C’EST L’ÉTUDE qui manquait. De nombreuses pathologies ont été attribuées à l’exposition in utero au diéthylstilbestrol (DES), mais quels en sont les effets cumulés sur le long terme chez les femmes concernées ? Robert N. Hoover (NIH, Bethesda) et coll. ont compilé les données de trois études pour analyser les incidences de onze pathologies gynéco-obstétricales. Ils se sont également penchés sur l’existence éventuelle d’anomalies de l’épithélium vaginal. Globalement, tous les marqueurs enregistrés montrent un surrisque par rapport à des femmes témoins, variant selon les pathologies étudiées.
L’équipe américaine a donc combiné les données de trois cohortes. L’étude Dieckmann s’est intéressée aux expositions au DES survenues dans les années 1950 et a débuté en 1975. Elle comportait 338 femmes exposées et 298 témoins. L’étude DESAD, également lancée en 1975, a porté sur 4 015 femmes ayant reçu le DES in utero et 1 034 témoins. Enfin, la célèbre étude WHI a inclus 327 femmes exposées et 716 témoins, depuis 1994.
Les risques cumulés entre les patientes ayant reçu du DES et les témoins sont respectivement les suivants : infertilité, 33,3 % contre 15,5 (hazard ratio : 2,37) ; fausse couche spontanée, 50,3 % contre 38,6 (HR : 1,64) ; accouchement prématuré, 53,3 % contre 17,8 (HR : 4,68) ; avortement au 2e trimestre, 16,4 % contre 1,7 (HR : 3,77) ; grossesse ectopique, 14,6 % contre 2,9 (HR : 3,72) ; prééclampsie, 26,4 % contre 13,7 (HR : 1,42) ; mort-né, 8,9 contre 2,6 % (HR : 2,45) ; ménopause précoce, 5,1 % contre 1,7 (HR : 2,35) ; néoplasie intraépithéliale de grade 2 au minimum, 6,9 % contre 3,4 (HR : 2,28) cancer mammaire à partir de 40 ans, 3,9 % contre 2,2 (HR : 1,82).
Modification de l’épithélium vaginal.
« Pour la plupart de ces complications, parmi les femmes exposées au DES, celles porteuses d’une modification de l’épithélium vaginal prouvée cliniquement, tôt dans leur vie (marqueur d’une dose élevée de DES et d’exposition précoce in utero), avaient une majoration significative du risque » par rapport aux témoins, écrivent les auteurs.
Globalement, l’étude de plus de 4 600 femmes exposées montre une majoration du risque d’adénocarcinome à cellules claires du vagin et du col, ainsi que dix autres complications. Globalement, toujours, les risques varient de 1,4 à 8,1 fois, avec un pourcentage de femmes atteintes variant de 1,7 % en ce qui concerne le cancer du sein à 35,4 % pour l’accouchement prématuré.
Les chercheurs reconnaissent à leur travail plusieurs points forts. Il s’agit d’une exposition in utero documentée, d’examens cliniques réguliers, d’un taux élevé de suivis et du contrôle de plusieurs effets secondaires. La seule limitation qu’ils attribuent à leur étude est que, hormis les cancers et les CIN2+, elle se fonde sur des déclarations. Mais plusieurs indices leur laissent croire en la fiabilité de ces autoévaluations.
« Bien que le DES ne soit plus prescrit chez la femme enceinte depuis quarante ans, des effets secondaires continuent de survenir chez celles exposées in utero. Un suivi continu, comme pratiqué dans cette cohorte, à la recherche de pathologies connues ou inattendues semble prudent », conclut l’équipe.
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