Plus qu’une menace, une réalité. Pour les pays développés et bientôt pour ceux en développement, l’obésité galopante n’est pas sans conséquence sur l’incidence des cancers. L’étude internationale publiée dans le « Lancet » sous la direction du Dr Melina Arnold du Centre International de recherche sur le cancer (CIRC) enfonce le clou avec les chiffres les plus robustes jamais obtenus sur le lien entre cancer et indice de masse corporel élevé (IMC) à l’échelle mondiale.
Alors que plus d’un tiers de la population mondiale est en surcharge pondérale (IMC≥25 kg/m2), dont 12 % ayant dépassé le stade d’obésité (IMC≥30 kg/m2), l’association entre cancer et IMC élevé est confirmée pour différents cancers, tels que les cancers du côlon, rectum, rein, vésicule biliaire, seins, ovaires et endomètre. L’étude du Global Burden of Disease avait récemment mesuré que 3,9 % de la mortalité par cancer en 2010 était attribuée à un IMC élevé. Mais jusqu’alors aucune étude n’avait mesuré le temps nécessaire pour que l’obésité se traduise par le développement d’un nouveau cancer.
Les femmes trois plus concernées
Pour leurs calculs, les épidémiologistes ont utilisé les données de GLOBOCAN2012 et les chiffres d’IMC depuis 2002. Après une décennie de surveillance (2002-2012), les épidémiologistes ont estimé que 481 000 de tous les nouveaux cas de cancers, soit 3,6 % de l’incidence de 2012, étaient attribuables à un IMC trop élevé. Les femmes étaient trois fois plus concernées par le phénomène que les hommes, la part des cancers attribuables à un IMC élevé étant respectivement de 5,4 % et 1,9 %. La différence entre hommes et femmes est observée un peu partout, quels que soient le niveau de développement et la localisation géographique. Les cancers de l’endomètre, du sein après la ménopause et du côlon comptaient pour 63,6 % des cancers attribuables à un IMC élevé.
Dans un éditorial attaché à l’article, un épidémiologiste britannique, le Dr Benjamin Cairns souligne qu’il y a de « bonnes raisons de croire qu’il existe une association causale entre IMC et le risque de ces cancers via des voies hormonales ». Les auteurs rappellent que l’excès pondéral augmente les taux circulants d’œstrogènes et la bioactivité d’IGF-1, ce qui favorise le développement des cancers. Le lien, supposé, de causalité entre cancer et IMC ouvre la possibilité de prévenir certains cancers.
Une prévention possible et nécessaire
L’étude montre également que les cancers liés à l’obésité touchent surtout les pays développés, à « haut et très haut indices de développement humain », en particulier l’Amérique du Nord et l’Europe. Mais, comme les auteurs le soulignent, la prévalence de l’obésité passe par des phases de transition, de l’augmentation à la stabilisation, voire à une possible diminution, mais à des taux différents, et à différents moments selon les pays et les régions. Les pays en développement, où l’épidémie d’obésité s’est déclarée plus tard, vont voir leurs chiffres progresser à l’avenir.
Selon les auteurs, l’un de leurs conclusions revêt une importance particulière. Les chercheurs ont ainsi estimé que près d’un quart des cancers en 2012, soit environ 118 000, sont attribuables à la prise de poids depuis 1982. Autrement dit, si la population étudiée s’était contentée de maintenir son poids, un quart des cancers apparus auraient pu être évités. Pour les auteurs, si la perte de poids est un objectif très ambitieux en politique de santé publique, il est beaucoup plus réaliste d’envisager de le stabiliser à l’échelle d’une population. Même si d’autres facteurs de risque de cancer sont prééminents sur l’obésité et que les ressources pour la prévention sont limitées, les différents « plans cancer » à l’échelle nationale et internationale ont fort à gagner à en tenir compte.
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