NUL ne peut ignorer le potentiel que renferme le rayon des produits vétérinaires. Et personne ne niera le fait que ce potentiel à l’officine est encore, pour une large part, virtuel. Plusieurs raisons à cela, et tout d’abord l’emprise opérée par la profession vétérinaire sur la délivrance des médicaments destinés aux animaux de rente (élevage). « Aujourd’hui, un éleveur sur trois déplore ne pas pouvoir disposer librement de son ordonnance », remarque Jacky Maillet, président de l’ANPVO*, en expliquant que les vétérinaires, notamment en région rurale, demeurent majoritairement sourds aux demandes de leurs clients éleveurs et refusent de leur remettre les ordonnances si ceux-ci désirent s’adresser au pharmacien pour la délivrance des traitements prescrits. « C’est ainsi que 65 % à 70 % du chiffre d’affaires des vétérinaires ruraux proviennent de la vente des médicaments. » Pourtant, le décret « prescription délivrance » du 24 avril 2007 autorise désormais le renouvellement de la délivrance des principaux traitements préventifs, donnant ainsi au pharmacien la possibilité d’élargir son activité vétérinaire.
Cette situation n’est pas sans conséquences pour l’officine de campagne, le segment des seuls vaccins et médicaments anti-infectieux (tous circuits confondus) ayant pesé en 2009 quelque 420 millions d’euros (source AIEMV** - prix grossistes hors taxes).
Marché porteur.
Dans ce contexte aux horizons plutôt brumeux, l’actualité vient apporter quelque éclaircie. En effet, à l’initiative de l’ANPVO, la liste d’exonération des substances vénéneuses destinées aux animaux de compagnie est actuellement en cours de révision. Certaines spécialités d’usage courant comme les vermifuges et les antiparasitaires externes pourraient ainsi être délivrés sans ordonnance. « L’idée est de faciliter l’accès à des médications simples auxquelles les propriétaires de chiens et chats ont régulièrement recours », précise Jacky Maillet. Une bonne nouvelle pour l’officine quand on sait qu’une famille française sur deux possède au moins un animal de compagnie. Cet assouplissement permettrait peut-être au circuit pharmaceutique d’élargir une part équivalant à 6 % d’un marché total qui, petfood compris, était estimé à 1,2 milliard d’euros en 2009 (source AIEMV (adhérents)- prix grossistes hors taxes). D’autant que le segment des traitements antiparasitaires externes occupe une place centrale dans le rayon officinal et qu’il est un marché porteur. En 2010, il représentait plus de 40 % des ventes du rayon vétérinaire en pharmacie (hors petfood). « Quand on sait que 20 % des animaux de compagnie ne sont jamais traités et que ceux qui le sont ne bénéficient d’un traitement que deux fois par an, on réalise le potentiel de ce segment », souligne Sébastien Boussemart, responsable commercial du pôle pharmacie chez Merial. « Bien des officines ne sont pas conscientes des possibilités de ce rayon et on constate une grande disparité dans la façon dont il est exploité. Certains présentent leur offre sur des étagères et l’encadrent d’un conseil efficace. D’autres répondent simplement aux demandes de leurs clients. » Un autre facteur vient entraver le dynamisme du segment à l’officine, avec pour conséquences un report de la clientèle sur d’autres circuits de distribution : « Depuis peu, des molécules génériques d’antiparasitaires ont fait leur apparition sur le marché, créant un certain trouble parmi la clientèle qui est attachée à ses marques et qui a l’impression qu’on veut lui en imposer d’autres. La substitution, pratique courante en médecine humaine, n’est pas facilement transposable à l’identique aux médicaments vétérinaires parce que l’écart de prix est plus faible et que les principes actifs sont peu connus des clients. »
Toutes les compétences requises.
Merial destine sa gamme Frontline au traitement des chiens et des chats grâce à 3 formes d’antiparasitaires externes : Frontline Spray, Frontline Spot On et Frontline Combo qui associe deux molécules permettant de traiter à la fois l’animal et son environnement. Bayer Santé Animale propose une large gamme d’antiparasitaires externes et internes pour chiens (pipettes Advantix, collier Kiltix, comprimés Drontal P, solution buvable Dronstop chiot) et chats (pipettes Advantage, comprimés Drontal chat, pipettes Profender) que complète un endectocide, un crochet à tique et un spray insecticide pour le traitement de l’habitat. Clément Thékan, pour sa part, occupe plusieurs segments du rayon des produits vétérinaires, et notamment les antiparasitaires externes (Fiprokil, Habitat, Tire-tic), les vermifuges et l’hygiène (Denticroc Poudre PlaqueOff). Biocanina, qui propose désormais de la formation aux pharmaciens, couvre un large spectre de besoins en traitements et soins vétérinaires (antiparasitaires externes et internes, dermatologie, œil/oreille, troubles digestifs, phytothérapie, hygiène…).
D’autres segments sont promis à un bel avenir en pharmacie comme l’alimentation animale et les compléments alimentaires (voir encadré), ainsi que les produits d’hygiène (yeux, oreille, pelage). Tout du moins en ce qui concerne deux des principaux marchés vétérinaires à l’officine que sont les animaux de compagnie et les chevaux : « Antiparasitaires, produits d’hygiène et produits de nutrition peuvent être sans problème développés par le pharmacien, remarque Agnès Berger, pharmacien responsable auprès du répartiteur Véto Santé. Il a toutes les compétences requises dans ces domaines puisqu’il connaît les principes actifs, la galénique, la pharmacologie, la cosmétique, la diététique, des disciplines qui ne varient pas, quel que soit le sujet concerné, homme ou animal. » Une logique sans faille qui s’applique aussi au domaine des animaux de rente, autre pilier du marché des produits vétérinaires. « Une fois encore, l’exercice relève pleinement du métier de pharmacien puisqu’il s’agit de dispenser des médicaments à partir d’une ordonnance », poursuit Agnès Berger, en rappelant le modeste rôle joué par l’officine dans la distribution des traitements thérapeutiques aux animaux d’élevage, pas plus de 3 % du marché.
**Association interprofessionnelle d’étude du médicament vétérinaire.
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