Une recherche sur la flore digestive

Des bactéries protégeraient des maladies auto-immunes

Publié le 24/01/2013
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Une étude montre pour la première fois une différence dans la composition de la flore digestive entre hommes et femmes, et que la flore masculine influe sur la sécrétion de testostérone. Ces particularités semblent expliquer pourquoi des maladies auto-immunes (lupus, SEP, polyarthrite, diabète) sont plus fréquentes chez les femmes.

Pour les auteurs, cette étude ouvre une nouvelle aire de recherche sur l’exploration du potentiel clinique de la flore digestive. « Nos observations suggèrent des stratégies potentielles pour l’usage de bactéries digestives normales, pour bloquer la progression de diabète insulino-dépendant chez des enfants qui présentent un risque génétique élevé », indique l’auteur principal, Jayne Danska (hôpital des enfants malades, Toronto).

L’exposition aux microbes et aux hormones sexuelles exerce un effet manifeste sur le développement des maladies auto-immunes. Chez les souris NOD1 (Non-Obese Diabetic), génétiquement prédisposées à présenter un diabète de type 1, et qui représentent un modèle de maladie auto-immune, 85 % des femelles vont développer la maladie. Lorsque ces femelles à haut risque de diabète auto-immun sont colonisées avec une flore bactérienne prélevée chez des souris mâles adultes, on observe une protection. Il n’y a plus que 25 % d’entre elles qui développent la maladie.

Sur les hormones sexuelles.

Une seconde observation tout à fait inattendue est celle d’un effet du microbiome intestinal sur les hormones sexuelles. « Nous avons été surpris de constater que, lorsque de jeunes souris femelles reçoivent des microbes digestifs provenant de mâles adultes normaux, leur taux de testostérone monte. »

Les auteurs montrent ensuite que ce n’est pas les microbes qui protègent, mais bien le fait que, en leur présence, le taux d’hormone mâle augmente.

« Il était complètement inattendu de constater que le genre d’un animal détermine la composition de la flore digestive, que ces microbes régulent les hormones sexuelles, et que, à leur tour, les hormones ont un rôle sur le déclenchement d’une maladie à médiation immunitaire. »

Il reste à comprendre comment le transfert des micro-organismes digestifs mâles chez une femelle accroît leur testostérone. Et par quel phénomène la testostérone intervient dans l’auto-immunité.

Ces résultats confortent l’hypothèse hygiéniste, qui suggère que l’augmentation très importante des maladies auto-immunes et inflammatoires à laquelle on assiste depuis une cinquantaine d’années provient d’un changement de l’exposition aux microbes.

On sait que les microbes digestifs sont indispensables au développement et à la formation du système immunitaire. Ils sont essentiels à l’extraction des nutriments alimentaires. Et ils sont capables de nous protéger des maladies infectieuses. « Nous vivons avec des bactéries qui sont nos partenaires. Notre communauté microbienne digestive est une part essentielle de notre corps. Le nombre de bactéries surpasse le nombre des cellules, d’un facteur supérieur à 10. » On a même parlé du microbiome digestif comme d’un organe à part entière, dont le poids a été évalué à 1 kg.

Janet Markle et coll. Science, 17 janvier 2012. http://www.sciencemag.org.
Dr Bé. V.

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2976