Mission historique du pharmacien, la dispensation du médicament contribue à rassembler les professionnels de santé.
Le contexte actuel le prouve. « Durant cette crise sanitaire, les pouvoirs publics nous ont chargés de la distribution en matériels divers : masques, tests, vaccins… Ce rôle nous tient à cœur car il nous permet d'échanger très régulièrement avec les médecins, les infirmiers et les paramédicaux à l'occasion des prises de commandes et des livraisons, notamment. Comme les pharmacies hospitalières, les officines deviennent, ainsi, un guichet unique vers qui les professionnels de santé se tournent pour leur approvisionnement », souligne Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Les actions de prévention favorisent l'exercice coordonné
Outre le rôle de dispensation des officinaux, certaines nouvelles prérogatives contribuent à rapprocher les pharmaciens des autres professionnels de santé. Tests antigéniques, dépistages colorectaux, TROD angine… ces missions de prévention et de dépistage favorisent l'exercice complémentaire et coordonné. « Lorsque nous dépistons une angine d'origine bactérienne, le Covid ou encore, qu'un test de diabète est positif, nous devons en informer le patient. Mais aussi, son médecin traitant : cette communication entre le pharmacien et le praticien devient indispensable. Ces actions de dépistage nous permettent également d'organiser le parcours de soins des patients », note Gilles Bonnefond, ex-président de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO). Ainsi, en matière de tests, ce qui favorise l'interprofessionnalité, ce sont les transmissions faites par l'officinal au médecin. « Ce qui compte c'est le dialogue entre ces deux professionnels de santé concernant l'acte effectué et son résultat. Or ce dialogue est largement perfectible. Les médecins ont récemment indiqué qu'ils ne récupéraient pas assez les résultats des tests antigéniques effectués par les officinaux. Des efforts doivent être faits pour améliorer la communication et notamment, les systèmes d'information reliant les pharmaciens aux médecins », souligne Philippe Besset. La vaccination officinale contre la grippe ou le Covid a également un objectif fédérateur. « Cette mission ne peut être réservée qu'aux médecins dont un certain nombre sont débordés, nous sommes là pour les épauler au quotidien, et non, pour les concurrencer », assure Gilles Bonnefond.
Communiquer les résultats des entretiens et BPM
Autres missions récentes, les bilans partagés de médication (BPM) et les entretiens pharmaceutiques sont restés à l'arrière-plan, depuis mars 2020, pour un grand nombre d'officinaux. « Crise sanitaire oblige, les pharmaciens ont malheureusement peu de temps à consacrer au suivi des patients sous anticoagulants ou aux patients âgés souffrant de comorbidités. Or, ces missions constituent l'avenir de la coordination médecins/pharmaciens/infirmiers. En effet, en transmettant les résultats de ces entretiens (avec l'accord du patient) à ces professionnels de santé, le pharmacien devient le moteur d'un dialogue constructif pour la prise en charge des patients », confie Philippe Besset. Le manque de communication sur les traitements des patients chroniques et les problèmes d'observance peuvent, par ailleurs, constituer une perte de chance pour le patient. Comme le souligne Gilles Bonnefond, « il faut une équipe de soin autour du patient chronique. Le pharmacien doit avoir le réflexe de discuter avec ses confrères du manque d'adhésion au traitement d'un patient ou de difficultés pour ce dernier à prendre sa santé en main, à comprendre sa pathologie ».
Un moyen efficace de favoriser la coopération entre les professionnels de santé reste les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Cet espace de travail informatique permet des échanges réguliers, en distanciel. « Une CPTS comprend, en moyenne, une quinzaine de pharmacies dans un territoire donné. Cela permet de travailler en complémentarité et d'éviter l'aspect concurrentiel qui peut exister avec les maisons de santé pluridisciplinaire (MSP). En effet, dans un village par exemple, lorsqu'une pharmacie travaille avec une MSP, elle s'entoure de tous les professionnels de santé de son territoire. La pharmacie du village d'à côté risque de se retrouver esseulée », note Philippe Besset. D'après Gilles Bonnefond, les problèmes de concurrence entre professionnels de santé tiennent beaucoup au mode de rémunération. « Lorsque l'on arrêtera de rémunérer les médecins uniquement à l'acte, et que l'on proposera des alternatives tels que la rémunération au forfait, la collaboration avec les pharmaciens s'effectuera de façon plus détendue. Enfin, certains médecins estiment que la coordination leur fait perdre du temps. À l'avenir, les systèmes informatiques et messageries sécurisées devront être modernisés pour assurer un gain de temps. Sans cela, il sera difficile de motiver les soignants à relever pleinement le défi de l'exercice coordonné. »
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