Toutes les heures, en France, au moins un enfant naît avec le cerveau lésé par l’alcool. Ainsi, l’association SAF France estime que l’alcoolisation fœtale touche près d’un quart des grossesses dans le pays…
Elle représente aujourd’hui la principale cause non génétique de troubles cognitifs et comportementaux et, surtout, d’inadaptation sociale. « Du fait des tabous, du manque de connaissance des professionnels et du grand public, les troubles cognitifs et comportementaux ne sont pas mis sur le compte de l’alcoolisation prénatale, expliquent les organisateurs. C’est alors une "bombe à retardement" dont héritent les Départements, acteurs incontournables de l’aide sociale à l’enfance (ASE) et de la lutte contre l’exclusion. »
Un enjeu collectif
Les conséquences du syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) sont nombreuses… Et elles s’inscrivent le plus souvent dans la durée, abîmant la vie de milliers de personnes. Des études diverses – réalisées au Canada notamment – ont montré que les adultes concernés par le SAF présentent des risques de dépression, de dépendance, d’hypersensibilité ou encore de troubles psychiatriques, tout au long de leur vie. C’est donc pour réfléchir et définir les grands enjeux de cette problématique que l’assemblée des départements de France et l’association SAF France se sont associées pour une journée de travaux à Paris. « C’est un sujet grave et préoccupant, qui nécessite la mobilisation de tous les acteurs dans une approche pluridisciplinaire, a indiqué Geneviève Avenard, Défenseure des enfants. Il s’agit néanmoins de troubles évitables : la prévention est plus que jamais une priorité. »
Des handicaps lourds
Des troubles qui seraient évitables donc, à condition de mettre en place un certain nombre d’actions de prévention et de sensibilisation… Et à condition de mieux les connaitre et les faire connaitre : malgré des progrès certains, « le SAF est toujours un problème d’actualité, avec des enfants non diagnostiqués et des modes de consommation qui changent et augmentent les risques », explique le Pr Philippe Dehaene, pédiatre. « Dès les premières semaines et tout au long de la grossesse, tous les processus du développement du cerveau sont extrêmement sensibles à l’alcool, complète le Stanislas Dehaene, membre de l’Institut (Académie des sciences). Les atteintes - mesurables – peuvent avoir une traduction cognitive et comportementale avec des troubles de l’attention exécutive, de la mémoire, des troubles DYS (dyslexie, dyscalculie) et de l’autocontrôle, qui entrainent échec scolaire et exclusion sociale. »
L’urgence de la prévention
Une meilleure information, sans banalisation et sans culpabilisation, est désormais indispensable, estiment les organisateurs du colloque. Le coût humain et financier est conséquent et, pour l’aide sociale à l’enfance (ASE), dont certains acteurs étaient présents, l’enjeu est de taille. « L’alcoolisation fœtale est au cœur de nos actions de prévention et d’accompagnement socio-éducatif », ont témoigné Béatrice Boissier et Reine-Claude Aloyau, deux éducatrices spécialisées de l’ASE à Saint-Louis (La Réunion). En présentant les résultats d’une recherche-action réalisée autour de ce sujet, elles ont évoqué des pistes d’amélioration concrètes. Accompagnements spécifiques, outils sur-mesure, prises en charge pluridisciplinaires… Des perspectives constructives qui permettront de poursuivre la mobilisation.
Le 9 septembre dernier, en marge de la Journée mondiale Santé publique France alertait : le syndrome d’alcoolisation fœtale est « la première cause de handicap mental non génétique et d’inadaptation sociale de l’enfant ». Quelque 3 207 nouveau-nés souffrant de troubles causés par l’alcoolisation fœtale ont été recensés sur la période 2006-2013, soit une naissance par jour. Parmi ces cas, 452 correspondaient à des syndromes d’alcoolisation fœtale (soit une naissance par semaine).
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