C'est l'histoire d'un drame qui n'aura pas lieu. À la fin du mois d'octobre, le Laboratoire Pfizer informe les professionnels de santé de l'arrêt de commercialisation, au 4 novembre 2022, d'Isuprel 0,20 mg/1 ml solution injectable en ampoule, « suite à l'interruption de fourniture par un tiers d'un ingrédient pharmaceutique actif ». Problème, aucune alternative viable n’était alors identifiée. L’annonce de cette disparition programmée, relayée par l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM), n'a pas manqué de faire réagir les prescripteurs. Et parmi eux, singulièrement les urgentistes. À l'image du Dr Patrick Pelloux qui postait le 31 octobre ce tweet indigné : « Pfizer a décidé unilatéralement la fin de l'Isuprel. Médicament hyper important pour les urgentistes et cardiologues. C'est un scandale et une mise en danger des malades souffrant de troubles du rythme. Nous devons avoir la souveraineté sur nos médicaments en France et Europe. »
Un médicament de l'urgence cardiaque
Une colère justifiée par les indications très « pointues » de l’isoprénaline. Cette amine sympathomimétique synthétique, structurellement apparentée à l’épinéphrine, est en effet utilisée dans plusieurs situations d'urgences cardiaques : le syndrome de Stokes-Adams (dans l’attente de l’appareillage temporaire ou définitif) ; les bradycardies extrêmes par bloc sino-auriculaire syncopal (dans l’attente d’un appareillage temporaire ou définitif) ; les torsades de pointes, en cas d’impossibilité de stimulation à cadence ventriculaire rapide, associé au traitement étiologique de la torsade et de la restauration de la kaliémie…
Prioriser l'utilisation
Sachant que l’arrêt de commercialisation d’Isuprel conduirait à un épuisement des stocks d’ici fin novembre 2022, le laboratoire avait prévu, dès le 3 octobre 2022, un contingentement quantitatif afin de préserver les stocks restants. Il était également recommandé aux professionnels de santé de prioriser l’utilisation des stocks restants pour les 3 premières indications (syndrome de Stokes-Adams, bradycardies extrêmes par bloc sino-auriculaire syncopal et torsades de pointes). Pfizer précisait en outre que « les professionnels de santé doivent utiliser leur jugement clinique, les directives locales/médicales actuelles, et autres sources médicales reconnues afin de déterminer le traitement le plus approprié pour les patients ». Par ailleurs, comme c'est le cas en pareille occurrence, la vente et l'exportation du médicament par les grossistes répartiteurs vers l’étranger se sont vues proscrites… Jusqu'à rétablissement de sa disponibilité. L'épilogue de cette séquence vécue au rythme de l'urgence cardiaque est intervenu le 4 novembre. Le jour même de l'arrêt de commercialisation de l'Isuprel. Ce jour-là, Pfizer a pu informer les professionnels de la disponibilité auprès de Movianto d'une spécialité similaire : Isoprénaline chlorhydrate Tillomed 0,2 mg/1 ml, solution injectable pour perfusion. Le départ d'Isuprel se sera donc fait sans mal…
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