Conjonctivites et eczéma des paupières

Le rôle des allergènes

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Publié le 16/05/2019
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Les allergènes atteignant la surface de l'œil sont multiples et génèrent des mécanismes différents selon qu'ils sont appliqués directement sur l'œil ou en suspension dans l'air. On distingue les haptènes et les aéroallergènes.
conjonctivite

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Crédit photo : phanie

Les haptènes sont des antigènes incomplets qui stimulent la formation d'anticorps lorsqu'ils se combinent avec une autre particule qui agit comme porteuse. Ils font intervenir l'allergie retardée et les lymphocytes T. Ils sont apportés à la surface oculaire de plusieurs façons. Lorsqu'ils sont directement appliqués sur l'œil, ils se comportent comme des allergènes de contact selon le mécanisme de l'eczéma.

Leur origine est essentiellement médicamenteuse (collyres, pommades ophtalmiques, produits d'entretien des lentilles). La première manifestation est une conjonctivite de contact qui se complique d'un eczéma des paupières si la cause persiste. Les médicaments le plus souvent en cause sont les aminosides, l'azithromycine, les bêtabloquants, la néosynéphrine, l'atropine, le diclofénac, les analogues des prostaglandines et les antihistaminiques. Le problème est que certains médicaments ou composants de collyres sont à la longue irritants et la distinction entre irritation et allergie est parfois difficile à faire. Toutefois, dans les irritations, l'hyperhémie conjonctivale, la sensation de cuisson, de corps étranger ou de sécheresse lacrymale prédominent, alors que la conjonctivite allergique se caractérise par un prurit, un érythème, un larmoiement et rapidement une blépharite.

Lorsque les haptènes sont appliqués à proximité immédiate de l'œil comme avec la plupart des produits de maquillage (mascara, crayons, fard à paupières, lotions de démaquillage), c'est surtout l'eczéma du visage et des paupières qui prédomine, l'atteinte de l'œil est secondaire.

Les haptènes peuvent aussi être aéroportés, c'est le cas des sprays (parfums, laques, coiffants) des fumées (tabac), des vapeurs (notamment en cuisine en véhiculant des composants alimentaires tels que les épices).

La voie systémique est aussi possible : un collyre ayant provoqué une allergie de contact peut reproduire un eczéma au niveau de la première zone concernée lorsqu'il est réintroduit par voie générale. De même certains allergènes peuvent être apportés par l'alimentation et excrétés dans les larmes, comme le nickel. L'allergie peut aussi être manuportée au niveau des paupières par des mains qui manipulent des haptènes.

Pollens et pollution

Les aéroallergènes sont plus volumineux que les haptènes et de nature essentiellement protéique. Ils sont responsables d'allergies de type immédiat faisant intervenir les IgE. Ils sont présents dans l'air et arrivent spontanément sur la surface oculaire, mais aussi nasale et bronchique,

On les divise en allergènes saisonniers, comme les pollens, ou persistants (acariens, phanères d'animaux, moisissures). Ils sont souvent impliqués dans les conjonctivites, notamment de l'enfant. La pollution atmosphérique (particules fines de diesel, fumées industrielles) et l'exposition au dioxyde d'azote ou de soufre ou à l'ozone, altèrent le film lacrymal, et induisent une réaction inflammatoire en augmentent la synthèse des cytokines pro-inflammatoires. L'immunité innée est stimulée et les circuits immunitaires de régulation sont altérés.

L'exposition plus ou moins brutale et massive, ou au contraire chronique sournoise, à ces aéroallergènes explique l'existence de plusieurs types de conjonctivites IgE médiées : aiguë, saisonnière ou persistante.

Pour mettre en évidence les aéroallergènes, le test princeps est le prick-test à lecture immédiate. Pour les haptènes, le test de référence est le patch test à lecture retardée, mais il existe de nombreux faux négatifs car il est difficile de reproduire sur la peau du dos et des bras ce qui se passe au niveau de la surface oculaire.

D'après une conférence de M. Castelain et S. Fauquier. Congrès francophone d'allergologie. Paris, avril 2019.

Christine Nicolet

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3520