Pendant plusieurs décennies, le traitement de la leucémie lymphoïde chronique (LLC) a reposé sur la chimiothérapie par des médicaments cytotoxiques avec ajout d’anticorps monoclonaux anti-CD20. Le développement des thérapies ciblées a transformé l’approche thérapeutique de cette hémopathie. Il a été rendu possible grâce à l’identification de mécanismes cellulaires conduisant à la prolifération et la survie des cellules leucémiques. Parmi ceux-ci, la voie des protéines de la famille BCL2 (B-cell lymphoma 2), molécules qui protègent contre l’apoptose ou la mort programmée des cellules. Ce qui a conduit au développement du vénétoclax, puissant inhibiteur sélectif de la protéine anti-apoptotique BCL2.
L’efficacité de cet inhibiteur dans la LLC en rechute ou réfractaire a été évaluée à travers un certain nombre d’essais cliniques. Lors des journées « Décisions hématologie » organisées par Abbvie, le Pr Stephan Stilgenbauer (Ulm, Allemagne) et la Pr Véronique Leblond (La Pitié-Salpêtrière, Paris) ont présenté et commenté les résultats de ces études. Ils ont fait état des bénéfices cliniques du vénétoclax, administré seul, sur la survie sans progression chez les patients en rechute après échec d’un traitement par un inhibiteur du BCR. C’est sur cette indication que le vénétoclax en monothérapie (1) a reçu son AMM. Ils ont insisté sur l’étude randomisée Murano (phase 3) qui a montré que la survie sans progression était supérieure chez les patients traités par l’association vénétoclax/rituximab par rapport à ceux recevant le traitement standard (bendamuxine/rituximab) pendant la durée du traitement (2 ans). Un avantage qui se maintient au moins pendant 1 an après l’arrêt du vénétoclax.
« Un des intérêts de cette molécule, a précisé le Pr Gilles Salles (service d’hématologie, CHU Lyon), est qu’elle permette à un nombre important de patients de voir disparaître la maladie. Celle-ci devient indétectable d’où la notion clé de maladie résiduelle qui n’est plus détectable. Ce phénomène nouveau des thérapies ciblées dans les cancers permet d’envisager des périodes d’interruption du médicament ». Un intérêt également financier si l’on considère le coût des traitements.
« Si des progrès importants ont été réalisés en termes d’accès au traitement face à l’accélération phénoménale de l’innovation thérapeutique, il reste encore beaucoup à faire pour permettre aux patients de disposer plus rapidement de ces molécules innovantes, seules ou en association », a souligné le Pr Salles. Espérons que l’association vénétoclax – rituximab qui a reçu son AMM européenne récemment pourra être accessible en France dans un délai raisonnable.
Les défis de l'ambulatoire
En oncologie et plus particulièrement en oncohématologie, l’accompagnement du patient à l’hôpital et en ville pour l’adhésion à ces traitements innovants, désormais administrés par voie orale, représente un enjeu de plus en plus important.
« La vraie difficulté, a commenté la Dr Béatrice Clairaz-Mahiou (pharmacienne d’officine à Châtenay-Malabry, et coprésidente de l’Européenne de pharmacie clinique officinale [EPCO]) est d’arriver à faire le lien entre les différents acteurs qui interviennent autour du patient. La vraie révolution est donc surtout d’ordre organisationnel ». Pour répondre à ces nouveaux défis de l’ambulatoire, des programmes et outils ont été discutés lors de ces rencontres en hématologie, comme les « cellules prescriptrices » associant un certain nombre de professionnels de santé hospitaliers, les plateformes reliant hôpital et ville (pharmacien d’officine, médecin généraliste, infirmière libérale), le dossier médical partagé, les messageries ou autres instruments digitaux sécurisés et les programmes éducationnels pour les patients. « Il faut construire en France des modèles, des organisations qui nous permettent d’accompagner ces patients dans ces traitements innovants efficaces qui se prennent souvent au long cours », a conclu le Pr Gilles Salles.
Décisions Hématologie, Laboratoires AbbVie, 24 - 25 Janvier 2019, Palais des Congres, Antibes-Juan Les Pins.
(1) Indication du vénétoclax en monothérapie : traitement de la LLC chez les patients adultes inéligibles ou en échec à un inhibiteur du récepteur antigénique des cellules B (BCRi) ou en échec à la fois à une chimio-immunothérapie et à un inhibiteur du récepteur antigénique des cellules B.
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