Un travail français original s'est attaché à examiner de plus près les caractéristiques clinicobiologiques des myocardites survenant après une infection à Covid-19 documentée (1). Ce travail est fondé sur l'observation de 38 patients admis en réanimation, au CHU de la Pitié-Salpêtrière (Paris) entre mai 2020 et juin 2021, pour myocardite fulminante secondaire à une infection Covid-19. Cette cohorte monocentrique a été rétrospectivement étudiée par les médecins du service, en collaboration avec des chercheurs de l'Inserm, de la Sorbonne Université et du centre d'immunologie et des maladies infectieuses de Paris.
Les résultats montrent que cette cohorte rassemble manifestement deux types assez différents de myocardites post-Covid-19. Si les deux tiers (66 %) de ces myocardites sont associés à un syndrome inflammatoire multisystémique (MIS-A+), comme décrits chez les enfants, le dernier tiers ne l'est pas (MIS-A-). Ces deux entités ont dans le même temps des profils immunologiques tout aussi contrastés. Les MIS-A+ sont associés à des taux plasmatiques particulièrement élevés d'interleukines-22 (IL-22) et d'IL-17. Ces cytokines sont essentiellement sécrétées par les lymphocytes Th17, et jouent un rôle important au niveau des barrières cutanées et des muqueuses. L'IL-17 possède également une activité pro-inflammatoire, impliquée dans de multiples maladies inflammatoires chroniques. Quant aux MIS-A-, ils sont associés à des taux élevés d’interféron alpha (IFN-α) et d’IL-8, respectivement impliqués dans la réponse antivirale précoce (pour l’IFN-α) et le recrutement des polynucléaires neutrophiles (pour l’IL-8).
Des différences retrouvées en clinique
Au-delà de ces caractéristiques biologico-immunologiques, les deux sous types de myocardites post-Covid-19 diffèrent aussi singulièrement en clinique. Les sujets MIS-A- (un tiers des cas) déclarent des myocardites bien plus précoces. Celles-ci surviennent dans un délai médian de trois jours après les premiers symptômes, contre 30 jours chez les sujets MIS-A+ (66 % des cas). Les myocardites MIS-A- sont aussi généralement bien plus graves, comme en témoignent la fraction d’éjection ventriculaire gauche, le taux de défaillance d'organes et le recours à l’oxygénation par membrane extracorporelle (ECMO). En effet, l’utilisation de l’ECMO atteint 92 % dans les myocardites précoces MIS-A- versus 16 % pour les myocardites tardives MIS-A+. Ainsi, malgré la prise en charge, un tiers des patients MIS-A- décèdent durant leur hospitalisation versus 4 % des myocardites MIS-A+.
« Ce travail a mis en évidence qu'il existe deux phénotypes très différents de myocardites post-Covid-19, associés à des présentations cliniques, des profils biologiques et des pronostics bien différents. Il sera fort utile d'en tenir compte à l'avenir pour améliorer notre compréhension et, à terme, le pronostic de nos patients », résument les auteurs.
(1) Barhoum P et al. Phenotypic Heterogeneity of Fulminant COVID-19--Related Myocarditis in Adults. JACC 2022;80:299-312.
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