Des naissances pas comme les autres

Les nouveaux nés de la science

Publié le 09/02/2009
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UN, deux, trois, quatre, cinq... huit enfants ! La naissance d’octuplés fin janvier aux États-Unis n’est pas passée inaperçue. Et pour cause, cet événement extraordinaire est le deuxième du genre dans les annales de la médecine. Mais si, à première vue, il provoque la surprise et suscite la curiosité, cet accouchement hors norme pose aussi de nombreuses questions. Voire soulève l’indignation. Car c’est une science dévoyée qui en est la cause. Cette grossesse est en effet le fruit d’une fécondation in vitro qui a abouti à la réimplantation de huit embryons. Lorsque l’on sait, de plus, que la mère, célibataire, vit chez ses parents avec ses six premiers enfants, on s’interroge sur les raisons qui ont amené ces drôles de médecins à accéder à sa demande. À peine moins surprenante, mais également contestable, est la naissance la semaine dernière au Canada de jumeaux nés d’une mère âgée de soixante ans. Là encore, la science a mis son grain de sel pour générer une grossesse au-delà des frontières imposées par la nature. Comme le Canada la lui avait refusée, la candidate à la maternité est allée en Inde chercher sa fécondation in vitro. Et l’accouchement s’est passé à Calgary, haut lieu de l’olympisme qui déjà vu bien d’autres records. « J’ai d’abord cru à une blague », a confié l’obstétricien qui a pratiqué l’accouchement. Avant d’ajouter, « il y a tellement de choses que nous pouvons faire aujourd’hui qu’il faut se demander si nous devrions les faire simplement parce que nous en sommes capables ». Comme vous avez raison, Docteur. Séparer des siamois, par exemple. Voilà pour le coup un usage raisonnable de la science que l’on est tenté d’applaudir. L’opération qui s’est déroulée la semaine dernière à Paris a ainsi rendu leur autonomie à deux petits frères de huit mois qu’un caprice de la nature avait collé in utero par le foie. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », disait Rabelais. Oserais-je ajouter après le maître : « Naissance sans conscience est de celle qu’on blâme ».

DIDIER DOUKHAN

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2637