Il est loin le débat interrogeant la légitimité des pharmaciens à pratiquer la vaccination. Envolées également les réticences de certains à proposer l’injection de vaccin dans leur officine. Selon un récent sondage de l’institut CallMediCall pour « le Quotidien du pharmacien »*, 95 % des répondants indiquent réaliser cet acte au sein de leur officine. Initiée avec la grippe avant d'être déployée à l'occasion de l'épidémie de Covid-19, la vaccination s'inscrit désormais dans la pratique officinale. Plus encore, la population française a adopté le réflexe de se faire vacciner par leur pharmacien, validant ainsi cette évolution du parcours de soins. Pour preuve, on estime qu'une injection de vaccin antigrippal sur deux est réalisée en pharmacie.
De l'incitation à la prescription
Et la profession ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Conformément à la Convention nationale et au décret du 21 avril 2022, le nombre de vaccinations que le pharmacien est autorisé à injecter s’est étoffé en novembre 2022. La prochaine étape devrait être la prescription de ces vaccins, pour laquelle un code acte est déjà prêt. En attendant l’officialisation, les pharmaciens semblent prêts à s’inscrire dans cette démarche ; 35 % des sondés par CallMediCall indiquent d’ailleurs « avoir déjà prescrit un vaccin ». En réalité, il s'agit plus d'une incitation à la vaccination se concentrant sur la grippe et le Covid-19 auprès des adultes à risque de forme grave, plutôt que d'une prescription telle que définie par le code de la santé publique. Dans 44 % de ces situations, la prescription du vaccin fait suite à une demande du patient. De façon plus confidentielle, elle intervient après repérage de facteurs de risque ou d’un retard dans le calendrier vaccinal. Dans 8 cas sur 10, les patients susceptibles de se faire vacciner sont identifiés au comptoir, et avec l’aide du carnet vaccinal dans 45 % des cas.
Organisation de la vaccination à l'officine : des points d'amélioration
Si l’engagement des pharmaciens pour assurer les vaccinations est très net, l’enquête met en évidence quelques limites en termes d’organisation pour inscrire de façon efficiente cette mission dans l'exercice quotidien. Les résultats recueillis montrent des difficultés à structurer cette activité. Sept pharmaciens sur 10 indiquent communiquer sur cette activité auprès de leur patient, majoritairement de façon orale ou par un support papier. En revanche, le recours aux supports de communication plus élaborés reste confidentiel : les sondés ne sont que 12 % à mettre en place une campagne digitale (de type spot vitrine) relative à cette activité. Ceci pourrait s'expliquer par la crainte d’enfreindre le code de déontologie ou de froisser la susceptibilité des professionnels de santé autorisés à vacciner sur le même secteur. En outre, si la prise de rendez-vous semble être une pratique courante, elle apparaît « artisanale » : 58 % des sondés déclarent en effet utiliser un support papier. L'utilisation d'outils digitaux est timide, alors que ces solutions permettent un gain de temps et une traçabilité. Seulement 12 % des pharmaciens interrogés indiquent recourir au service Doctolib, et 10 % utilisent un logiciel de prise de rendez-vous.
Un acte quotidien mais en faible quantité
Selon l’enquête CallMediCall, près de 4 pharmaciens sur 10 déclarent ne pas vacciner à des jours fixes, et plus de la moitié indique ne pas avoir de jour de prédilection pour vacciner. Une majorité des sondés (45 %) déclare réaliser entre 1 et 5 vaccins par jour de vaccination, quand 27 % en pratiquent jusqu’à deux fois plus (5 à 10 par jour). Ces résultats montrent que le geste vaccinal fait clairement partie du quotidien à l’officine et intervient de façon régulière ; mais le faible nombre de vaccinations quotidiennes peut interroger quant à la pertinence économique de cette mission au vu du temps passé et de la mobilisation des ressources. La massification de la vaccination, c’est-à-dire le regroupement des personnes à vacciner sur des jours et créneaux précis, ne semble pas être la démarche favorisée actuellement alors qu'elle permettrait d’améliorer l'efficience de cette mission.
Ce sondage du « Quotidien du pharmacien/CallMediCall » montre une certaine difficulté des pharmaciens à se projeter dans l'activité de vaccination, tous vaccins confondus. Si l’engagement est net, il est désormais nécessaire de mieux structurer cette mission pour l'intégrer quantitativement et qualitativement à l'exercice officinal. Le recours aux outils digitaux, pour communiquer ou organiser, et un aménagement adapté des officines sont indispensables pour atteindre cet objectif.
* Sondage réalisé par CallMediCall du 2 au 13 janvier 2023, auprès de 1 014 pharmacies réparties dans toute la France et de profils différents.
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