DEUX ans après la découverte des propriétés de l’imipramine (Tofranil) par le psychiatre suisse Roland Kuhn (1912-2005), le laboratoire Wander (Bâle) lança, en 1958, un programme de recherche sur les analogues de cet antidépresseur. Il permit à l’équipe de F. Hunziker, J. Schmutz et E. Stille d’obtenir des composés prometteurs dont l’amoxapine (Défanyl) et surtout une dibenzodiazépine brevetée en 1960 : la clozapine. Testée sous le nom de HF-1854, elle se distingua de la chlorpromazine (et des phénothiazines) comme de l’halopéridol (et des butyrophénones) : ce fut le premier neuroleptique n’exposant pas à une iatrogénie extrapyramidale - ce qui, un temps, pu faire douter de son efficacité ! -. Les études conduites en 1966 par des psychiatres viennois, H. Gross et E. Langner, montrèrent qu’il se révélait actif sur les signes positifs comme négatifs de la schizophrénie et améliorait les fonctions cognitives, une observation que confirma le premier essai en double-aveugle conduit en Suisse par Jules Angst en 1971. Ce neuroleptique fut commercialisé par Sandoz entre 1971 et 1975 dans de nombreux pays européens (Clozaril, Leponex, etc.). Constituant une nouvelle révolution après la découverte de la chlorpromazine, il inaugura l’ère des neuroleptiques de seconde génération, dits « antipsychotiques atypiques » - le deuxième représentant, la rispéridone, fut commercialisé près d’un quart de siècle plus tard…
Une histoire contrariée.
1975. C’est au moment où la clozapine devait pénétrer le marché américain que les espoirs des psychiatres s’évanouirent : des psychiatres finlandais constatèrent que 0,7 % des patients traités développaient une agranulocytose aiguë. La moitié des victimes de ce trouble en décédèrent et les observations colligées à l’époque révélèrent qu’une cinquantaine de patients avaient pu, au total, ainsi succomber en Europe. Le laboratoire Sandoz retira le médicament du marché dans la plupart des pays ou contraignit les patients à une surveillance draconienne. Ainsi, dans les années qui suivirent, de nombreux patients qui avaient répondu favorablement à la clozapine rechutèrent, aucun des autres antipsychotiques se montrant aussi efficace.
C’est sous la pression de patients schizophrènes, de leur famille et de collègues que John M. Kane, psychiatre au Zucker Hillside Hospital de Glen Oak (New York), conduisit un essai multicentrique pour tester le médicament. Il montra en 1988 que la clozapine n’induisait que peu d’effets indésirables neurologiques mais, surtout, qu’elle constituait un excellent traitement des formes résistantes de la schizophrénie : 30 % des patients étaient améliorés dans les 6 mois et plus de 60 % en un an. Ce fut probablement l’un des essais les plus influents de l’histoire de la psychopharmacologie.
Le recours à la clozapine fut donc à nouveau autorisé, avec un encadrement sévère ; elle fut agréée par la FDA en 1990, au bénéfice des patients résistants aux autres antipsychotiques, sous couvert d’un suivi hématologique étroit. De ce fait, l’incidence des anomalies sanguines fut divisée par dix : elle est désormais tombée à environ 0,07 %.
L’histoire retient que des travaux destinés à découvrir un antipsychotique aussi puissant que la clozapine mais n’exposant pas à sa toxicité hématologique permirent, en 1996, de découvrir l’olanzapine (Zyprexa).
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