À première vue, les nouvelles missions valorisent le métier de pharmacien et le rendent plus attractif. Pour les officines, elles constituent, en plus, un investissement pour leur image et leur avenir. Encore faut-il être capable de les mettre en œuvre et de les assurer correctement… Ce n’est pas vraiment le cas aujourd’hui. Les nouvelles missions créent de nouvelles contraintes qui viennent compliquer le travail et ralentir l’activité. De quoi hésiter à se lancer…
Le manque de personnel
C’est sans doute le principal frein. 2 pharmacies sur 3 sont en recherche de personnel. Les causes sont connues : pyramide des âges, manque d’attractivité de la profession mais aussi de visibilité (dans les collèges, lycée, sur Parcoursup). Résultats : une carence de 30 % pour remplir le cursus et 10 000 salariés (préparateurs et adjoints) qui manquent à l’appel pour remplir les missions. La crise sanitaire n’a fait qu’accentuer le phénomène en provoquant une surcharge de travail, des tensions avec les clients et le sentiment de ne pas être considéré pour les efforts consentis. Par ailleurs, les rémunérations élevées dans les centres de vaccination Covid-19, ont pu inciter diplômés, étudiants et remplaçants à se reposer ensuite, du moins pendant quelques mois. D’autres changent de voie. Pour éviter le burn-out et ne pas être hors-la-loi (les ARS ont multiplié les rappels à l’ordre), force est de recourir aux intérimaires, déjà payés le double… en ajoutant quelques euros de l’heure, quand on le peut. Mais pour démarrer des nouvelles missions, ce n’est pas l’idéal.
Les formations
Chaque nouvelle mission exigeant une formation - en e-learning, visioconférence ou présentiel -, c’est du temps en moins et un surcroît de travail pour le reste de l’équipe. Alors on privilégie les formations courtes ou on remet à plus tard. D’autant plus si l’on a été un peu déçu. Les formations en présentiel notamment, qui obligent déjà à se déplacer et à abandonner l’équipe, sont jugées parfois trop longues (1 journée pour les nouvelles vaccinations par exemple), trop didactiques, pas assez concrètes.
Le manque de temps pour la gestion administrative
Entre ruptures, indus, démarche qualité, sérialisation, etc. les pharmaciens courent après le temps. Les actes proprement dits se doublent de tâches administratives chronophages, souvent complexes, avec une multitude de codes différents, sources de confusions. On ne peut plus continuer ainsi, comme l’a dit récemment le président de la FSPH. Comment ajouter d’autres tâches administratives liées aux nouvelles missions ? Ou alors a minima en choisissant celles qui prennent le moins de temps.
La nécessité de travailler en exercice coordonné
Si, a priori, l’évolution des pratiques vers plus de concertation et de coordination - au sein de maisons de santé (MSP, de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ou d’équipes de soins primaires - est souhaitable, dans la réalité ce n’est pas simple. Les médecins ne sont guère motivés et, pour les pharmaciens, la mise en place des protocoles de soin non programmés (pour la rhino-pharyngite allergique saisonnière, par exemple) se révèle complexe, en particulier pour la rémunération. De plus, les structures d’exercice coordonné n’existent pas partout. Difficile dans ces conditions d’assurer certaines missions.
Le manque de place dans l’espace de confidentialité
Si les grandes pharmacies peuvent avoir plusieurs cabines, idéalement 3 ou 4 pour chaque type de services, avec un point d’eau, beaucoup ne disposent que d’un petit espace de confidentialité initialement dédié à l’orthopédie-contention très encombré. Il est alors difficile, voire impossible, de proposer, par exemple, des entretiens d’accompagnement de patients sous chimiothérapie orale, surtout âgés. Pour les nouvelles missions, il faut au minimum deux chaises confortables, une table pour l’ordinateur permettant d’accéder aux dossiers des patients et une ambiance chaleureuse pour qu’ils se sentent à l’aise. La solution : créer des espaces modulaires en réorganisant la pharmacie en fonction des priorités, mais ce n’est pas toujours possible et cela représente un investissement.
Une rémunération inadaptée et insuffisante
C’est un frein important. Même si l’on peut estimer la rentabilité des nouvelles missions et les mixer au mieux entre celles qui sont tout de suite financièrement intéressantes - comme les vaccinations rémunérées à 7,50 euros TTC qui prennent peu de temps -, celles qui peuvent déboucher sur des ventes (les entretiens femme enceinte par exemple) et celles qui sont chronophages mais permettent de mieux connaître ses patients et de les fidéliser.
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