IL EST RECONNU de longue date que la prévalence du cancer est bien plus faible que ce l’on attendrait sur la base du taux de mutations de l’ADN. Des mécanismes naturels doivent donc exister pour contenir, supprimer ou éliminer les cellules cancéreuses dans l’organisme. Pourquoi donc ne pas exploiter ces défenses naturelles ?
Dans une précédente étude, Furuta et coll. avaient montré que les cellules épithéliales mammaires en phase de différenciation dans un système de culture tridimensionnel (gel de matrice extracellulaire 3D) sécrètent des facteurs qui sont capables de faire rétrocéder le phénotype malin des cellules cancéreuses du sein (Proc Natl Acad Sci USA, 2005). Dans une étude publiée par « Science Translational Medicine », l’équipe montre maintenant que ces facteurs sécrétés pouvaient être divisés en une fraction insoluble capable de faire rétrocéder le phénotype malin, et en une fraction soluble possédant une activité cytotoxique vis-à-vis des cellules cancéreuses du sein.
En analysant la fraction soluble sécrétée par les cellules épithéliales normales du sein qui se différenciaient dans un gel tridimensionnel, les chercheurs ont identifié six facteurs détruisant ou supprimant la croissance des cellules cancéreuses du sein. Ces facteurs incluent des protéines antiangiogéniques (ATIII et VBP), des cytokines pro-inflammatoires (IL1F7 et IL25) et des protéines de croissance et de différenciation (FGF11 et BMP10).
Parmi ces facteurs, l’interleukine25 (IL25) exerce l’activité cytotoxique la plus puissante envers les cellules cancéreuses du sein, tandis que les autres facteurs présentent une activité cytostatique.
Les chercheurs montrent que l’IL25 est temporairement sécrétée dans les glandes mammaires en développement. Cette cytokine provoque la mort par apoptose des cellules cancéreuses mammaires, ce qui a été montré in vitro et in vivo chez la souris ; cela, sans affecter les cellules normales du sein.
Cette activité apoptotique de l’IL25 est en effet médiée par le récepteur de l’IL25 (IL25R) qui s’avère être exprimé uniquement sur les cellules cancéreuses mammaires, dans 20 % des cancers du sein (13 sur 69 échantillons), mais pas sur les cellules normales du sein. De plus, l’expression de l’IL25R sur les cellules tumorales du sein est corrélée à un mauvais pronostic.
L’action de l’IL25 sur le récepteur IL25R à la surface des cellules mammaires cancéreuses active l’apoptose médiée par la caspase.
Comme l’explique au « Quotidien » le Dr Irene Kuhn (Lawrence Berkeley National Laboratory, Californie), cette découverte n’a pu être possible que grâce à l’utilisation d’un modèle de culture 3D développé par le Dr Mina Bissell.
Cette découverte ouvre la voie au développement de thérapies ciblant la voie de signal IL25-IL25R, telles que des peptidomimétiques IL25 ou des anticorps anti-IL25R, avec la perspective que ces thérapies détruisent uniquement les cellules cancéreuses exprimant l’IL25R sans affecter les cellules normales. Les effets secondaires de ces traitements devraient donc être minimes.
« Si une compagnie était intéressée, le développement de ces traitements pourrait prendre deux ans avant de pouvoir débuter l’évaluation clinique », estime le Dr Kuhn.
« Notre prochain objectif est de poursuivre nos travaux afin d’identifier des agents capables d’induire une quiescence des cellules tumorales ou ce que nous appelons “réversion tumorale??, laisse entrevoir le Dr?Kuhn. Des années de recherche dans le laboratoire du Dr Bissell ont permis de découvrir et de caractériser de multiples façons dont les cellules malignes peuvent être amenées à ne plus proliférer, ou à entrer dans un stade dormant, ou encore à réacquérir de nombreuses traits du tissu mammaire normal. »
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques