L’Académie de Médecine a rappelé récemment que la vaccination permet de prévenir efficacement 5 maladies prioritaires, lourdes de conséquences chez les personnes âgées : grippe, Covid-19 mais aussi pneumocoque, virus syncytial (VRS) et zona. Les chiffres sont en effet désolants.
Vaccination grippale : une couverture catastrophique
Pour la vaccination grippale, on est loin de l’objectif de 75 % fixé par l’OMS pour les populations ciblées dans les Recommandations. Au cours de l’hIver 2022-23, seulement 51,5 % étaient vaccinées et, pire, 47 % en 2023-2024, avec une stagnation chez les plus de 80 ans. Si, « en Ehpad, 83,3 % des résidents étaient vaccinés contre la grippe, seuls 60 % des médecins l'étaient, 35,5 % des infirmiers(e)s, 20,3 % des aides-soignant(e)s et 18 % des personnels de service. C’est catastrophique », précise le Dr Odile Raynaud-Lévy, présidente de la Fédération des médecins coordinateurs (MCOOR). Or, la grippe est responsable chaque année, de 9 000 à 10 000 morts en France, des séniors dans 90 % des cas. Selon Santé Publique France, en moyenne 2 000 vies par an sont sauvées par le vaccin contre la grippe chez les 65 ans et plus, et 3 000 vies supplémentaires pourraient l’être si la couverture atteignait 75 %. Et c’est sans parler des séquelles d’infarctus (10 fois plus de risques dans les 7 jours qui suivent une grippe) et d’AVC (8 fois plus dans le mois).
Selon Santé Publique France, la grippe est responsable chaque année de 9 000 à 10 000 morts en France, des séniors dans 90 % des cas.
Par comparaison, le taux de vaccination grippale est meilleur aux États-Unis (70 % des plus de 65 ans) et au Portugal (60 %). C’est pire pour la vaccination contre le Covid-19. Même les médecins se vaccinent peu. « Lors de la campagne 2023-2024, 12,2 % des hospitaliers étaient vaccinés et 11,1 % des libéraux. De quoi douter de leur capacité à convaincre les patients… », s’interroge le Pr François Puisieux, président du Gerontopole des Hauts de France.
Peu de données sur la vaccination contre le pneumocoque
Il existe peu de données sur la couverture vaccinale contre le pneumocoque chez les séniors mais elle est clairement insuffisante. Un repère : elle est de 1,8 % chez les diabétiques. « En Ehpad, le vaccin ne figure même pas sur le dossier d’entrée ou, quand il y figure, le résident ignore s’il l’a reçu… Dans le doute, il faut vacciner ou revacciner sans hésiter », conseille Odile Raynaud-Lévy. La vaccination contre le zona, pourtant recommandée dès 65 ans, se situe encore un cran en dessous (1,4 %). « En France, la maladie est banalisée alors que le risque d’AVC, d’infarctus et de perte d’autonomie est augmenté et que les douleurs post-zostériennes sont à la fois plus fréquentes et prolongées chez les personnes âgées », souligne le Pr Olivier Guérin, président du Conseil national professionnel de Gériatrie.
Il faut s’organiser et élargir la participation de professionnels de santé, notamment des pharmaciens. (…) Si le vaccinoscepticisme existe, les Français, dans leur grande majorité, adhèrent à la vaccination
Pr Olivier Guérin, président du Conseil national professionnel de Gériatrie
Comment améliorer la couverture vaccinale contre ces maladies chez les séniors ? Selon le Dr Marie Lechâtre, infectiologue à l’hôpital Cochin (Paris), le vaccin antipneumococcique en une seule dose simplifiera la vaccination dans cette population, la mise à disposition d’un vaccin inerte contre le zona devrait mettre fin aux réticences des médecins au vu des données enregistrées à l’étranger et les vaccinations simultanées contre grippe et Covid-19 permettent de ne pas manquer une des deux. Pour le Pr Olivier Guérin, il est indispensable de simplifier le tableau des vaccinations recommandées à partir de 65 ans. « Il faut aussi dire aux hospitaliers de ne pas rater une occasion de vacciner. Quand on le propose, les refus sont rares. Encore faut-il avoir un stock de vaccins comme c’est le cas à Lille… Les hospitaliers pensent que c’est l’affaire des médecins généralistes, mais ça ne marche pas, faute de temps souvent. Il faut s’organiser et élargir la participation de professionnels de santé, notamment des pharmaciens. Je suis intimement persuadé qu’on changera ainsi la donne car, même si le vaccinoscepticisme existe, les Français, dans leur grande majorité, adhèrent à la vaccination ».
* Par Moderna France dans le cadre des Journées annuelles de la Société française de Gériatrie et Gérontologie.
La vaccination contre le VRS s’impose aussi
Comme l’avaient conseillé l’Académie de Médecine et la Haute Autorité de santé, le calendrier vaccinal 2024 recommande de vacciner contre le virus syncytial les seniors de 75 ans et plus et les 65 ans et plus affectés par des maladies chroniques respiratoires (en particulier la bronchopneumopathie chronique obstructive) ou cardiaques (notamment l’insuffisance cardiaque), à risque de décompensation. Une décision attendue par toutes les sociétés savantes (gériatrie, pneumologie et cardiologie notamment).
Deux vaccins recombinants contre le VRS sont déjà disponibles en France pour les adultes. Un autre, de composition différente, viendra s’ajouter prochainement (début 2025 sans doute) : mRES-VIA à ARN messager, signé Moderna. C’est le premier vaccin doté de cette technologie à être approuvé au niveau mondial, après ceux contre le Covid-19. Il a reçu son AMM européenne en août dans « la prévention des maladies des voies respiratoires inférieures dues au VRS chez les sujets âgés de 60 ans et plus ». En seringues préremplies, donc plus simple à administrer, il devrait faciliter la vaccination. Avec, selon des études récentes, 15 000 à 20 000 hospitalisations par an chez les plus de 60 ans, liées à des complications graves, les infections à VRS constituent en effet un fardeau. L’âge moyen des séniors hospitalisés est de 74 ans en moyenne, 85 % d’entre eux présentent au moins une comorbidité, 15 % sont admis en réa et 8 % décèdent à l’hôpital.
« Outre l’hospitalisation, le risque principal est le déclin des capacités physiques et une perte d’autonomie », ajoute Arnaud Chéret, directeur Médical de Moderna France. « Les hospitaliers et les médecins de ville ne doivent pas rater les occasions de vacciner les séniors contre le VRS, mais les pharmaciens ont également un grand rôle à jouer pour faire baisser des chiffres désormais inadmissibles ».
* Moderna va utiliser la technologie ARN messager dans d’autres vaccins mais aussi dans des médicaments. 10 lancements sont prévus dans les 3 ans. Notamment un vaccin combiné Covid-19-grippe dont les essais de phase III sont concluants. Une plateforme numérique atlas.modernatx.com explique (hors produits) la technologie ARN messager.
E.G.
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