des années 1940 pour qu’elle soit enregistrée auprès du ministère de la Santé et que lui soit délivrée une autorisation de commercialisation, donnant ainsi lieu à la reconnaissance officielle du médicament. Son indication ? Le traitement des états grippaux. Sa posologie ? Elle va rapidement s’adapter aux différentes phases de la maladie : une dose par semaine en période hivernale ; une dose à renouveler toutes les 6 heures dès que se déclarent les premiers symptômes de l’état grippal ; une dose matin et soir quand la grippe est déclarée.
Naissance d’un tube.
À ses débuts, le médicament est conditionné dans de petites fioles en verre. C’est donc ainsi qu’il se présente lorsque Joseph Roy le confie aux Laboratoires Homéopathiques de France (LHF) pour qu’il soit exploité. Puis il échoit aux Laboratoires Homéopathiques Modernes (LHM) avant de rejoindre la structure qui offrira au médicament un destin exemplaire, les laboratoires Jean et Henri Boiron. À peine la formule acquise, en 1967, que les deux frères donnent à Oscillococcinum une échelle de production d’une tout autre ampleur… Une dimension qui, à partir de 1980, va dépasser les frontières de la France. Déjà soutenu par le conseil des pharmaciens, distributeurs originels du produit, et par la prescription médicale, le médicament va bénéficier de la politique expansive mise en place par Boiron. Celle-ci se traduit par deux phénomènes concomitants, l’investissement publicitaire réalisé par le laboratoire et le début d’une phase d’essor qui offre au groupe une dimension internationale. Deux filiales sont alors créées, aux États-Unis et au Canada - elles sont aujourd’hui au nombre de 14 ! Bien évidemment, Oscillococcinum va profiter pleinement de ce fantastique élan. Rapidement distribué à l’étranger - on le trouve actuellement dans 60 pays - il bénéficie également d’une stratégie de communication parfaitement orchestrée à l’échelle nationale.
En 1982, il apparaît pour la première fois dans la presse grand public. Et quelle apparition, puisque le symbole utilisé pour représenter le médicament restera à jamais l’incarnation identitaire de la marque - et l’une des meilleures créations du monde publicitaire. Il s’agit bien sûr du fameux « tube écharpe », génialement conçu pour évoquer la dose, fondement du traitement, et la protection qu’elle offre symbolisée par l’écharpe. L’année 1987 marque le début de la communication télévisée dont la marque ne va pas se priver. En tout, sept films publicitaires vont être réalisés, tous mettant en scène le tube écharpe assorti de quelques slogans mémorables (« Aussitôt Oscillo ! »). À chaque étape, c’est un pallier supplémentaire de notoriété qui est franchi pour Oscillococcinum. Une renommée justifiée : leader des antigrippaux en France, il est reconnu pour son efficacité - 95 % des patients en témoignent - et peut compter sur une clientèle de fidèles - 46 % des patients l’utilisent depuis plus de 5 ans. Il faut dire que sa formule est dénuée de contre-indications et d’effets secondaires et qu’elle convient à tous les profils de consommateurs. Sa nouvelle présentation en boîte de 30 doses devrait également séduire le public puisqu’elle permet de couvrir toute la période hivernale. Avis aux familles ainsi qu’à tous les inconditionnels du petit tube !
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