« IL EXISTE de nombreux besoins médicaux insatisfaits auxquels la nanomédecine peut apporter des réponses », explique au « Quotidien » Laurent Levy, vice président de l’European technologie plateforme nanomedecine (ETPN). Nanobiotix, la société que ce doctorant en physique-chimie a co-fondée, s’attaque à l’amélioration de l’efficacité de la radiothérapie en développant les nanoparticules NBTX3. Une fois injectées dans la tumeur, les NBTX3 sont censées augmenter les dégâts occasionnés aux cellules tumorales par les rayons qui les bombardent, sans qu’il y ait besoin d’augmenter la dose de rayonnement, et donc de mettre en danger les tissus alentours. Malgré leur taille de 50 nm, qui les placent entre le virus et l’anticorps, elles sont considérées comme un dispositif médical par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). A contrario, la Food and Drug Administration américaine a estimé que cette technologie relevait bien du médicament.
Un effet purement physique
Le processus mis en œuvre par NBTX3 est pourtant purement physique : lors d’une radiothérapie, les molécules d’eau présentes dans le corps vont relâcher des électrons qui vont endommager la cellule. Or, selon Laurent Levy, « les nanoparticules du NBTX3 ont une densité en électrons bien supérieure à celle de l’eau, la dose absorbée et l’énergie délivrée vont être multipliées par neuf uniquement là où les nanoparticules se sont fixées ». Trois utilisations de cette technologie sont à l’heure actuelle envisagées : l’injection intratumorale pour maximiser l’effet d’une radiothérapie néoadjuvante, le dépôt sous forme de gel lors de l’intervention dans l’optique d’une radiothérapie adjuvante, et l’injection en intraveineuse lorsque l’injection intratumorale n’est pas appropriée. C’est le premier mode de délivrance des nanoparticules qui est actuellement évalué.
Une première preuve de concept
Un essai clinique de phase 2 a été lancé chez 12 patients atteints d’un sarcome des tissus mous ou d’un cancer de la tête ou du cou. Selon les résultats intermédiaires présentés en juin dernier au congrès de l’American society of clinical oncology (ASCO) à Chicago, l’injection des nanoparticules est faisable, quels que soient le patient et la typologie de la tumeur. Un premier CT scan a été réalisé 24 heures après l’injection et un autre après 25 irradiations réparties sur cinq semaines. La comparaison de ces deux examens a démontré que le produit ne diffusait pas en dehors de la tumeur malgré la mort d’une partie des cellules où elles étaient fixées. « Cela ne signifie pas que l’on a démontré un bénéfice pour le patient », nuance Laurent Levy, « mais au moins nous sommes certains que si l’on augmente les doses de nanoparticules, elles resteront dans la tumeur ». Les résultats finaux sont prévus pour la fin du premier trimestre 2014. Ils devraient alors également comprendre les premières données d’efficacité chez l’humain.
Le cheval de Troie de la doxorubicine
Autre projet présenté pour promouvoir le Nano World Cancer Day : le Livatag mis au point par BioAlliance qui se propose d’aider la chimiothérapie à contourner les défenses mises en place par les cellules tumorales du cancer primitif du foie. Le Livatag est une doxorubicine nanoformulée, c’est-à-dire une liaison entre la doxomicine et un polymère de synthèse : le polyisohexylcyanoacrylate ou PIHCA. « L’hépatocarcinome est un cancer extrêmement résistant », nous explique Judith Greciet, directrice générale de Bioalliance Pharma, « les cellules cancéreuses disposent de pompes MDR qui maintiennent la doxorubicine à l’extérieur. » La doxorubicine nanoformulée n’est pas reconnue par la MDR, et comme la liaison entre la nanoparticule et la doxorubicine est relativement faible, cette dernière sera statistiquement souvent relâchée à l’intérieur de la cellule à détruire.
Une formulation qui a dû être revue
Une étude de phase 2 avait montré une survie de 32 mois avec le Livatag, contre 15 mois avec la chimiothérapie TACE, mais l’étude de phase 3 avait prouvé un surrisque de syndrome de détresse pulmonaire. Cet effet secondaire a été éliminé en réduisant la dose, et en allongeant l’administration en intraveineuse sur six heures. L’ANSM a par la suite autorisé une nouvelle phase 3, en deuxième ligne après échec du sorafenib. Entamée en juin, elle doit à terme inclure 400 patients pour des résultats attendus en 2016.
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