IL Y A BIENTÔT un an, Roselyne Bachelot rendait accessible directement aux patients certains médicaments. Avec, en perspective, l’idée d’améliorer le pouvoir d’achat des Français. La ministre de la Santé mise en effet sur le jeu de la concurrence pour faire baisser les prix dans les pharmacies.
Ce n’est pas tout. Pour permettre aux officinaux de pratiquer des prix compétitifs, la ministre table également sur la création d’un statut de centrale d’achats pour les pharmaciens afin « qu’ils puissent bénéficier, comme tout type de commerce, de prix concurrentiels pour la majorité des produits non remboursables, quelle que soit la taille de leur officine », expliquait-elle au « Quotidien » dès janvier 2008.
Près de 18 mois plus tard, le décret officialisant ces structures est enfin paru au « Journal officiel » le 21 juin.
« C’était le dernier élément manquant du dispositif du libre accès », souligne Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), satisfait de la publication de ce texte. « Tout dispositif facilitant l’achat de ces produits à bon prix par les pharmaciens est positif », explique-t-il.
Certes, des solutions étaient déjà proposées aux officinaux, notamment par les groupements. Mais désormais, l’ensemble de la profession pourra en bénéficier.
Des nouvelles structures.
Le décret paru le premier jour de l’été permet à des titulaires ou à des sociétés exploitant une officine de créer une structure de regroupement à l’achat (SRA) sous forme d’une société, d’un groupement d’intérêt économique ou d’une association. Cette SRA ne va pas acheter directement, mais mandater pour le faire un établissement pharmaceutique, qui peut être un grossiste répartiteur, un dépositaire, ou encore une centrale d’achat pharmaceutique. Car, c’est l’autre nouveauté introduite par le décret, la création du statut de centrales d’achats pharmaceutiques vient s’ajouter à la liste des établissements pharmaceutiques. Attention, une SRA ne peut servir à acheter que des médicaments non remboursables, ainsi que des produits hors médicaments comme de la parapharmacie, de la diététique ou des compléments alimentaires. Quant à la centrale d’achat, elle ne peut acheter et stocker que des médicaments non remboursables.
Mieux acheter.
Concrètement, décrypte le président de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), Claude Japhet, dix pharmaciens, par exemple, peuvent se regrouper au sein d’une SRA et nommer un mandataire pour négocier en leur nom des achats collectifs et obtenir des prix. Ce mandataire, qui est forcément un établissement pharmaceutique, va alors procéder à l’achat, au stockage et à la distribution des produits, ainsi qu’à la facturation à chacun des mandants. Ces nouvelles dispositions offrent « la possibilité à des personnes non groupées, qui sont la majorité, de pouvoir négocier collectivement des conditions commerciales grâce à des structures « light » », se félicite Claude Japhet, qui voit également dans ce nouveau dispositif une réponse à la réduction des délais de paiement prévue par la loi de modernisation de l’économie (LME). Le président de l’UNPF résume : « Dans le cadre d’un achat collectif, un pharmacien aura désormais accès à titre individuel, pour des achats limités et une livraison au fil de l’eau, à des conditions commerciales pratiquement équivalentes à des grandes quantités de commandes et des livraisons importantes. »
Un outil complémentaire.
« C’est un nouvel outil pour optimiser les achats qui complète les possibilités offertes par les groupements et les grossistes répartiteurs », renchérit Gilles Bonnefond, président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Mais, pour faire baisser les prix, « les laboratoires devront aussi jouer le jeu », ajoute-t-il.
Du côté des groupements, on regarde bien sûr l’arrivée des SRA et des centrales d’achats avec une certaine méfiance. Car, comme le reconnaît le président du Collectif, Pascal Louis, ce nouveau dispositif pourrait représenter une concurrence. Celui-ci estime également que le décret publié en début de semaine ne lève pas son inquiétude quant à l’arrivée éventuelle dans le circuit d’intervenants non pharmaceutiques. « On laisse à des acteurs qui ne distribuent pas actuellement le médicament, la possibilité d’adapter leur structure pour le faire », estime-t-il.
La mise en place de ces nouvelles structures ne laisse pas non plus indifférents les grossistes répartiteurs. D’autant que le décret modifie quelque peu leur définition. Désormais, ils peuvent aussi « acheter et stocker des médicaments d’ordre et pour le compte d’un titulaire ou d’une SRA, sans avoir besoin de créer une centrale d’achat », analyse Emmanuel Déchin, secrétaire général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP), qui doute de l’utilité des centrales d’achats pharmaceutiques. « Pour nous, les moyens logistiques de distribution en gros existants étaient largement suffisants », explique-t-il. Et d’ajouter que « nous pensons même que ces nouveaux acteurs ne seront pas économiquement viables ». Seul l’avenir le dira.
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