Devant une toux chronique, et une fois éliminés l’asthme, le reflux gastro-œsophagien, les pathologies ORL ou encore un cancer, la liste des médicaments pris par le patient doit être passée au crible, en s’aidant notamment du site www.pneumotox.com qui répertorie les effets secondaires pulmonaires – dont la toux – de plus de 1 300 médicaments, drogues illicites, etc. Une soixantaine de médicaments y sont déclarés comme pouvant déclencher une toux, isolée ou non, les plus connus étant les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC).
Des formes tardives des années après
Près de 30 millions de personnes dans le monde prennent des IEC, pour une hypertension artérielle, une insuffisance cardiaque, une cardiopathie ischémique, etc. Or ces traitements provoquent une toux isolée, avec une incidence allant de 3-4 % à 10 % selon les séries. « L’analyse récente de trois études ayant inclus 27 000 patients naïfs débutant un traitement par IEC, a montré que 4 % d’entre eux développaient une toux. L’hypothèse la plus vraisemblable est que les IEC, qui bloquent la transformation d’angiotensine 1 en angiotensine 2, bloquent aussi la dégradation de bradykinine et de la substance P (ayant une action vasodilatatrice). Une susceptibilité individuelle sur la voie de la bradykinine pourrait entrer en ligne de compte. Beaucoup d’études s’intéressent d’ailleurs au polymorphisme génétique mais, à ce jour, il n’existe aucun test permettant de prédire qui risque de faire une toux sous IEC, ou pas » précise le Pr Philippe Bonniaud (CHU Dijon).
Cette toux peut-être précoce – elle survient dans les premiers jours ou les premières semaines, dans la moitié des cas – mais elle peut aussi survenir de façon très tardive, après plusieurs mois, voire années. « Une étude récente sur la connaissance des généralistes par rapport à la toux sous IEC, montre qu’ils y pensent quasi tous lorsque la survenue de la toux est précoce, mais moins lorsqu’elle est tardive. Or cette toux sèche est invalidante », souligne le Pr Bonniaud.
Une fois la toux apparue, il n’existe pas de traitement efficace autre que l’arrêt de l’IEC en cause. Et, tous étant concernés, il est inutile de troquer une molécule contre une autre. C’est alors un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2 (ARA 2) qui est volontiers prescrit. Son mode d’action ne devrait pas, en théorie, permettre d’agir sur la voie de la bradykinine. Néanmoins, des cas ont été décrits.
À noter que quelques autres cas de patients, sous IEC ou sous ARA 2, présentent un tableau associant une rhinite, une conjonctivite, une sensation de corps étranger dans le pharynx, une dysphonie et une toux au second plan. Là encore, les symptômes disparaissent à l’arrêt de l’IEC ou de l’ARA 2.
Des cas avérés sous gliptines
Une famille récente de médicaments autorisés en deuxième ligne dans le diabète de type 2 – les gliptines – dégrade des peptides impliqués dans la sécrétion d’insuline et semble-t-il, également la bradykinine et la substance P. Or, si ces médicaments sont connus pour pouvoir provoquer des rhinites, le déclenchement d’une toux l’est moins, en dépit de cas cliniques solides, avérés. Leur association à un IEC augmenterait encore ce risque, ainsi que celui d’angio-œdème.
D’après une interview du Pr Philippe Bonniaud, service de pneumologie (CHU Dijon).
22e congrès de pneumologie de langue française.
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