Les allergies aux pollens

Publié le 25/03/2010
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La rhinite allergique (RA) se traduit, en période de floraison, par un ensemble de symptômes qui perturbent considérablement la vie quotidienne. Les plaintes à l’officine sont nombreuses. Les réponses possibles sont autant dans le conseil en mots que dans les solutions thérapeutiques.
La saison pollinique a commencé

La saison pollinique a commencé
Crédit photo : AFP

Quelques définitions

La rhinite allergique est une inflammation aiguë ou chronique de la muqueuse nasale en rapport avec un mécanisme immunopathologique IgE médié. Elle se manifeste par des éternuements en slave, un prurit, un écoulement et une obstruction nasale. Le tableau clinique se complique souvent de maux de tête, de troubles olfactifs (anosmie), de larmoiements et d’irritations oculaires, et d’une fatigue parfois majorée par des troubles du sommeil.

La rhinite pollinique saisonnière ou rhume des foins (pollinose) survient chaque année à la même époque (avril jusqu’à septembre). C’est une réaction aux allergènes répandus dans l’atmosphère, par opposition aux allergènes d’intérieur type acariens, poils de chat. Rare avant l’âge de cinq ans, elle apparaît le plus souvent vers la puberté. Les symptômes sont rythmés par les conditions météorologiques.

La rhinite allergique dite persistante se manifeste tout au long de l’année et dépend surtout d’allergènes domestiques (blattes, acariens, poils d’animaux). L’obstruction nasale est marquée et s’accompagne souvent d’un asthme.

Un peu de physiopathologie

La réaction allergique IgE médiée nécessite d’abord que l’organisme ait été préalablement sensibilisé par l’allergène, ce qui se traduit par la synthèse d’IgE spécifiques de cet allergène. Par l’intermédiaire de récepteurs, ces IgE vont se fixer sur la membrane de certaines cellules effectrices (mastocytes, basophiles, éosinophiles, macrophages, cellules de Langherans, lymphocytes B…). Lors d’un nouveau contact de l’allergène avec les IgE fixées sur les cellules, ces dernières, et particulièrement les mastocytes, vont relarguer des médiateurs préformés dont le chef de file est l’histamine. Dans un second temps, elles synthétisent des médiateurs métaboliques de l’acide arachidonique (leucotriènes) et des cytokines. Ces médiateurs sont responsables des signes de la rhinite. Une réaction non immédiate est possible 2 à 8 heures après le début de l’exposition allergénique. Elle est due à l’éosinophile qui libère des médiateurs cytotoxiques favorisant la pérennisation de l’inflammation.

Les mots du conseil

Le rapport Aria (Allergic rhinitis and its impact on asthma) distingue la rhinite légère quand les symptômes sont peu gênants et n’altèrent pas le sommeil, les activités socioprofessionnelles, scolaires ou de loisirs, et la rhinite modérée à sévère en cas de perturbations du sommeil ou d’une ou plusieurs activités.

À quel(s) pollen(s) êtes-vous allergique ?

Avec le rhume des foins, on pense avant tout au pollen de graminées mais il en existe beaucoup d’autres. Les pollens de cyprès dès le mois de janvier février dans le Sud de la France, les pollens de noisetier en région parisienne dès le mois de février, ceux d’aulne en mars, ceux de bouleau en avril, ceux de graminée au mois de mai-juin. Puis en période estivo-automnale ce sont les pollens d’herbacée (ambroisie, armoise). Il existe de grandes disparités régionales liées à la répartition des espèces botaniques et aux variations de climat.

Avez-vous de l’asthme ?

La fréquence de l’asthme est beaucoup plus fréquente chez les patients souffrant de RA et inversement : un tiers des RA s’associent à de l’asthme et deux tiers des asthmatiques ont une RA. On parle de continuité des voies aériennes hautes et basses.

Souffrez-vous d’irritations oculaires ?

Les conjonctivites allergiques accompagnent souvent la rhinite allergique, elles sont bilatérales, récidivantes et se traduisent par un larmoiement abondant, un œil rouge, du prurit et parfois une photophobie.

Respectez-vous les pics polliniques ?

En ville, le pic pollinique est atteint en fin de journée, alors qu’à la campagne la densité pollinique est plus forte en début de journée. Une pollinose peut être provoquée par une succession de plusieurs pollens sur quatre à six mois consécutifs. Des capteurs servant à mesurer les quantités de pollens diffusés dans l’atmosphère permettent d’établir des calendriers de pollinisation.

Êtes-vous exposé à des facteurs aggravants ?

La sensibilité aux pollens est augmentée en cas d’antécédents allergiques familiaux, et selon l’âge entre 15 à 35 ans (il y a peu d’apparition après 35 ans). Les polluants d’origine industrielle, la pollution domestique (tabac), les températures élevées, le vent favorisent la survenue des pollinoses. En revanche, une altitude élevée, la pluie diminuent les risques. Le rôle des allergènes alimentaires n’est pas exclu, d’autant qu’il existe des allergies croisées (pomme et pollens de bouleau, céleri et pollens d’armoise).

Quelles précautions prenez-vous ?

Quelques mesures pratiques peuvent minimiser la survenue ou l’intensité des symptômes, comme éviter d’avoir des activités de plein air les jours de forte densité pollinique, dormir avec les fenêtres fermées, porter des lunettes de soleil pour faire écran aux pollens, laisser les habits portés la journée hors de la chambre, limiter l’emploi de l’air conditionné, passer fréquemment l’aspirateur afin d’éliminer les allergènes d’intérieur : même si ces agents ne sont pas la cause du rhume des foins, ils peuvent l’aggraver.

Êtes-vous certain que votre rhinite est allergique ?

Une rhinite qui évolue depuis plusieurs années, caractérisée par une obstruction nasale bilatérale, une baisse importante de l’odorat, l’absence d’éternuements, doit faire évoquer une polypose nasosinusienne (PNS). Cette maladie œdémateuse chronique entraîne la formation de polypes. Elle peut être associée à une allergie non IgE médiée (25 % des cas) ou un asthme (70 % des cas) et à une intolérance à l’aspirine et aux Ains.

Les produits conseils

Le traitement dépend du niveau de sévérité de la RA, mais il est important de la traiter vite et bien. Or, souvent le patient ne se traite pas ou ne prend pas les bons médicaments. En réponse à ses questions, les conseils du pharmacien doivent l’aider à minimiser la survenue, l’évolution et les symptômes de sa pathologie.

Comment évolue un RA pollinique non pris en charge ?

Au début, l’allergique sera gêné deux ou trois mois dans l’année. S’il ne se traite pas, l’allergie deviendra de plus en plus sévère et la durée de la gêne s’étendra à tout le printemps et au début de l’été, puis l’inflammation va se pérenniser sur l’ensemble de l’année. Permanente, cette inflammation favorise la sensibilisation à d’autres allergènes comme les acariens ou les phanères d’animaux, avec le risque de voir apparaître un asthme pollinique sévère.

Peut-on traiter préventivement les symptômes de la rhinite ?

Même si l’allergie peut être traitée préventivement, lorsque l’éviction totale des pollens est impossible la rhinite est inévitable, mais il est important de la traiter dès les premiers symptômes : au tout début de l’exposition à l’allergène, il faut une grande quantité d’allergènes pour déclencher la RA mais une fois débutée, de petites quantités d’allergènes suffiront à entretenir le processus. En bloquant le rhume des foins dès le début on l’empêche de s’emballer.

Le lavage des fosses nasales est-il utile ?

Les lavages avec des solutions d’eau de mer stérilisées ou du soluté physiologique en dosette constituent le premier geste d’hygiène quotidien pour les rhinopharyngites et les rhinites allergiques. Les présentations isotoniques permettent de laver tous les nez à tous les âges. Les solutés hypertoniques sont conseillés en cas de nez bouché. Gammes Physiomer, Fluimer, Humex, Stérimar…

Comment stopper les éternuements et les picotements ?

Les traitements locaux sont suffisants pour traiter une RA légère à modérée. Le cromoglycate de sodium par voie nasale agit sur les principaux symptômes de la rhinite allergique, il est bien toléré mais son action est brève et incomplète. Les antidégranulants mastocytaires ont des indications similaires et leur tolérance est bonne. Tous les deux inhibent la libération des médiateurs chimiques responsables des réactions allergiques.

Comment agissent les poudres nasales ?

Elles préviennent les allergies respiratoires en exerçant un rôle de filtre. Elles forment un film protecteur sur la muqueuse et empêchent le contact avec les allergènes et diminuent l’apparition des troubles liés à la crise allergique. Elles se présentent sous forme de sprays et il faut renouveler les pulvérisations plusieurs fois par jour. Prevalin TM, Nasalerg, Nasaleze.

Que faire pour calmer les démangeaisons oculaires et le larmoiement ?

Faites des lavages oculaires trois à quatre fois par jour avec des solutions, de préférence sans conservateur (Dacryosérum, Phylarm, Ciella, Optraex, Sophtal…). Instiller ensuite un collyre antiallergique à base de cromoglycate de sodium (Cromedil, Multicrom, Ophtacalm, Opticron), de lodoxamide (Lodoxal), de N-acétyl-aspartyl glutamate (NAAGA-Naaxia) ou Lévocabastine (AllergiFlash)) en privilégiant les unidoses à usage unique. Les collyres anti-irritants et décongestionnants atténuent la gêne liée à une irritation ou une fatigue oculaire.

Quels sont les traitements conseils efficaces par voie orale ?

Les antihistaminiques H1 oraux de nouvelle génération (non anticholinergiques), dont la cétirizine est le chef de file, sont les produits conseils par excellence de la RA. Ils agissent sur la plupart des symptômes par inhibition de la libération de l’histamine à l’origine de la réaction allergique inflammatoire. (Actifed Duo LP, Actifed Allergie, Alairgix, Humex rhinite allergique, Zyrtecset, Cétirizine génériques et aussi Loratadine conseil Arrow et Ratiopharm). Ils n’ont pas d’effets sédatifs, mais la durée du traitement conseil ne doit pas excéder sept jours sans avis médical, et ils sont réservés aux adultes et aux enfants de plus de 12 ans.

La corticothérapie nasale comporte-t-elle des risques ?

Les principaux effets secondaires sont locaux : sensation de picotements ou de brûlures nasales, sécheresse nasale, épistaxis. Il n’y a pas d’atrophie de la muqueuse. Les effets secondaires systémiques sont négligeables lorsque les produits sont utilisés aux posologies recommandées (Humex rhume des foins à la béclométasone, Pivalone (soumis à la prescription médicale)).

Quand envisager une désensibilisation ?

La désensibilisation, appelée aussi immunothérapie spécifique, est justifiée si les allergènes ne peuvent être suffisamment exclus. Elle se révèle plus efficace qu’auparavant, surtout pour les pollens. Les produits utilisés sont davantage purifiés donc plus réactifs. Chez l’enfant (à partir de cinq ans), elle peut limiter l’apparition d’autres sensibilisations et l’émergence d’un asthme.

La désensibilisation sublinguale est-elle aussi efficace ?

Depuis quelques années, la voie sublinguale, plus sûre et plus simple, tend à supplanter la voie sous-cutanée. Son efficacité est principalement prouvée pour les acariens et les pollens (graminés surtout, bouleaux, ambroisie…). Elle concerne surtout les patients monosensibilisés ou pauci-sensibilisés, mais elle peut être envisagée sur un terrain de polysensibilisation.

Comment se pratique-t-elle ?

L’allergène est déposé le matin à jeun sous la langue, et il doit être gardé deux minutes avant d’être dégluti. L’allergène est administré trois jours par semaine en moyenne. Il ne doit pas être administré avant le coucher en raison d’un risque éventuel de réaction pendant la nuit, ainsi qu’en cas de plaie buccale, d’épisode fébrile aigu ou de crise d’asthme.

Quels sont ses avantages et inconvénients ?

C’est une pratique bien tolérée, même pour des doses élevées d’allergènes, les réactions systémiques sont rares et jamais alarmantes. Elle est très bien acceptée par les plus jeunes à partir de cinq ans et les adultes qui redoutent les injections. L’autre avantage est qu’elle se pratique à domicile, et qu’elle ne nécessite pas l’intervention régulière d’un médecin.

Elle exige une parfaite coopération entre le patient et l’allergologue ainsi qu’une observance correcte. La désensibilisation va durer au moins trois ans, et le fait de garder deux minutes sous la langue les gouttes d’allergènes peut être vécu, à long terme, comme une contrainte. De plus, les résultats ne sont pas immédiats, ils ne deviennent significatifs qu’à partir de la deuxième année. Il faut que les patients restent très motivés.

Que penser des tests cutanés ?

Les tests cutanés ou prick tests permettent l’exploration de l’hypersensibilité immédiate. Leur réalisation par l’allergologue consiste à effectuer une ponction épidermique et à introduire un allergène à travers une goutte déposée sur la peau. La lecture s’effectue 15 minutes plus tard. Le test est considéré comme positif lorsqu’il se produit une réaction à type d’urticaire avec formation d’une papule d’au moins 3 mm de diamètre.

› CHRISTINE NICOLET

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2736