Plasmodium falciparum est présent chez l'Homme dans les globules rouges. Or la rate, organe lymphoïde secondaire et filtre des cellules sanguines, a pour rôle d'éliminer les cellules infectées. Pour passer outre cette barrière, le parasite a développé un stratagème : empêcher la rigidification de la membrane des globules rouges infectés, leur permettant de se déformer, de passer le filtre splénique, de rester plusieurs jours dans la circulation sanguine, et donc d'être potentiellement transmis à l'anophèle et à un autre hôte humain. Le parasite secrète pour cela de la phosphodiestérase, qui dégrade les molécules d'AMP cyclique (AMPc) que produit habituellement le globule rouge.
Les inhibiteurs de la phosphodiestérase (parmi lesquels le Viagra), comme leur nom l'indique, viennent contrer ce phénomène : la membrane du globule rouge infecté demeure rigide avec ce traitement, et la cellule est bloquée et éliminée par la rate. Le parasite ne peut plus être transmis de l'Homme au moustique, et la propagation pourrait donc être stoppée par ce biais.
Lutter contre les formes sexuées de Plasmodium falciparum
Si les traitements du paludisme ciblent les formes asexuées du parasite, responsable des symptômes, les formes sexuées, responsables de la propagation de celui-ci de l'Homme au moustique, ont longtemps été laissées de côté. L'équipe de Catherine Lavazec, à l'Institut Cochin (Inserm U1016/CNRS UMR8104/université Paris Descartes) a eu l'idée de s'y intéresser. Elle a ainsi montré que c’était la voie de signalisation de l'AMPc qui régulait la déformabilité du globule rouge parasité ; et qu'interférer avec cette voie de signalisation augmentait la rigidité des cellules infectées (1).
Dans une nouvelle étude, parue en juin 2016 dans « Blood » (2), l'équipe de Catherine Lavazec a précisé le fonctionnement de cette interférence. Les protéines parasitaires STEVOR (SubTElomeric Variable Open Reading frame), en interagissant au niveau de la membrane du globule rouge infecté avec un complexe de protéines humaines appelé ankyrine, augmentent la rigidité de cette membrane, et donc leur probable élimination par la rate. Ceci est provoqué par la protéine kinase A (activée par l'AMPc) qui phosphoryle les protéines STEVOR. Pour que le globule rouge reste déformable, le parasite exprime de la phosphodiestérase dégradant l'AMPc. Or le sildénafil inhibe la phosphodiestérase.
L'équipe de Catherine Lavazec cherche maintenant un IPDE autre que le Viagra, plus spécifique de la phosphodiestérase que produit le parasite du paludisme, pour mettre en place un essai clinique chez l'Homme et démontrer ainsi la preuve de concept de cette stratégie.
1) Ramdani G, Naissant B, Thompson E, Breil F, Lorthiois A, Dupuy F, et al. (2015) cAMP-Signalling Regulates Gametocyte-Infected Erythrocyte Deformability Required for Malaria Parasite Transmission. PLoS Pathog 11(5): e1004815. doi : 10.1371/journal.ppat.1004815
2) Plasmodium falciparum STEVOR phosphorylation regulates host erythrocyte deformability enabling malaria parasite transmission. Blood. 2016 Jun 16 ; 127(24):e42-53. doi : 10.1182/blood-2016-01-690776. Epub 2016 May 2.
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