La morphine est recommandée depuis plus de 20 ans dans les syndromes coronaires aigus (SCA). Néanmoins la douleur reste insuffisamment prise en charge aux urgences. Dans le registre RESCA+31 à Toulouse, la douleur dans les SCA n’était pas évaluée chez près d’un tiers des patients (30 %). Et malgré une douleur moyenne autour de 7 dans l’échelle EVA (7/10), un patient sur deux ne recevait pas d’antalgique. Rebelote dans le registre FAST MI puisqu’en 2010 parmi les patients en SCA ST+ présentant une douleur supérieure à 7, un grand nombre ne recevaient pas de morphine. « Il faut donc continuer à plaider pour un recours aux antalgiques dans les SCA dès que la douleur dépasse 6/10 à l’EVA même si la morphine n’est peut-être pas le traitement le plus approprié », selon Sandrine Charpentier.
Bénéfice risque et interférence avec les antiagrégants
On manque d’études avec un bon niveau de preuve sur le bénéfice de la morphine dans le SCA. Ne pas traiter la douleur au bloc opératoire augmente le risque de complications cardiovasculaires. Mais il s’agit de preuves indirectes. Et l’observation dans le registre CRUSADE d’un excès de morbimortalité chez les patients en SCA ST- traités par morphine est venue poser la question du bénéfice risque de la morphine dans cette indication. Biais ou réel effet délétère ?
En 2014, l’analyse de l’étude ATLANTIC testant le ticagrelor en préhospitalier versus à l’arrivée aux urgences, met en évidence que son activité antiagrégante est réduite chez les sujets sous morphine. « Cette interaction morphine/antiagrégant résulte d’une réduction de leur absorption intestinale sous morphine. Elle a été retrouvée dans les études pharmacologiques pour tous les antiagrégants oraux (clopidogrel, prasugrel, ticagrelor). Toutefois les études d’intervention n’ont pas permis de mettre en évidence un impact sur la morbimortalité. Et l’analyse récente des registres FAST MI 2005 et 2010 tend à prouver que le recours à la morphine ne majore pas les complications cardiovasculaires (1). La question reste donc ouverte », explique Sandrine Charpentier. Pour éclairer le débat, un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) national comparant morphine versus protoxyde d’azote dans l’analgésie des SCA a été lancé en 2014 avec la société française de cardiologie (SFC) et la société française de médecine d’urgence (SFMU). Les résultats de cette étude SCADOL sont attendus cet été. « En attendant, l’analgésie ne se discute pas en particulier dans les SCAST + et repose toujours sur la morphine. SCADOL dira si le protoxyde d’azote est une alternative intéressante », conclut la Pr Charpentier.
D’après un entretien avec le Pr Sandrine Charpentier (CHU de Toulouse) (1) Puymirat E et al. Correlates of pre-hospital morphine use in ST-elevation myocardial infarction patients and its association with in-hospital outcomes and long-term mortality: the FAST-MI (French Registry of Acute ST-elevation and non-ST-elevation Myocardial Infarction) programme. Eur Heart J 2016;37:1063-71.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques