En cancérologie, lors des essais cliniques de phase I qui permettent de définir le profil de toxicité du médicament, les spécialités ne sont pas testées sur des personnes saines (contrairement à la plupart des médicaments) mais uniquement chez des patients atteints de cancers, étant donné les effets secondaires importants que peut provoquer ce type de traitement.
Or ces personnes malades peuvent présenter, au cours de ces essais cliniques, des symptômes ou anomalies. Mais ceux-ci sont-ils liés au médicament ? Sont-ils dus à la maladie elle-même ? Font-ils suite à la prise d’autres médicaments pris en parallèle, pour soulager les douleurs par exemple ? Difficile de trancher sur cette délicate question pourtant primordiale, car c'est en déterminant la dose toxique de médicament qu'on définit les doses de médicament recommandées. Toute erreur d'imputabilité peut donc être à l'origine d'une sous-évaluation ou d'une surévaluation des doses de traitement recommandées.
Le Pr Christophe Le Tourneau, responsable du département d'essais cliniques précoces (D3i) à l’Institut Curie, a souhaité savoir dans quelle mesure des erreurs d'imputabilité, c’est-à-dire des effets indésirables octroyés à tort au médicament testé, étaient réalisées. Pour cela, il a repris avec son équipe tous les essais de cancérologie qui ont comparé un nouveau médicament avec un placebo seul (ce qui est éthiquement acceptable s'il n'existe plus d'alternative chez ces patients).
Étude de placebos
L’équipe a ainsi identifié 51 essais de phase I. Les chercheurs ont ensuite relevé les toxicités rapportées dans les publications dans les deux bras de traitement (médicament et placebo). Dans ces essais, ni le patient, ni le médecin ne savaient si le patient recevait le médicament actif ou le placebo.
Ainsi, évaluer les toxicités rapportées dans le bras placebo a permis d'évaluer les erreurs d'imputabilité, puisqu’en théorie les placebos ne sont pas toxiques. Au final, ils ont conclu que toutes les toxicités sont surévaluées : de près de 30 % pour les toxicités graves, et de 65 % pour les toxicités peu graves. Les résultats de l’étude ont été publiés dans le « New England Journal of Medicine » du 8 mai.
Pour Christophe Le Tourneau, ces résultats signifient que « les doses recommandées des médicaments sont très probablement souvent sous-estimées, ce qui peut conduire à commercialiser des médicaments à des doses trop faibles et donc potentiellement moins efficaces ».
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