LE RAYON vétérinaire devrait prochainement subir un sérieux toilettage. En accord avec les vétérinaires, une révision de la liste d’exonération des substances vénéneuses destinées aux animaux de compagnie est en effet en cours. Et certains principes actifs d’usage courant pourraient être dispensés sans ordonnance. Les spécialités concernées ? Celles classées peu ou pas toxiques couramment utilisées par les propriétaires de chiens et de chats, tels les vermifuges, indique l’association nationale de la pharmacie vétérinaire d’officine* (ANPVO). Les teintures de noix vomique et de belladone pourraient, elles, être tout bonnement retirées des étagères. Toutes ces propositions sont actuellement examinées par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire, ex-AFSSA). Mais personne ne sait encore quand cela aboutira et si cette évolution se traduira par un passage de spécialités devant le comptoir, comme le souhaite, par exemple, Philippe Gaertner. Le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) défend en effet l’idée de la mise en libre accès de médicaments pour animaux de compagnie.
Il y a deux ans, lors du Congrès des pharmaciens de Deauville, l’ex-ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, ne s’y était pas montrée défavorable et s’était dite prête à étudier la possibilité de rendre directement accessible des spécialités vétérinaires non listées ou exonérées et non destinées aux animaux de rente. Mais depuis, plus rien. La nouvelle secrétaire d’État à la santé, Nora Berra, réalisera-t-elle ce projet ?
Une liste obsolète.
En attendant, l’ANPVO continue de se mobiliser en faveur de la révision de la liste d’exonération des substances vénéneuses. « La liste existante, non revue depuis 1986, est obsolète », estime en effet l’association, qui plaide pour une évolution de la Pharmacopée vétérinaire.
Au-delà de la réforme des substances vénéneuses, l’ANPVO part en guerre contre la surconsommation des antibiotiques au sein des élevages. Une situation préoccupante qui serait même, selon l’association, à la limite du « désastre sanitaire ». Pour elle, cette consommation incontrôlée est la cause de multirésistances bactériennes. La menace est jugée suffisamment sérieuse pour qu’un comité national réunissant les acteurs du dossier soit chargé de trouver des solutions au problème. Interpellé sur le sujet, l’Ordre des pharmaciens recommande une nécessaire maîtrise des prescriptions et des dispensations des antibiotiques à usage vétérinaire, en proposant une plus grande implication officinale. De son côté, l’ANPVO enfonce le clou : le recours excessif aux antibiotiques reflète la mainmise des vétérinaires sur la vente de ces médicaments aux éleveurs. Les prescripteurs ont en main 98 % du marché des antibiotiques (qui représentent 15 à 20 % de leur chiffre d’affaires sur le médicament), pointent les officinaux, tout en dénonçant un « conflit d’intérêt latent ». Pour en limiter l’impact, et ainsi barrer la route aux mésusages, les ordonnances devraient davantage passer par l’officine. « De fait, le contrôle par un tiers ferait diminuer les prescriptions », estime Philippe Lépée, vice-président de l’ANPVO. En juillet dernier, le collectif a remis un courrier en ce sens au ministère de la Santé, plus engagé pour le moment dans la lutte contre la surconsommation antibiotique en médecine humaine.
« Renouvellement interdit ».
La revendication portée par les pharmaciens pourrait constituer un nouvel épisode dans le conflit engagé depuis plus de 30 ans avec les vétérinaires. Elle pourrait raviver des tensions atténuées par la parution, en avril 2007, du décret « prescription délivrance » sur le médicament vétérinaire (voir encadré). Les pharmaciens pensaient alors avoir marqué des points. Las, selon eux, la loi n’est pas respectée. Les vétérinaires rechignent à changer leurs pratiques, alors qu’un bon tiers des éleveurs voudraient avoir le choix du fournisseur des médicaments, estime Jacky Maillet, président de l’ANPVO. « Une écrasante majorité de vétérinaires n’hésitent toujours pas à refuser expressément de rédiger une ordonnance si leur client choisit le pharmacien pour dispenser les médicaments », affirme t-il. Et ceux qui délivrent une ordonnance qu’ils ont eux-mêmes rédigée, n’oublient jamais de préciser que son renouvellement est interdit. Une façon de ne laisser aucune chance aux pharmaciens de dispenser un jour leur prescription. « La mention « renouvellement interdit » est utilisée sans aucune justification, ni discernement, quelle que soit la catégorie de médicaments prescrits. Quand elle n’est pas pré-imprimée sur l’ordonnance, ce sont les logiciels de prescription qui l’apposent systématiquement », dénonce Jacky Maillet. Celui-ci estime par ailleurs que la moitié des ordonnances ne sont pas conformes aux dispositions fixées par le décret de 2007. Beaucoup de prescriptions seraient encore établies sans aucun examen clinique des animaux. Récemment saisi sur ce dossier, le Conseil d’État doit se prononcer sur le manquement aux règles constaté par les pharmaciens. Parallèlement, une instruction est en cours après la saisine de l’Autorité de la concurrence par les trois syndicats d’officinaux.
Pour apaiser le débat, les pharmaciens estiment que la concertation doit se poursuivre avec la profession vétérinaire, pour laquelle il s’agit de trouver une « alternative économique pertinente » à la vente des médicaments. « Le prescripteur doit se défaire de cet acte marchand qui dénature sa profession », insiste Jacky Maillet.
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Françoise Amouroux
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