LES SAGES-FEMMES auraient voulu aller plus loin, mais l’avancée est de taille. L’arrêté du 12 octobre dernier élargit leur droit de prescription, principalement dans cinq familles thérapeutiques : antibiotiques, homéopathie, AINS, antisécrétoires gastriques et contraceptifs. « Ce qui a été novateur c’est la façon dont la liste a été modifiée », souligne Marianne Benoit Truongh Canh, conseillère nationale de l’Ordre des sages-femmes (CNOSF). Le contexte Mediator a en effet entraîné un travail accru de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). « Nous avons pu travailler avec les différentes commissions de l’Agence pour prouver le bien-fondé de la thérapeutique pour les patients. Il n’y a plus une seule personne à l’AFSSAPS qui ne connaît pas le droit de prescription des sages-femmes », sourit la conseillère nationale. Cette nouvelle liste change véritablement la façon dont les sages-femmes travaillent. Elles reconnaissent d’ailleurs qu’elles avaient jusqu’alors des pratiques hors cadre.
Effets secondaires.
« L’antibiothérapie dans la prévention des infections pendant le travail chez la parturiente est dans notre pratique depuis plus de vingt ans mais, maintenant, c’est officiel ! » Le droit de prescrire de l’homéopathie, une demande forte des patientes, est aussi une avancée majeure. « Pour les petits maux, cela évite les effets secondaires de médicaments allopathiques. Il existe quelques études sur l’utilité de l’homéopathie pendant la grossesse et le post-partum. Jusqu’alors, les sages-femmes notaient les références sur papier libre et les patientes ne pouvaient être remboursées. »
Les AINS doivent être prescrits en deuxième intention car ils ne sont pas dénués d’effets secondaires, mais ils peuvent être « très utiles dans le traitement des très grosses douleurs post-épisiotomie et les dysménorrhées très fortes ». Les antisécrétoires gastriques sont également très demandés pour lutter contre les remontées acides, courantes pendant la grossesse. Enfin, les sages-femmes peuvent prescrire tout type de contraceptif (et poser un stérilet). Ce droit de prescription est déjà inscrit dans la loi mais le CNOSF a jugé utile de le rappeler dans la liste, « pour que tous les professionnels de santé, et notamment les pharmaciens, trouvent dans un seul document tout ce qu’on peut prescrire ».
Bonne élève.
Il faut ajouter que l’arrêté a aussi mis à jour les vaccins qui peuvent être prescrits en maïeutique, ainsi que les dérivés nitrés, qui représentent « un pan microscopique de notre compétence mais sont essentiels pour répondre à l’urgence spécifique de contractions très violentes de l’utérus. C’est un geste pour sauver l’enfant en attendant l’arrivée du médecin ».
Satisfaites de ces avancées majeures, les sages-femmes réclament néanmoins que leur droit de prescription ne soit plus lié à une liste positive et s’étende, comme pour les chirurgiens-dentistes, à l’ensemble des médicaments « nécessaires à l’exercice de leur art ». Car chaque modification est soumise à un long processus qui entraîne souvent un décalage entre « les avancées de la science, l’évolution des pratiques et les médicaments que les sages-femmes sont habilitées à prescrire ». Ces modifications sont importantes, non seulement pour la prise en charge des patientes et des nouveau-nés, mais aussi pour améliorer les performances de la France dans la santé des femmes. « On compte 220 000 interruptions volontaires de grossesse par an, une femme sur cinq n’a pas de suivi gynécologique régulier, une femme sur cinq n’a pas réalisé de frottis depuis plus de 5 ans, voire n’en a jamais réalisé du tout, les maladies sexuellement transmissibles sont en augmentation », énumère Marie-Josée Keller, présidente du CNOSF. « La France n’est pas une bonne élève et les sages-femmes doivent devenir un acteur incontournable dans les politiques d’amélioration de la santé des femmes. »
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