La demande de vaccins antigrippaux est cette année fulgurante. Au cours du mois d’octobre, les pharmaciens ont réalisé « plus de 2 millions d’injections, contre moins de 700 000 l’an passé », indique la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), « en un mois, les pharmaciens ont déjà vacciné autant de patients qu’en octobre et novembre 2019 ». Mais tout le monde n’a pas été servi. Faute de pouvoir obtenir le vaccin antigrippal qu’ils convoitaient cette année, des patients ont d’ores et déjà saisi l’Ordre des pharmaciens. Une situation kafkaïenne !
La colère gronde
Les pharmacies sont prises en étau avec d’un côté, des injonctions officielles qui leur dictent de sélectionner les seuls patients détenant les bons de prise en charge, et de l’autre côté, des patients non-prioritaires qui adhèrent cette année à la vaccination antigrippale et qui ne comprennent pas pourquoi ils se retrouvent écartés du dispositif. La colère gronde et le débat se déporte sur le terrain judiciaire. « Les pharmaciens qui ont refusé de délivrer le vaccin antigrippal à une personne hors cible ne pourront qu’être relaxés puisqu’ils ont strictement respecté le commandement de l’autorité légitime en matière de santé publique », estime Maître Fabrice Di Vizio, avocat spécialiste en droit de la santé. La situation sera en revanche plus délicate et contestable pour les pharmaciens qui ont opposé un refus à des personnes prioritaires sous prétexte qu’elles ne font pas partie de leur clientèle habituelle.
Piqûre de rappel ! La priorisation indiquée au Bulletin officiel du 13 octobre 2020 a transformé ce qui n’était auparavant qu’une simple recommandation en une règle que le pharmacien doit suivre. Sauf que cette règle ne tient pas compte du désarroi des patients dans un climat de tensions extrêmes. Et c’est justement sur ce terrain fragile que le pharmacien doit quotidiennement agir et jouer son rôle d’acteur de santé publique. « La profession officinale est au front, assez seule, face à des patients désemparés qui ont besoin d’être entendus et rassurés. Il est nécessaire que les pharmaciens désamorcent les tensions, tout en se protégeant juridiquement. C’est aussi un combat pour leur image », insiste Maître Fabrice Di Vizio. Pour cela, l’avocat plaide pour une communication directe envers les patients, « affichez dans vos pharmacies une notice explicative sur les conditions de délivrance du vaccin antigrippal et ses restrictions, mettez également cette notice à disposition au comptoir avec les coordonnées des ARS et des autres instances officielles ». Le poids de vos mots produira de multiples effets positifs, « outre le fait d’expliquer avec courtoisie et de témoigner aux patients votre empathie, cela induira un transfert de responsabilité et donc de culpabilité. Au lieu de dire je ne veux pas délivrer, le pharmacien indique je ne peux pas », souligne Maître Fabrice Di Vizio. Ne manquez pas ce changement de paradigme pour être bien compris.
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