C’EST à une révision à la fois accélérée et très précise des grands fondamentaux de la pharmacologie, en général et appliquée à la chimiothérapie anticancéreuse en particulier, que notre confrère, le Pr François Lokiec (chef de département de radio-pharmacologie, Institut Curie - Hôpital René Huguenin, Saint-Cloud) a convié les nombreux pharmaciens présents. Évoquant successivement les trois grandes étapes de la pharmacocinétique et les paramètres correspondant les plus couramment utilisés (absorption, biodisponibilité ; distribution, volume de distribution, métabolisation ; élimination, clairance), le Pr Lokiec a passé en revue les modifications les plus importantes observées au cours du vieillissement.
C’est ainsi que l’absorption peut être influencée par une diminution de la motilité intestinale, de la vascularisation splanchnique (autrement dit du tube digestif) et de la sécrétion des enzymes digestives, ainsi que par une atrophie des muqueuses digestives (des modifications à prendre en compte du fait de l’emploi croissant des inhibiteurs de tyrosine kinase), que la distribution peut être modifiée à la suite d’une baisse de la concentration plasmatique en albumine, une anémie ou encore de modifications de la masse grasse et de la teneur en eau des tissus, que la métabolisation est différemment affectée par l’âge, et que l’élimination est dominée par une baisse physiologique plus ou moins progressive de la fonction rénale.
Rôles clés du foie et des reins.
Le foie constitue, comme l’on sait, le principal organe de métabolisation des médicaments. Les conséquences du vieillissement hépatique dépendent de l’activité ou de l’inactivité du ou des métabolites formés.
Il n’existe malheureusement pas encore de test simple permettant de mesurer le degré du vieillissement du foie ; c’est ainsi, notamment, que la réduction de son volume n’apparaît pas corrélée avec une baisse de ses fonctions métaboliques. Pour autant, on sait que l’avancée en âge s’accompagne d’une diminution du flux sanguin hépatique ainsi que de l’activité des cytochromes P450, celle des enzymes assurant les réactions de conjugaison n’étant pas modifiée.
Comme à tout âge, mais plus encore chez ces patients, il convient d’être très vigilant au regard du risque d’interactions médicamenteuses (d’autant que la population âgée est très généralement polymédiquée : parmi les 10 millions de plus de 65 ans, près de 1,5 million prennent quotidiennement 7 médicaments ou plus de classes thérapeutiques différentes), notamment du point de vue de la compétition entre médicaments vis-à-vis d’un même système enzymatique, avec, par exemple, un risque de surdosage.
La réduction des capacités rénales liées à l’âge (baisse moyenne du flux sanguin des reins de 10 % par tranche de 10 ans à partir de 40 ans) constitue un autre point très important (mais avec une forte variabilité d’un sujet à l’autre), avec diminution de la filtration glomérulaire, de la sécrétion et de la réabsorption tubulaires. D’où l’importance, a rappelé le Pr Lokiec, de tenir systématiquement compte du calcul du débit de filtration glomérulaire pour ajuster les posologies.
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