En retraçant l’histoire du traitement du cancer du colon, le Pr Aimery de Gramont (chef de service de médecine interne-oncologie digestive à l’Hôpital Saint-Antoine à Paris) met en évidence les progrès réalisés liés au développement des molécules, mais surtout à la façon de les utiliser. C’est en 1957 que la première molécule efficace est décrite par un oncologue américain : le 5 FluoroUracile (5FU). Mais cette drogue présente une toxicité très élevée, notamment cutanée et cardiaque. Ce n’est qu’en 1986, que sont découverts les bénéfices de l’adjonction d’acide folinique (vitamine B9). Naissent alors les protocoles, dont celui mis au point par l’oncologue parisien, expert international du cancer du colon (LV5FU2 simplifié). D’autres molécules suivront : la capcitabine (prédrogue du 5FU, voie orale), l’oxaliplatine (associée au 5FU dans les protocoles FOLFOX), l’irinotecan (associée au 5FU dans les protocoles FOLFIRI).
Certains protocoles se révèlent 5 fois plus efficaces que l’association initiale 5FU+B9. La survie des patients est doublée, voire triplée. Leur toxicité, non négligeable, est gérable. Des traitements multilignes peuvent désormais être proposés ; des malades métastatiques peuvent à présent être guéris car la fonte des tumeurs par chimiothérapie ouvre la possibilité de chirurgie d’exérèse, auparavant impossible. Et quand plus rien ne marche, chez les patients métastatiques, la mise à disposition, depuis les années 2000, d’anticorps monoclonaux (bevacizumab, cetuximab, panitumumab) et d’inhibiteurs de tyrosine hydroxylase (regorafenib) permettent de proposer une solution en dernière ligne thérapeutique.
Nouvelles molécules, nouvelles toxicités.
« Si la toxicité des thérapies ciblée est moindre pour beaucoup d’organes, ce n’est pas vrai pour la peau ! », s’exclame Dr Vincent Sibaud, dermatologue à l’institut Claudius-Regaud de Toulouse. Les molécules des thérapies ciblées sont de deux types : anticorps monoclonaux (leur nom se termine par –MAB) et inhibiteurs de la tyrosine kinase (leur nom se termine par –NIB). S’ils se fixent aux cellules cancéreuses, ils se fixent aussi aux kératinocytes au niveau de l’épiderme et des follicules pileux et engendrent des dermatotoxicités, spécifiques à chaque molécule. En voici trois exemples.
- Les anti-egfr sont des Ac monoclonaux qui se lient spécifiquement au domaine extracellulaire du récepteur de facteur de croissance épidermique (en anglais : egfr, epidermic growth factor receptor) ou encore des inhibiteurs sélectifs de la tyrosine kinase de ce même récepteur. Chez 75 % des patients traités par ces molécules (erlotinib, cetuximab, panitumumab), apparaissent des éruptions acnéiformes, dans un délai variant de la première semaine au premier mois.
- Le vemurafenib est un anti-B-RAF, de la famille des inhibiteurs des kinases. Elle est indiquée dans le traitement du mélanome métastatique. Elle induit un syndrome pied-mains où l’hyperkératose observée aux points d’appuis induit des douleurs importantes. Les patients ont du mal à se déplacer, à conduire. Cette molécule est à l’origine d’une photosensibilité, aux UVB et aussi aux UVA (qui passent à travers les fenêtres !) obligeant à l’application d’un écran solaire de façon permanente.
Ces toxicités ne sont pas des effets indésirables, mais des effets attendus au traitement. C’est pourquoi, il est capital d’en informer le patient avant qu’il démarre son traitement. L’accompagner sur la durée est tout aussi important de façon à maintenir le plus possible le traitement, malgré sa toxicité, et à limiter les concessions doses.
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