Octroyée en mars 2014, la RTU du baclofène a du mal à recruter des patients. En effet, au total, seulement 6 130 patients en bénéficiaient (données actualisées au 8 septembre 2015), soit 6 % des personnes utilisant cette molécule en traitement de l’alcoolodépendance. Pour les 94 % restants (environ 100 000 patients selon les estimations de la CNAM), il s’agirait de prescriptions hors AMM. « L’ANSM, qui ne peut que constater ces insuffisances de recrutement, a décidé de revoir et de simplifier cette RTU », indique Dominique Martin, directeur de l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé). La nouvelle mouture est attendue début 2016.
Trop chronophage
Mais avant tout chose, il a fallu identifier les freins aux inclusions. Pour le Pr Philippe Jaury (médecin à Paris et responsable de l’étude Bacloville), plusieurs raisons viennent étayer le manque de candidats. « Tout d’abord, l’inclusion et le suivi des patients se font via un portail électronique (www.rtubaclofène.org). Or les médecins sont vite découragés par la somme d’informations qu’il faut remplir sur cette plateforme, pour chaque patient et à chaque consultation », expose-t-il.
Autre frein : les contre-indications à la RTU sont nombreuses, menant à l’exclusion pure et simple d’un grand nombre de patients qui pourraient pourtant être concernés par cette prescription : « on ne peut pas l’associer avec d’autres médicaments de l’alcoolodépendance, on ne peut pas le prescrire en cas de certaines comorbidités psychiatriques dont souffrent souvent nos patients, ni en cas d’insuffisance hépatique, alors que plusieurs études montrent que la fonction hépatique est améliorée chez les personnes sous baclofène étant donné leur baisse de consommation d’alcool. Pas de RTU non plus chez les femmes enceintes (est-ce mieux qu’elles boivent de l’alcool ?), ni chez les personnes sans domicile fixe, chez les personnes conduisant des véhicules… », énumère Philippe Jaury.
Enfin, le fait qu’il faille demander un second avis d’un expert médical pour augmenter les doses au-delà de 120 mg, puis au-delà de 180 mg rebute plus d’un primo-prescripteur. « En effet, pourquoi demander un second avis, et à qui, lorsque l’on est soi-même prescripteur confirmé ? », s’étonne le médecin parisien.
L’ANSM a identifié ces problèmes de longue date. « En mars dernier, lors des journées de la Société française d’alcoologie, nous avions déjà annoncé notre volonté de réviser la RTU, rappelle Philippe Vella (directeur de la Direction des médicaments en neurologie à l’ANSM). Nous sommes en cours de recrutement d’un groupe d’experts indépendants afin de la faire évoluer et de proposer une RTU plus adaptée au début de l’année 2016. »
Afin de stimuler le recrutement, « l’ANSM compte tout d’abord simplifier le traitement informatique des données pour que ce travail soit moins chronophage pour les médecins, déclare Philippe Vella. D’autre part, l’agence va réviser certains critères de la RTU, notamment l’obligation d’avoir un deuxième avis pour pouvoir dépasser les doses de 120 et 180 mg. Les contre-indications feront elles aussi l’objet d’un examen, sans pour autant certifier que nous les amenderons ».
Cette volonté de simplification a pour objectif d’inclure plus de patients qu’actuellement. En effet, La mission d’une RTU est double : elle offre une possibilité de prescription encadrée hors AMM, et permet d’améliorer les connaissances sur un médicament dans une indication donnée, en vue d’un octroi d’AMM. Si le nombre d’inclus est trop faible, il sera alors difficile de tirer des conclusions.
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