Envie de mieux connaître les pathologies des animaux de compagnie, de découvrir les conseils à donner aux propriétaires de NAC ou de vous spécialiser dans les bêtes d’élevage ? Plusieurs diplômes universitaires (DU) sont à votre disposition. L’UFR de sciences médicales et pharmaceutiques de l’université de Franche-Comté, à Besançon, propose ainsi un DU de pharmacie vétérinaire pour les animaux de compagnie (40 heures) depuis 1992 et accueille généralement une vingtaine de participants chaque année, de tous profils : titulaires, adjoints et préparateurs, exerçant en ville ou en milieu rural, autant de jeunes diplômés que de personnes plus expérimentées, d’hommes que de femmes. Et les retours sont positifs. Deux titulaires exerçant dans la Marne soulignent ainsi que cette formation leur permet non seulement d’être plus à l’aise face aux propriétaires d’animaux de compagnie, mais aussi avec les vétérinaires de leur secteur.
À Lyon et à Caen le DU proposé se penche sur les petits et les grands animaux et s’adresse aussi bien aux vétérinaires qu’aux pharmaciens. Le but est de connaître les besoins spécifiques en termes d’alimentation et de soins, de reconnaître les risques de zoonoses et améliorer la protection de la santé publique, et de préciser le rôle du pharmacien dans la dispensation du médicament vétérinaire face aux évolutions réglementaires. « Le DU à Caen a existé de nombreuses années avant de tomber en sommeil, il a été réactivé en 2012 alors que je tannais le doyen de l'époque pour remettre cette formation sur pied et qu'un vétérinaire, Jean-Paul Lemonnier, a eu la même idée », se souvient Christian Boullot, qui se charge d'enseigner la partie réglementaire et législative avec Jacky Maillet, président de l’Association nationale de la pharmacie vétérinaire d’officine (ANPVO).
Se former
Mais avec une petite vingtaine de participants par DU, l’intérêt pour la pharmacie vétérinaire semble limité chez les confrères. « Il est satisfaisant de voir que des pharmaciens veulent s’impliquer en santé animale et font la démarche de se former, mais le nombre de participants chaque année reste faible », remarque le Dr Florence Almosni-Le Sueur, vétérinaire. Un intérêt moindre que Pierre-Xavier Franck, directeur de l’école de formation Qualipharm avait noté pour toutes les formations visant une spécialisation dans un domaine précis, donc la pharmacie vétérinaire comme la micronutrition ou le maintien à domicile. « Depuis 2012, on observe que les adjoints se recentrent sur les formations cœur de métier… les nouvelles missions du pharmacien sont passées par là ! »
Mais le président de l’Association de pharmacie rurale (APR) Albin Dumas attribue la perte d’intérêt pour la pharmacie vétérinaire aux attaques incessantes dont font l’objet les pharmaciens impliqués en santé animale. « En dehors de la poignée de pharmaciens dont l’activité en vétérinaire est notable, il y a bien peu d’intérêt pour les autres confrères à s’y investir. Tout officinal a des demandes éparses au comptoir qui prennent peu de temps. La pharmacie vétérinaire est complètement sinistrée parce que le premier ayant droit du médicament vétérinaire est mis à l’écart », lance-t-il. Mais il ne baisse pas les bras. Le 10 octobre, il rappelait ainsi au cabinet de la ministre de la Santé que le précédent directeur général de la Santé (DGS), Benoît Vallet, s’était engagé à mettre sur pied un groupe de travail sur le médicament vétérinaire et qu’il comptait sur le nouveau DGS, Jérôme Salomon, pour s’y atteler. Il espère un jour que des protocoles de délivrance existeront en pharmacie vétérinaire, comme c’est le cas en médecine humaine. « Les pharmaciens n’osent pas s’engager car ils ont une connaissance fragmentée de la législation et avec les attaques judiciaires subies par les pharmaciens impliqués, ils craignent de s’attirer des ennuis. Même quand ils démontrent qu’ils ont bien délivré sur ordonnance, on suspecte alors des ordonnances de complaisance. Or les pharmaciens ressortent blanchis à chaque fois car plus ils sont impliqués et plus ils sont irréprochables », ajoute Albin Dumas.
Être crédible
Ce que confirme Jacky Maillet, qui fait partie de la quinzaine de pharmaciens spécialisés dans le domaine. « Dès qu’on a un chiffre d’affaires notable en vétérinaire, on a des problèmes. » Mais il en faut plus pour décourager Jacky Maillet, « parce que ce qui nous arrive est de notre faute, la pharmacie ne s’investit pas alors qu’elle doit être proactive ». Le potentiel du marché de l’animal de compagnie est considérable et ouvert à toutes les officines du territoire. Hors pet food, il représente « 560 millions d'euros en prix achat grossiste, soit environ 1 milliard d'euros en prix de vente public estimé (hors taxe) », note Jacky Maillet. Si le pharmacien prenait 50 % de ce marché, ajoute-t-il « cela apporterait environ 500 millions d'euros de chiffre d’affaires supplémentaire dans le réseau. En fonction des taux de marge appliqués dans ce secteur auquel il faudrait ajouter les éventuelles remises arrières consenties par les laboratoires, le réseau pourrait bénéficier, selon moi, d’une marge supplémentaire comprise entre 200 et 300 millions d'euros… voire plus ! Si on compare ces chiffres aux perspectives offertes par d’autres missions ou d’autres marchés, on comprend tout l’intérêt de prendre cette affaire à bras-le-corps, c’est un marché colossal qui est actuellement aux mains de non-pharmaciens ! »
Pour Jacky Maillet, c’est aussi un intérêt personnel qui le pousse à continuer. D’origine rurale, il s’installe en 1981 en achetant une pharmacie déjà impliquée en pharmacie vétérinaire dont il va encore développer le rayon. « J’ai fait un DU pharmacie vétérinaire à Clermont-Ferrand, l’un des premiers mis en place. Je n’en avais pas forcément besoin mais je souhaitais légitimer mon activité si jamais on venait me poser des questions sur ma compétence. Je conseille d’ailleurs à tous mes confrères de suivre ce type de formation. » Ce que son associée a fait il y a quelques années. « Le DU permet de faire le tour de la question de façon synthétique et d’être crédible face aux personnes qui nous posent des questions. Il faut connaître un minimum de physiologie animale : un cochon ne digère pas comme un ruminant ! Et il faut adapter son rayon vétérinaire à sa clientèle. Ce que je propose chez moi dans l’Indre ne correspondra pas au rayon à mettre en place dans le 8e arrondissement de Paris. »
Rester confiant
Le rayon est d’autant plus important qu’il agit comme une vitrine de la compétence du pharmacien et provoque les questions des patients qui entrent dans la pharmacie et possèdent un animal de compagnie. Jacky Maillet conseille de mettre en avant des marques leaders, utilisées par les vétérinaires et connues par le plus grand nombre. « Si en plus vous affichez un prix inférieur, que vous vous montrez passionnés par le sujet, et capables de conseils avisés, par exemple en nutrition médicalisée, vous verrez que les propriétaires d’animaux vont vous adorer. Et dès lors qu’on est motivé, c’est facile ! »
Un optimisme qui détonne, alors que la pharmacie ne délivre que 2,4 % des médicaments destinés aux animaux de compagnie et 1 % de ceux destinés aux animaux de rente. Selon une enquête menée par le cabinet Ajilon Consulting pour l’ANPVO en 2016 auprès de 500 éleveurs et 500 propriétaires d’animaux de compagnie, dans 98 % des délivrances pour des animaux de rente et 97 % pour les animaux de compagnie, le vétérinaire fait entrave au libre choix du dispensateur en remettant l’ordonnance en même temps ou après avoir délivré les médicaments, voire en ne la remettant pas du tout. Un chantage à l’ordonnance dénoncé en décembre 2015 dans un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) resté lettre morte. « Je reste confiant parce que la situation va évoluer dans l’intérêt de tous. S’opposer au choix de son client ne va pas dans le sens de l’histoire. Si le pharmacien fait montre de son intérêt pour la discipline, par exemple sur les antiparasitaires, les propriétaires d’animaux de compagnie seront prêts à revenir. Ils ont confiance dans leur pharmacien et la pharmacie est un endroit sérieux. Nous avons une bonne image, la balle est dans notre camp. J’aimerais qu’on parle du médicament vétérinaire comme d’une nouvelle mission. Faisons des entretiens pharmaceutiques, faisons des bilans partagés de médication mais faisons aussi de la pharmacie vétérinaire car c’est bien plus rémunérateur. »
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