Une alternative mini-invasive à la surveillance active

La photothérapie dynamique dans le cancer de la prostate à bas risque

Publié le 20/06/2011
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Lancé en mai dernier en Europe, un essai randomisé de phase III évalue la photothérapie dynamique dans les cancers de la prostate à bas risque. Le service pionnier du Pr Abdel-Rahmene Azzouzi du CHU d’Angers est chargé de la coordination des 13 centres français. Outre le faible risque de troubles urinaires et érectiles, cette technique mini-invasive présente l’énorme atout d’être facile à réaliser en pratique courante.
Le service du Pr Azzouzi coordonne les 13 centres français

Le service du Pr Azzouzi coordonne les 13 centres français
Crédit photo : DR

La lumière est diminuée pour éviter tout risque de photosensibilité cutanée

La lumière est diminuée pour éviter tout risque de photosensibilité cutanée
Crédit photo : CHU Angers

« EN RÉACTION au surtraitement des cancers de la prostate, le mouvement de balancier a fait émerger le concept de surveillance active, explique au “Quotidien” le Pr Abdel-Rahmene Azzouzi, chef du service d’urologie au CHU d’Angers, promoteur de la photothérapie dynamique (PTD) dans le cancer de la prostate dès les débuts et coordonnateur des 13 centres français du premier essai de phase III lancé fin mai en Europe. Entre ces deux attitudes opposées pour les cancers à bas risque, la technique mini-invasive de la PTD est une voie médiane très intéressante. L’efficacité est comparable à la radiothérapie et à la curiethérapie, pour très peu d’effets secondaires et une durée d’hospitalisation plus courte, de 24 à 48 heures. » La PTD n’expose qu’à des troubles urinaires transitoires pendant 2 ou 3 semaines postopératoires avec un gain ultérieur par rapport à la situation initiale. Les troubles érectiles surviennent dans moins de 15 % des cas, le plus souvent chez des sujets ayant des symptômes préexistants. Et, en cas d’échec, il est possible de renouveler le traitement ou de s’orienter vers l’un des traitements habituels, chirurgie avec ablation complète, radiothérapie ou curiethérapie.

Des conclusions en 2014.

L’essai randomisé prévoit d’inclure 400 patients ayant un cancer de la prostate à bas risque, auprès des

45 centres participants à travers l’Europe. « La définition du bas risque retenu dans l’étude empiète un peu sur le risque modéré, précise le Pr Azzouzi. Il s’agit des tumeurs répondant aux critères suivants : PSA ‹ 10, score de Gleason ≤ 6 et 3 biopsies positives au maximum avec un envahissement ‹ 5 mm. Or, en France, la surveillance active s’adresse à des cancers avec 2 biopsies positives et un envahissement ≤ 3 mm. » L’étude a pour objectif de comparer la PTD et la surveillance active, consistant en un PSA tous les 3 mois et des biopsies prostatiques tous les 12 à 18 mois. La phase d’inclusion devrait être terminée d’ici à deux ans pour des résultats à l’été 2014. Un essai de phase III comparable devrait débuter sous peu aux États-Unis.

Une technique « démocratique?».

Pour le Pr Azzouzi, le débat opposant l’AFSSAPS et l’Association française d’urologie (AFU) sur l’intérêt du dépistage n’a pas lieu d’être. « La question n’est pas celle du dépistage, mais bien celle de la stratégie proposée. Les patients ont le droit de savoir s’ils ont un cancer. En revanche, il existe une nette tendance à

surtraiter en France, avec quatre fois plus d’interventions qu’en Grande- Bretagne, par exemple. Il n’est pas légitime de proposer des traitements radicaux, qui sont à réserver en cas de risque modéré à élevé. Une fois le doigt mis dans l’engrenage, patients et thérapeutes ne sont pas prêts à ne rien faire et à se contenter de la surveillance active. D’où l’intérêt d’ajouter la PTD très peu invasive au panel d’options possibles. »

La PTD présente d’énormes atouts techniques : facile à apprendre, facile à reproduire et... facile à mettre en place. Nul besoin d’équipement spécifique, le matériel nécessaire est le même que la curiethérapie. « La technique est très démocratique, souligne l’urologue. Rien à voir avec le côté élitiste de la cœlioscopie à ses débuts, où des chirurgiens classiques pourtant très expérimentés suaient sang et eau pendant des heures et pour des résultats très inégaux. Là, la technique est simple et n’importe quel urologue peut acquérir la technique après de 5 à 10 patients et être aussi performant qu’un professeur de renom pour une qualité de soins identique. »

Ces avantages de poids permettront sans doute de faire face à l’explosion des cancers à bas risque, dont le nombre a doublé entre 1990 et 2006. « Les cancers peu agressifs représentent aujourd’hui près de 75 % de l’ensemble des cancers, fait remarquer le Pr Azzouzi. Sans compter que la PTD devrait bénéficier dans un avenir proche des avancées de l’imagerie médicale. Les radiologues nous assurent qu’il sera bientôt possible de visualiser la tumeur à l’IRM, poursuit le Pr Azzouzi. Le cancer de la prostate ne sera plus “l’ennemi invisible” et un traitement très focal pourra alors être envisagé. »

› Dr IRÈNE DROGOU

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2846