DANS LA REVUE « QUE CHOISIR » du mois de novembre, un test en laboratoire a été effectué sur les émissions polluantes des sprays assainissants aux huiles essentielles, dont quatre d’entre eux sont vendus en pharmacie (Naturactive Assaini’spray bio, Aromaforce Pranarom science spray assainissant bio, Phytosun arôms spray habitat assainissant et Puressentiel assainissant spray aérien). Au final, tous ces produits sont accusés de polluer l’air plutôt que de l’assainir. Notamment, en libérant des composés organiques volatils comme le limonène et le linalol, qui sont irritants et allergisants.
Des substances irritantes.
Mais qu’en est-il vraiment ? Tout d’abord, le limonène et le linalol sont des substances qui entrent dans la composition de beaucoup d’huiles essentielles. Il n’est donc pas étonnant que le test de « Que Choisir » en ait retrouvé en plaçant des cartouches absorbantes à la sortie de la chambre d’émission des sprays. De plus, les sprays assainissants ne sont pas les seuls à renfermer du limonène et du linalol, qui entrent dans la composition de nombreux produits cosmétiques, dans des parfums, des savons, et dans des produits de nettoyage.
Ensuite, il est exact que le limonène et le linalol sont des substances allergisantes et irritantes. Ils font d’ailleurs à ce titre partie des 26 substances aromatiques dont la présence doit être obligatoirement mentionnée sur l’étiquetage, dès lors que leurs concentrations dépassent 0,001 % pour les produits sans rinçage (crèmes) et 0,01 % pour les produits à enlever par rinçage (Directive européenne, 2003). Néanmoins, leur potentiel allergisant est relativement faible. Ce sont plutôt leurs produits d’oxydation qui auraient un pouvoir allergisant et irritant plus élevé, mais en général observé pour une utilisation pure, par inhalation ou par ingestion.
Pas de risque cancérigène.
En ce qui concerne le risque de cancer, le linalol et le limonène sont tous deux classés comme « non cancérigènes » (groupe 3) par le Centre International de recherche sur le cancer (CIRC), il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir à ce sujet. Quoi que… la revue « Que Choisir » alerte sur les possibles transformations du limonène ou du linalol avec l’ozone de l’air qui pourraient produire du formaldéhyde (formol) qui, lui, est « cancérogène par inhalation ».
Toutefois, sur le plan chimique, cette transformation en formaldéhyde est loin d’être aisée (et nécessiterait sans doute la présence de catalyseurs ou de chaleur pour survenir). Avec l’ozone, on obtient plutôt des produits d’oxydation, qui peuvent avoir un effet irritant et allergène, comme indiqué précédemment.
Particules fines.
« Que Choisir » a étudié également le taux de particules fines émises par ces produits, mais, contrairement à certains désodorisants (aérosols) vendus en grande surface également testés, les sprays assainissants ne présentent pas des taux inquiétants de particules fines, avec des concentrations comprises entre 0,4 et 36 ppm pour les quatre sprays vendus en officine.
« Par ailleurs, les huiles essentielles diffusées en spray sont des particules liquides. Il n’y a donc pas réellement de particules fines, qui sont des particules solides en suspension », explique Anne-Christine Macherey, directrice de l’unité CNRS Prévention du risque chimique.
Efficace ou pas ?
Autre aspect : « Que choisir » pose la question de l’efficacité assinissante de ces sprays aux huiles essentielles. La revue indique que, pour ces produits, les propriétés antibactériennes, antiacariennes et fongicides des huiles essentielles ont bien été prouvées, mais pas dans les conditions d’utilisations du spray, sauf en ce qui concerne l’action acaricide. En effet, « les tests sont faits in vitro », en mettant directement en contact du produit pur ou dilué avec des moisissures ou des bactéries pendant un temps donné… Ces « tests de contact ne sont, par conséquent, pas extrapolables à la pulvérisation dans une pièce », indique la revue. Anne-Christine Macherey confirme en effet que « l’on ne peut effectivement pas transposer les résultats d’un test en phase solide ou liquide à une pulvérisation dans une pièce de 30 m2. De plus, tout dépend de la dose pulvérisée. Il faudrait réaliser des essais adaptés aux conseils d’utilisation ».
Toutefois, les tests effectués sont ceux demandés par les autorités sanitaires. Selon la marque Naturactive (Laboratoires Pierre Fabre), « notre spray assainissant est classé comme biocide et respecte donc la législation en vigueur sur les biocides. Les études d’efficacité que nous menons permettent de valider les allégations que revendique ce produit : bactéricide, fongicide, virucide, acaricide. Les tests sont réalisés par des laboratoires spécialisés indépendants. Pour les activités bactéricide, fongicide et virucide, ces laboratoires réalisent des tests de contact selon les normes NF en vigueur. Pour l’activité acaricide, le test est proche des conditions d’utilisation, avec une pulvérisation du produit sur des parcelles de textiles (toile à matelas et moquette), préalablement infestées par des acariens ».
Une législation légère.
Mais il faut admettre qu’en ce qui concerne les émissions de polluants, rien ne pousse les fabricants à réaliser des études sur les produits assainissants. « La législation reste assez légère dans ce domaine », admet Anne-Christine Macherey. Le plan national d’actions sur la qualité de l’air intérieur, présenté l’automne dernier, oblige pour le moment les fabricants à apposer une étiquette concernant les émissions de polluants sur les pots de peinture et les produits décoration. La loi prévoit d’étendre cet étiquetage obligatoire à tous les produits qui désodorisent et masquent les odeurs, indique la revue « Que Choisir ». « Mais, à ce jour, et en l’absence de l’application de cette loi, il est difficile de vérifier les émissions polluantes de ces produits assainissants, nouvellement venus sur le marché, commente Anne-Christine Macherey. De leur côté, dans ce contexte flou, les associations de patients ont alors tendance à voir le mal, parfois à bon escient, parfois abusivement. »
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques