Le Quotidien du pharmacien. - Au premier semestre 2020, l'URPS Pharmaciens des Hauts-de-France a été la première à expérimenter le télésoin en officine, comment cela s'est-il déroulé ?
Grégory Tempremant. - Durant le premier confinement, les patients étaient incités à rester chez eux et on a assisté au boom de la téléconsultation. Il fallait adapter cet outil au télésoin, alors nous avons mis à disposition des officinaux une plateforme de télésoin totalement gratuite, Predice, en lien avec l'agence régionale de santé (ARS) et la région. Dans le contexte de la crise sanitaire, tous les pharmaciens des Hauts-de-France ont par exemple pu l'utiliser pour récupérer de manière sécurisée l'ordonnance du patient, échanger avec lui, puis préparer les médicaments qui sont ensuite récupérés par un tiers ou bien livrés à domicile. Toujours à distance, le pharmacien pouvait ensuite continuer d'échanger avec la personne pour la conseiller. Nous avons donc bousculé les codes, nous avons pris de l'avance, le décret et l'arrêté qui officialisent le télésoin n'ayant été publiés que le 4 juin. Aujourd'hui c'est une satisfaction de voir que cet acte est entré dans le cadre conventionnel. Nous n'avons pas l'intention de pérenniser la dispensation de médicaments via le télésoin néanmoins. Le télésoin doit être utilisé pour les entretiens pharmaceutiques et les bilans partagés de médication (BPM) en priorité.
Que va changer concrètement la parution du décret et de l'arrêté officialisant la pratique du télésoin en officine ?
Cela va premièrement nous permettre de communiquer à nouveau sur ce sujet. Nous allons renvoyer la procédure aux pharmaciens et leur rappeler qu'une plateforme gratuite existe. Un nombre relativement modeste de confrères des Hauts-de-France a pratiqué le télésoin depuis un an, c'est encore très confidentiel aujourd'hui, mais il faut avoir en tête que la crise sanitaire va changer des comportements. Les pharmaciens doivent montrer leur capacité d'adaptation, se saisir des nouveaux outils, faire connaître les nouveaux services… Le télésoin, c'est encore très obscur pour les patients. Peu d'entre eux sont au courant que leur pharmacien peut leur proposer un tel service, comme c'est également le cas pour les entretiens ou les BPM. Nous devons travailler sur l'offre, susciter la demande, permettre aux patients de s'acculturer. Le télésoin, contrairement à la téléconsultation, ne nécessite pas d'investissements massifs, il suffit d'un ordinateur connecté à Internet, d'un smartphone ou d'une tablette et d'utiliser ensuite une plateforme sécurisée pour entrer en contact avec le patient. Les officinaux doivent donc s'en saisir.
Existe-t-il encore des freins à lever au niveau du télésoin ?
Je n'irai pas jusqu'à qualifier cela de frein mais le fait d'imposer un premier rendez-vous en présentiel avant de pouvoir envisager les suivants en télésoin, cela n'a pas de sens selon moi. Il est logique que la phase de recrutement se fasse au comptoir avec le patient face à nous, mais le premier rendez-vous formalisé pourrait parfaitement se faire à distance. On le verra sans doute avec la pratique, c'est peut-être une chose qui, je l'espère, pourra évoluer dans le temps.
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