Cas de comptoir
Le contexte
Une jeune maman ayant besoin de conseils pour l’hygiène de son bébé interroge son pharmacien. Est-il nécessaire de lui laver les oreilles, avec quel produit et comment dois-je procéder ?
Votre conseil
Le nettoyage des oreilles de bébé est important et impose surtout certaines précautions. Après le bain, bien sécher l’entrée du conduit, le pavillon et l’arrière de l’oreille avec une serviette éponge ou du coton sec. En aucun cas, il ne faut utiliser de cotons-tiges pour l’intérieur de l’oreille, au risque de former un bouchon ou pire d’entraîner la perforation du tympan. Exceptionnellement, les cotons-tiges sécurité spécial bébé peuvent être utilisés pour le pavillon seulement. Le pharmacien pourra conseiller, un bain d’oreille, une fois par semaine, pour favoriser l’élimination du cérumen, avec des solutions d’hygiène auriculaire adaptées à l’âge du nourrisson, (Audibaby en unidoses est utilisable dès la naissance), en ayant toujours à l’esprit les contre-indications de ces produits (antécédents chirurgicaux de l’oreille, douleur, otite, fièvre, perforation tympanique).
Quelques définitions
Le cérumen est une sécrétion visqueuse, jaunâtre, graisseuse, non soluble dans l’eau, produite par deux types de glandes, les glandes cérumineuses et sébacées situées à l’entrée du conduit auditif externe, dans sa partie cartilagineuse. Son aspect, et sa consistance varient en fonction de l’état de la peau du conduit, de l’âge, et de facteur génétique. En effet, les modifications de la peau observées chez le sujet âgé, sécrétions sudorales et sébacées moins abondantes, épiderme moins épais avec un taux de renouvellement diminué, se traduisent par un cérumen moins humide et de couleur plus foncée. Nous savons également que le type « cérumen humide », brun doré, prédomine en Afrique et en Europe tandis que le type « cérumen sec », gris ou brun prédomine chez les populations de l’Asie de l’Est.
Un peu de physiopathologie
Rappelons que l’oreille est divisée en trois parties, l’oreille externe, l’oreille moyenne et l’oreille interne. L’oreille externe comprend le pavillon, fragment de cartilage recouvert de peau, et le conduit auditif, tunnel d’environ 2,5 cm à 3 cm qui se termine par le tympan. L’oreille moyenne est constituée d’une cavité reliée aux fosses nasales par la trompe d’Eustache, et l’oreille interne, est formée de la cochlée, organe de l’audition et de l’équilibre. Le conduit auditif se divise lui-même en deux parties, externe et cartilagineuse, la première partie est reconnaissable à ses annexes cutanées, poils et glandes cérumineuses et sébacées qui produisent le cérumen, tandis que la deuxième, interne, est osseuse, lisse et sans annexes cutanées et ne sécrète donc aucun cérumen. Il faut savoir que le conduit auditif est autonettoyant. En effet, le cérumen est spontanément et progressivement expulsé vers l’extérieur, en même temps que le renouvellement de la peau du conduit, l’élimination des squames vers l’extérieur se trouvant facilitée par les mouvements de la mâchoire. C’est pourquoi le nettoyage régulier du cérumen ne doit se faire qu’au niveau de l’entrée du conduit auditif externe et non dans celui-ci.
Quelle est l’utilité du cérumen ?
La fonction principale du cérumen est de protéger la peau du conduit auditif externe en la lubrifiant. La pellicule de cérumen constitue non seulement une barrière chimique, mais également un véritable piège à corps étrangers comme les poussières ou autres petits débris volant dans l’air. Le cérumen a aussi une fonction antibactérienne. Une fine couche de cérumen est donc bénéfique à la protection de l’oreille et s’acharner à l’enlever ne peut être que contre-productif. L’absence de cérumen peut provoquer des démangeaisons et des irritations du conduit auditif externe. Cependant, il arrive parfois que le cérumen s’accumule pour former un véritable agglomérat de cellules de peau morte et de sécrétions cérumineuses, d’impuretés et de bactéries, que l’on appelle communément le bouchon de cérumen. Un nettoyage d’oreille devient alors nécessaire.
Les cellules desquamées forment une trame en filet. C’est avant tout sur ces cellules et leurs liaisons intercellulaires que doivent agir les produits dits « céruménolytiques ». Ce risque augmente bien sûr chez les personnes qui en produisent beaucoup, ou dans certaines situations pouvant contrarier la fonction autonettoyante, comme le port de prothèse auditive, le diamètre étroit du conduit chez l’enfant, ou la présence de poils, en cas d’anomalie de la desquamation de la peau (psoriasis, eczéma…) ou encore dans les cas d’utilisation abusive de cotons tige, qui repousse le cérumen au fond du conduit.
Les mots du conseil
Quand consulter
?
Avant tout si le patient ressent une douleur ou présente un écoulement de l’oreille, s’il perçoit des acouphènes, ces bourdonnements ou sifflements que l’on entend en l’absence de toute source sonore, s’il se plaint d’une surdité d’apparition brutale, le pharmacien veillera à bien l’informer de la nécessité d’une consultation médicale. Par ailleurs, face à la présence d’un corps étranger, d’un bouchon dur, d’un bouchon sur un terrain de perforation tympanique connue ou sur un terrain à risque (présence d’aérateurs transtympaniques), ou en cas de persistance d’un bouchon après trois ou quatre jours de traitement, seul l’examen d’un spécialiste ORL au moyen d’un otoscope, et son intervention grâce à l’utilisation d’instruments adaptés, se révéleront efficaces.
La prévention avant tout !
Une bonne hygiène auriculaire permet de prévenir la constitution de bouchons de cérumen, et de préserver ainsi ses fonctions. En effet, si le cérumen, ne joue plus son rôle protecteur naturel contre les agressions extérieures (poussières, germes, impuretés), eczéma mycoses, et infections peuvent s’installer, autant de désagréments qui peuvent être évités. Mais l’anatomie et la physiologie de l’organe doivent être respectées en adoptant de bons gestes, comme d’éviter de pénétrer trop profondément dans le conduit, d’autant que la production de cérumen se fait à l’entrée du conduit. Bien que très usités, il est préférable d’éviter les cotons-tiges, ou de limiter leur utilisation au pavillon de l’oreille et à l’entrée du conduit. Préférer le jet de la douche ou une solution d’hygiène auriculaire à pulvériser une à deux fois par semaine, en inclinant la tête sur le côté afin de favoriser l’écoulement du liquide et des résidus et en séchant bien le conduit auditif après la pulvérisation. Ne pas oublier de passer l’embout sous l’eau tiède après chaque utilisation. Ces solutions permettent de fluidifier et d’éliminer les impuretés du conduit auditif, afin d’empêcher l’accumulation de cérumen et la formation de bouchons.
Une hygiène auriculaire adaptée
La sécrétion de cérumen variant d’un individu à l’autre, une bonne hygiène auriculaire sera conseillée avant tout aux personnes, adultes ou enfants, qui en produisent en excès, et donc sujettes à la constitution de bouchons de cérumen, mais également aux sujets exposés au milieu poussiéreux, par temps chauds et en présence d’agresseurs comme l’eau de mer, le vent ou le sable, ou en cas d’utilisation de bouchons contre les variations de pression atmosphérique, contre l’eau ou le bruit.
Qu’en est-il du porteur de prothèse auditive ?
La seule présence de la prothèse gêne l’évacuation du cérumen en le maintenant au fond du conduit. Ces débris de cérumen se déposent alors sur l’appareillage, provoquant ainsi des sifflements intempestifs, donnant l’impression d’un dysfonctionnement de l’appareil. Une utilisation régulière des solutions d’hygiène auriculaire est donc vivement recommandée chez ces patients, après avoir pris soin d’ôter la prothèse auditive.
Comment reconnaître la présence d’un bouchon de cérumen ?
Comme nous l’avons vu, parfois le cérumen stagne dans le conduit, s’accumule et l’obstrue. Ce bouchon, véritable handicap, est responsable de la sensation d’oreille bouchée, accentuée après le bain ou la douche, de bourdonnements ou d’acouphènes par hyperpression sur le conduit, parfois de vertiges, et d’une baisse de l’audition. La formation de ce bouchon étant un phénomène lent, la personne s’habitue progressivement à la baisse de son acuité auditive, sans s’en rendre compte (la surdité due à un bouchon de cérumen apparaît progressivement en 3 à 4 jours).
Comment traiter un bouchon ?
Traiter le bouchon restaure l’audition. Les solutions céruménolytiques permettent de dissoudre les bouchons, leur utilisation doit toutefois imposer de vérifier au préalable l’intégrité tympanique. Procéder à un bain d’oreille. Tête inclinée, instiller 3 à 4 gouttes du produit, et laisser agir quelques minutes. Ce temps de contact permet de ramollir le bouchon, puis rincer à l’eau tiède ou au sérum physiologique, ou à l’eau oxygénée boratée grâce à une poire effilée à oreille, en évitant le jet directement sur le tympan, le lysat est ainsi aspiré et évite la reconstitution du bouchon, le traitement peut être renouvelé pendant 3 à 4 jours.
Produits conseils
En matière d’hygiène auriculaire, nous disposons de solutions utilisées pour nettoyer le conduit auditif et favoriser l’évacuation naturelle du cérumen, et de solutions céruménolytiques proprement dites, indiqués en traitement dès lors que le bouchon est déjà constitué.
Les solutions d’hygiène, pour la plupart à base d’eau de mer (Océan Pharmacien), peuvent être parfois enrichies en glycérol pour hydrater et apaiser le conduit auditif externe (Audispray softy) ou contenir du calendula et de la glycérine pour leurs propriétés émollientes (Otolaya).
Elles se présentent sous forme de spray (Audispray adultes) essentiellement sans gaz propulseur pour ne pas générer de traumatisme du conduit ou du tympan surtout chez l’enfant (Audispray junior, Docuspray Quies, Physiomer) ou sous forme d’unidoses (Audibaby) pour une hygiène optimale et pour le côté pratique. Otolaya a la particularité de posséder un embout à jet circulaire qui permet de laver le conduit auditif sans endommager le tympan.
En règle générale, chez l’enfant ces solutions peuvent être utilisées une fois par semaine, à partir de 6 mois pour certaines (Physiomer oreille, Audiclean), de 30 mois en raison de la présence de tensioactifs (Docuspray, Otolaya), dès la naissance pour Audibaby unidoses, à partir de 6 ans pour d’autres (Audispray softy). Chez l’adulte, la fréquence d’utilisation peut varier de 2 à 3 fois par semaine.
Quant aux céruménolytiques (Cérulyse, Doculyse, A cerumen, Audiclean bouchons...), ils agissent en désagrégeant le bouchon formé ou en voie de formation, en attaquant la structure des squames qui constitue la plus grande partie du bouchon et non le cérumen lui-même. Leur pouvoir émollient ramollit le bouchon et facilite son évacuation. Attention, il faut toujours avoir à l’esprit que ces produits ne doivent être utilisés en cas de perforation tympanique, d’antécédent d’intervention chirurgicale de l’oreille moyenne, de port de drain, d’otites. En cas de doute, ne pas hésiter à consulter.
Comme accessoires, les bâtonnets ouatés peuvent être employés pour le nettoyage du pavillon, la zone derrière l’oreille, et l’entrée du conduit, en restant extrêmement prudent pour ne pas pénétrer à l’intérieur du conduit. Plus pratique et moins dangereux que les cotons-tiges classiques, les bâtonnets double emploi (Otospoon) qui possèdent 2 embouts différents, un embout ouaté classique et l’autre sous forme de coupelle aux bords arrondis et souples, visant à évacuer le cérumen en évitant de le repousser et de le tasser.
Le Cure-oreille métallique (Cure Oreille Audilo) peut aussi être utilisé avec précautions, pour les dépôts de cérumen accumulés à l’entrée du conduit.
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