« Nous vivons tous en symbiose avec des micro-organismes, bactéries, champignons, levures et virus, qui sont aussi nombreux que les cellules de notre propre organisme », explique d’emblée Joël Doré (Directeur de recherches à l’INRA), qui se consacre entièrement à l’étude du microbiote depuis plus de 30 ans. Avant de poursuivre que nous sommes porteurs chacun, en moyenne, de 600 000 gènes bactériens, avec de grandes différences d’un individu à l’autre… à comparer aux 23 000 gènes humains.
Microbiote intestinal superstar
D’importantes avancées concernent le microbiote intestinal et ses relations aux états de santé. Si la notion de dysbiose (qui correspond non seulement aux altérations du microbiote, mais aussi des relations entre le microbiote et l’hôte) remonte à environ 25 ans, ce n’est que récemment qu’il a été possible de documenter l’existence de « signatures ». Ces dernières sont riches de potentiels développements en matière de diagnostics, pronostics et même de thérapeutiques, dans de nombreux types de pathologies chroniques, parmi lesquelles le diabète de type 2, l’obésité, des maladies hépatiques, la maladie d’Alzheimer, la dépression, certains cancers, des maladies neurologiques ou neurodégénératives. De fait, après la naissance, l’être humain va construire son immunité en même temps que se développe son microbiote, notamment intestinal. Le point clé est que s’établit progressivement une symbiose unique, au sens où le microbiote est reconnu comme une composante du soi par le système immunitaire.
Pour autant, des dérèglements au niveau écologique du microbiote intestinal peuvent s’accompagner d’une perte de la fonction de barrière, susceptible de s’accompagner d’un état inflammatoire a minima, d’une rupture de la tolérance humanitaire, associée à un risque d’apparition d’une maladie auto-immune. Or, l’espérance de vie, qui semble atteindre un plateau dans les pays avancés, pourrait subir une diminution dans les années qui viennent en lien avec une augmentation de l’incidence des maladies chroniques, elles-mêmes en étroite relation avec les modifications de notre mode de vie ces cinquante dernières années. Modifications (mode de naissance, nutrition, expositions aux xénobiotiques…) qui impactent le microbiote intestinal et ses relations avec son hôte.
Vers le microbiote médicament
Les choses évoluent rapidement et tout indique qu’il existe de forts potentiels tant en matière de prévention que de thérapie, appuyés sur les progrès réalisés dans la puissance d’analyse actuelle du microbiote et la reconnaissance de la signature d’acteurs microbiens pertinents. L’équipe de Joël Doré a d’ailleurs montré, dans un modèle de dépression chez la souris, qu’une modification du microbiote intestinal était aussi efficace que la clomipramine, un antidépresseur de référence.
Dans un autre ordre d’idée, des essais cliniques ont fait la démonstration de la possibilité d’une reconstruction de l’homéostasie immunitaire grâce à la transplantation autologue de microbiote intestinal chez des patients souffrant de leucémie myéloïde chronique après une chimiothérapie de consolidation. Un nouveau paradigme est donc en train de prendre son essor, qui pourrait concerner de multiples domaines et représenter dans les proches années qui viennent autant d’avancées très importantes.
D'après la séance du 15 mai à l'Académie nationale de pharmacie
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