Analyse des dossiers à New York

Les décès dus à la grippe A(H1N1)v

Publié le 14/12/2009
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Sur la décision d’une instance médicale du NIH américain, des scientifiques ont examiné de manière approfondie les dossiers médicaux complets et les rapports d’autopsie de 34 personnes décédées à New York après une grippe A(H1N1)v. Les caractères anatomopathologiques sont similaires aux pandémies passées. Des états morbides préexistants sont très fréquents : obésité, maladies cardio-respiratoires ou immunodépression.
L’étude ouvre le débat sur l’intérêt d’un scanner pulmonaire

L’étude ouvre le débat sur l’intérêt d’un scanner pulmonaire
Crédit photo : S TOUBON

« NOUS AVONS analysé les dossiers médicaux, les rapports d’autopsie, les examens microbiologiques et les coupes histopathologiques de 34 personnes décédées entre le 15 mai et le 9 juilllet à New York, à la suite d’un diagnostic confirmé d’infection par le virus H1N1 », écrit James Gill, qui a conduit l’équipe du « New York City Office of Chief Medical Examiner ». Une excellente possibilité d’examiner la pathogénie associée au virus A(H1N1)v de 2009, pour guider la prise en charge.

Ainsi, cela confirme l’âge plutôt jeune de la population concernée. La plupart de ces patients décédés (62 %) étaient âgés de 25 à 49 ans (âge moyen de 41,5 ans) ; deux nourrissons sont aussi présents dans ces cas fatals. Alors que, rappelons-le, les décès de la grippe saisonnière touchent les adultes de plus de 65 ans.

Les voies aériennes basses. L’examen microscopique des tissus montre que les dommages causés par le virus se situent principalement au niveau des voies aériennes supérieures, avec une trachéite et/ou une bronchite. Dans tous les cas, les tissus sont inflammatoires, avec des dommages souvent sévères. Mais le virus a aussi attaqué les voies aériennes basses (18 cas) : branches fines de l’arbre bronchique et bronchioles. Enfin, une pneumopathie virale grippale, avec des dommages alvéolaires diffus ou focaux est présente dans 25/34 cas. Elle est souvent associée à une formation marquée de membrane hyaline, un œdème pulmonaire et dans 8 cas, à une hémorragie aiguë pulmonaire. « Ces observations pathologiques sont tout à fait similaires à celles des d’autopsies qui ont été publiées à l’occasion des pandémies de 1918 et 1957 », observent James Gill et coll. Il y a aussi une ressemblance, mais moins marquée, avec les observations physiopathologiques de la grippe saisonnière.

Une surinfection bactérienne pulmonaire est trouvée dans plus de la moitié de ces cas de cette série (55 %). Comme tous les individus ayant eu une pneumonie bactérienne en comorbidité avec la grippe A(H1N1)v n’ont pas été hospitalisés, certains d’entre eux ont donc dû acquérir leur infection en dehors des services de soins. « Ce qui tend à indiquer que les pneumonies communautaires ont un rôle dans la pandémie actuelle », et que, « même à l’ère actuelle, où l’on sait prescrire une antibiothérapie précoce, la pneumonie bactérienne demeure un facteur important de grippe sévère ou fatale. »

Comorbidité dans 91 % des cas.

Une comorbidité existe chez pratiquement tout le monde, c’est-à-dire dans 91 % de ces cas. Avec la préexistence de maladies cardiaque (10 cas) et/ou cardio-respiratoires (6 cas), d’asthme (6 cas) et le plus souvent sous la forme de polypathologies. Une immunosuppression est présente dans 5 dossiers (sida, leucémie, insuffisance rénale). On observe que 72 % des adultes et des adolescents décédés étaient obèses ; une constatation qui rejoint celle des rapports récents, associant l’obésité à un risque accru de décès en cas de grippe A(H1N1)v.

La recherche par PCR des antigènes du virus A(H1N1)v montre une distribution prépondérante dans l’épithélium trachéo-bronchique et au niveau des glandes sous-muqueuses. Le virus est aussi présent, à un moindre degré, dans l’épithélium bronchiolaire, dans les cellules épithéliales alvéolaires et dans les macrophages.

Un scanner pulmonaire est disponible dans 4 cas d’infection bactérienne pulmonaire. Il montre chez tous une opacité en forme de verre dépoli, arrondie et brumeuse. On ne sait si ces anomalies détectées dans ces 4 cas peuvent aussi exister dans des cas d’infections par A(H1N1)v moins sévères. Les auteurs appellent à des recherches sur l’utilité du scanner pour l’identification et le traitement de cette nouvelle grippe.

Archives of Pathology & Laboratory Medicine, vol. 134, février 2009.
› Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2711