L’ÉJACULATION précoce est surtout connue pour être un problème d’éjaculation trop rapide, permanent ou récurrent, mais ce trouble se caractérise également par une notion d’absence de contrôle et par un retentissement psychologique impactant sur la qualité de vie de l’homme et sur celle de sa partenaire. La demande de prise en charge est très forte, mais seulement 9 % des hommes souffrant d’EP consultent. « L’EP est un mécanisme complexe, principalement neurobiologique, mais les connaissances ont beaucoup progressé ces dix dernières années dans la physiologie et la pharmacologie », annonce le Pr François Giuliano, neuro-uro-andrologue à l’hôpital Raymond Poincaré (Garches).
L’éjaculation est contrôlée par le système nerveux et la neurophysiologie est aujourd’hui mieux comprise. Au niveau de la moelle épinière, le générateur spinal d’éjaculation est un régulateur qui se déclenche en réponse à des stimulations périphériques et provoque l’éjaculation. Il est lui-même sous la dépendance du cerveau qui reçoit les stimuli issus du pénis et répond au centre spinal via des neurotransmetteurs qui vont moduler le réflexe éjaculatoire. Le contrôle exercé par le cerveau fait intervenir la dopamine et l’ocytocine qui ont un rôle activateur (éjaculation accélérée), ou la sérotonine qui joue un rôle inhibiteur (éjaculation retardée). « La sérotononie est considérée comme le neurotransmetteur clé : en modifiant le taux libéré dans le cerveau on peut retarder ou accélérer l’éjaculation, explique le spécialiste. Il existe dans l’organisme un mécanisme d’autorégulation assuré par les transporteurs de la sérotonine qui évitent son accumulation dans la fente synaptique en la recapturant. Ces transporteurs sont la cible d’inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) qui les bloquent. De ce fait, la sérotonine va rester plus longtemps dans la fente synaptique, ce qui retardera le délai avant éjaculation. »
Une demi-vie courte sans effet antidépresseur.
Actuellement, les solutions pharmacologiques disponibles sont hors AMM, qu’il s’agisse de crèmes anesthésiantes (Emla) appliquées sur le gland, ou des antidépresseurs ISRS (paroxétine, sertraline fluoxétine…) utilisés en traitement chronique. Certes, ces ISRS allongent le délai avant éjaculation, mais ils ont des effets indésirables importants tels qu’une pharmacodépendance, un syndrome de sevrage, ou encore des troubles sexuels comme la dysfonction érectile ou une baisse de la libido, ce qui n’est l’idéal quand on souffre d’EP… « La dapoxétine (Priligy) est un puissant ISRS mais son profil pharmacocinétique est particulier et la différencie de ses homologues de classe, se félicite le Pr Giuliano. L’absorption de la dapoxétine est très rapide, la concentration plasmatique maximale est atteinte entre une et deux heures après l’administration orale, et la demi-vie d’élimination est très courte (1 h 30). De plus, Priligy ne s’accumule pas dans l’organisme et il est adapté à une prise à la demande. Cette pharmacocinétique ne lui confère aucun effet antidépresseur ni aucun des effets indésirables liés à cette classe. » Son efficacité a été démontrée au travers d’un vaste programme de développement clinique qui a impliqué plus de 6 000 sujets dans cinq essais en double aveugle, contrôlés versus placebo, où le critère principal était le temps de latence éjaculatoire intravaginal (IELT). Il comportait également des critères secondaires appréciant l’impact physiologique, la satisfaction du patient et la tolérance. Les résultats montrent que le médicament, quel que soit le dosage, allonge significativement le délai de l’éjaculation et le multiplie par trois ou quatre. De plus, il améliore le contrôle de l’éjaculation, le score global de satisfaction des patients, et la qualité des relations sexuelles au sein du couple. La tolérance s’est révélée bonne avec quelques effets secondaires légers à modérés à type de nausées, céphalées, vertiges, diarrhées, fatigue. Des événements plus rares, comme une hypotension orthostatique ou une syncope vasovagale, nécessitent la réalisation d’un test orthostatique avant l’instauration du traitement, et quelques précautions de la part du patient.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques