Plaies et cicatrisation

Des recommandations pour faire face aux infections

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Publié le 01/03/2018
Très hétérogènes, les infections des plaies sont de classification encore débattue, et leur prise en charge n’est pas bien codifiée.

La Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf) et la Société française de dermatologie (SFD) se sont associées pour mettre à jour les recommendations concernant les plaies infectées. Elles seront publiées prochainement.

« Ni l’antibiothérapie préventive ni l’antibiothérapie locale n’ont leur place dans les plaies, et les indications des prélèvements bactériologiques sont limitées, prévient le Pr Le Moing (infectiologue, CHU de Montpellier). Les prélèvements, réalisés soit par ponction d’un abcès soit éventuellement par écouvillonnage après parage, désinfection et rinçage de la plaie, peuvent être utiles dans certaines infections purulentes, mais leur interprétation est délicate. » Bien sûr, des hémocultures sont réalisées en cas de sepsis, ainsi qu’un prélèvement profond en cas d’ostéite.

Le risque d’infection aux bactéries à Gram négatif doit être pris en compte dans les formes graves et lorsque la plaie se situe à proximité du petit bassin. Pour les plaies d’évolution chronique, ou récemment traitées par antibiothérapie (risque majeur de P. aeruginosa), ou exposées à l’eau de piscine, de rivière, etc., il faut prendre en compte la présence éventuelle d’anaérobies.

Limiter l’antibiothérapie

« On ne traite pas des colonisations bactériennes mais des infections, ce qui signifie qu’on ne traite qu’en cas de symptômes infectieux », avertit le Pr Le Moing.
La Spilf a tranché en faveur d’une durée d’antibiothérapie le plus courte possible, sept jours pour les infections de la peau et des tissus mous, de quatre à six semaines pour les ostéites, ce qui repose plus sur le souhait de réduire l’antibiothérapie que sur de fortes preuves.

En cas de première infection d’une plaie récente (moins de 6 mois), l’antibiothérapie probabiliste repose sur l’association amoxicilline-acide clavulanique. On ajoute de la clindamycine dans les formes graves. Si l’on suspecte un Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (Sarm, chez des patients hospitalisés en long séjour par exemple), la linézolide est bien validée. En cas de pollution hydrique, on ajoute la ciprofloxacine, pour prendre en charge le Pseudomonas.

« Il n’y a pas de place pour les carbapénèmes en antibiothérapie probabiliste, sauf en cas de choc septique ou de colonisation connue à des bactéries produisant des beta-lactamases à spectre élargi (BLSE), il faut épargner ces molécules », insiste le Pr Le Moing. Si le traitement probabiliste est urgent (dermohypodermite, sepsis…), il est indispensable de faire les prélèvements après une fenêtre thérapeutique.

Localisations

Dans les plaies pelviennes, on prescrit une association pipéracilline-tazobactam ; dans celles d’évolution chronique, céphalosporines de troisième génération + linézolide + métronidazole pour prendre en compte Sarm et anaérobies, et, en cas d’antibiothérapie récente, pipéracilline-tazobactam + linézolide, visant le pyocyanique. Dans les ostéites, les antibiotiques ne sont guère discutés pour les diabétiques, même si le Pr J. L. Lázaro Martínez (Madrid) estime que « le débridement chirurgical constitue le meilleur antibiotique ».

Dans les autres indications, on a peu d’arguments quant à l’intérêt d’une antibiothérapie ou quant à la supériorité de l’une sur l’autre. Il faut disposer d’au moins trois prélèvements de qualité, traiter les pathogènes certains (S. aureus, streptocoque A, entérobactéries), et ne pas tenir compte des autres agents, qui peuvent être uniquement des contaminants, sauf s’ils sont présents sur plusieurs prélèvements.

 

D’après l’intervention du Pr Vincent Le  Moing, (Montpellier) aux journées cicatrisation 2018.

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3415