C’est en 1898 que la fiancée d’un jeune médecin suisse, Auguste Rollier (1874-1954), se trouva victime d’une infection aussi banale que grave puisqu’elle constituait alors l’une des premières causes de décès : la tuberculose. Une tuberculose d’autant plus préoccupante qu’elle se développait dans ses articulations. Rollier n’hésita pas un instant à renoncer au prestige de la carrière de chirurgien qui lui était promise à Berne pour se consacrer à celle qui, entre-temps, était devenue sa femme. Convaincu que la tuberculose ne pouvait être guérie que dans un environnement d’une grande pureté, le couple s’établit en 1903 dans un petit village des Alpes vaudoises, Leysin. En quelques mois, sa femme, bénéficiant d’un ensoleillement d’exception, y recouvra la santé. Durablement. Rollier fut dès lors plus convaincu que jamais du pouvoir thérapeutique du rayonnement solaire. S’inspirant d’établissements déjà ouverts en Allemagne et en France, au bord de mer ou en montagne, il créa le « Chalet », un sanatorium (du latin sanator : qui guérit) destiné à accueillir des enfants atteints de tuberculose extra-pulmonaire et ostéo-articulaire. En pratique, il s’agissait d’un immense solarium où les jeunes patients profitaient d’un ensoleillement abondant auquel ils étaient exposés de façon progressive - pour finir par rester au soleil jusqu’à 6 heures quotidiennement -. La méthode « héliothérapique » de Rollier puisait à la fois de la médecine « naturalistique » prônée en Allemagne par Rudolf Virchow (1821-1902) et surtout des procédés développés au Danemark par Niels R. Finsen (1860-1904, Prix Nobel 1903) pour traiter par le soleil des affections dermatologiques. Il l’appliqua ici à la tuberculose osseuse selon les principes de Robert Koch (1843-1910) qui affirmait en 1890 que le soleil pouvait avoir raison de toutes les bactéries - y compris du bacille de la tuberculose qu’il avait découvert -.
Lumière solaire et morale
Rollier adjoignait cependant à sa « cure de soleil » de rigoureux principes d’hygiène, d’activité physique mais aussi de droiture morale - gage à ses yeux d’une meilleure guérison - : ses patients étaient soumis à des règles strictes et, si leur état l’autorisait, ils travaillaient dans l’institution pour se sentir utile et mieux accepter les sujétions d’un traitement particulièrement prolongé mais qui, pour l’époque, étonnait par ses résultats : environ 80 % de succès puisque seuls les cas les plus désespérés à leur accueil ne pouvaient tirer parti des bienfaits de ce séjour alpestre ! Il perfectionna puis théorisa sa méthode dans La Cure de Soleil, un ouvrage publié au début de la Grande Guerre et qui resta de ce fait confidentiel - il ne fut traduit en anglais et diffusé en Europe qu’à partir de 1923 -. Le succès de son établissement de soins et de la pratique de Rollier fut tel que Leysin devint rapidement un centre de cure renommé : en 1940, l’« héliothérapeute » y possédait à lui seul 18 sanatoriums, sans évoquer les établissements gérés par d’autres médecins (en 1946, le village accueillait 3 500 malades du monde entier dans 80 sanatoriums !).
La cure solaire constitua un modèle dans de nombreux autres pays. Ainsi, Caleb Saleeby (1878-1940), un médecin anglais, fit le pari de développer l’héliothérapie en Angleterre, pays pourtant peu propice au soleil, et suscita même la création d’un « Comité du Soleil » auprès du Medical Research Council.
Ce n’est qu’avec l’amélioration de la salubrité des logements et l’avènement de l’antibiothérapie juste après la Seconde Guerre mondiale que les solariums thérapeutiques perdirent en popularité, finissant par être relégués dans une histoire dont témoigne cependant toujours La Montagne Magique (1924), le célèbre roman qu’inspira à Thomas Mann un bref séjour dans un sanatorium de Davos, en 1911.
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