Les anthracyclines, qu’elles soient d’origine naturelle ou modifiées par hémisynthèse, restent parmi les médicaments les plus couramment administrés dans les protocoles de chimiothérapie oncologique.
Leur histoire commença en 1940, lorsque deux microbiologistes américains, Selman Waksman (1888-1973) et Harold. B. Woodruff (1917-2017), isolèrent d'un actinomycète (Streptomyces antibioticus) l’actinomycine D dont les propriétés anti-tumorales furent démontrées en 1960 (dactinomycine = Cosmegen). Leurs travaux inspirèrent notamment l’équipe milanaise du laboratoire Farmitalia et un accord de recherche dans ce domaine fut signé en mai 1960 entre son directeur, Giulio Bertini, et Pietro Bucalossi (1905-1992), directeur, lui, de l’Institut de pharmacologie Mario Negri de Milan - alors en voie de création à l’initiative d’un homme d’affaire philanthrope, Mario Negri (1891-1960) -. Aurelio di Marco (1915-1984), médecin et chimiste qui explorait depuis 1945 pour cette firme les antibiotiques issus de divers micro-organismes put extraire en 1963 d’une souche de Streptomyces peucetius, découverte près de Castel del Monte dans les Pouilles, une substance d’un rouge éclatant : la daunomycine. Indépendamment, l’équipe française de Maurice Dubost au laboratoire Rhône-Poulenc isola cette même année à partir d’une souche de Streptomyces cerulorubidus la rubidomycine (eût égard à sa couleur rubis) : les Italiens conservèrent la paternité de la découverte mais les noms de daunomycine et rubidomycine fusionnèrent finalement en 1968 pour devenir « daunorubicine » (Cérubidine). Expérimentée à l’institut Mario Negri, elle révéla dès 1965 une puissante activité cytotoxique in vitro et son action intercalante fut explicitée en 1966. Cette même année, Claude Jacquillat (1929-1990) et Jean Bernard (1907-2006), à l'hôpital Saint-Louis de Paris, montrèrent en partant du produit fourni par Rhône-Poulenc l’intérêt clinique majeur de ce nouvel anticancéreux dans le traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques et myéloblastiques. Toutefois, il apparut que ce médicament exposait à une iatrogénie cardiaque préoccupante mise notamment en évidence par David A. Karnofsky (1914-1969) qui testa également la nouvelle molécule à New-York.
La doxorubicine, chef de file
En 1967, une souche de Streptomyces peucetius ayant subi un traitement mutagène de façon à produire des composés innovants (variété caesius) permit, toujours chez Farmitalia, l’extraction de la doxorubicine ou adriamycine (Adriblastine, Caelyx, Myocet), un dérivé 14-hydroxylé de la daunorubicine. Son activité, testée en 1969 par l’oncologue italien Gianni Bonadonna (1934-2015), permit d’en proposer l’administration dans divers types d’hémopathies malignes (lymphomes hodgkiniens ou non) ainsi que dans nombre de tumeurs solides (bronchopulmonaires, du sein, de l’ovaire, de l’utérus, du rein, etc.), ce qui en fit le véritable chef de file de cette famille d’anticancéreux et une référence en oncologie.
Deux objectifs guidèrent par la suite la recherche de nouvelles anthracyclines : découvrir des molécules ne présentant ni chimiorésistance croisée avec les premières ni toxicité cardiaque. Si plus de sept cents d’entre elles ont été isolées, soit à partir de souches de Streptomyces, soit par modifications structurelles d’anthracyclines expérimentées, seules quelques-unes sont devenues des médicaments : épirubicine (Farmorubicine), pirarubicine, idarubicine (Zavedos), zorubicine, aclarubicine.
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