ALEA JACTA EST. Le sort de la vignette est scellé. Sa fin est d’ores et déjà programmée pour le 1er juillet 2013, selon un arrêté paru au « Journal officiel » (« JO ») le 26 décembre dernier. Et les mois qui viennent seront « mis à profit pour finaliser les discussions sur les implications pratiques, le principe en étant acquis, de suppression de la vignette pharmaceutique », indique un avis aux fabricants et aux distributeurs de spécialités pharmaceutiques, publié le 29 janvier au « JO ». Après 60 ans d’existence, les petits autocollants blancs, bleus ou orange, vont donc bientôt être mis au placard.
Le passage depuis le 1er janvier au code CIP à 13 caractères les a précipités vers la sortie. Les pouvoirs publics estiment en effet que les contraintes de taille du code-barres des vignettes ne permettent pas d’y inscrire 13 chiffres. Ce n’est pas la seule raison, estiment les syndicats d’officinaux, qui voient là un moyen de simplifier la mise en œuvre des décisions de baisse de prix et de remboursement. En clair, une façon d’éviter les opérations de revignettage, appelées à devenir de plus en plus fréquentes. Ce que reconnaît d’ailleurs l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) dans un rapport remis à la ministre de la Santé, l’été dernier (« le Quotidien » du 13 septembre 2012). « Ces changements de prix ou de conditions de prise en charge sont inhérents au fonctionnement du système de l’assurance-maladie, écrivent les inspecteurs. Il n’est pas anormal avec le temps, par exemple, que les prix des médicaments soient revus à la baisse, pas plus que soient décidées des mesures d’ajustement, dans un court délai, pour respecter l’ONDAM. La vignette, de ce point de vue, et donc la présence du prix sur la boîte, constituent un frein injustifié à un fonctionnement optimal du système de fixation des prix et des conditions de prise en charge. »
Concertation en cours.
Dans ce contexte, le chantier pour trouver une alternative à la vignette est ouvert depuis novembre dernier. Associés à cette réflexion, les représentants de la profession sont pour l’heure réservés quant à la disparition de ces petits autocollants. En fait, ce n’est pas tant la suppression de la vignette qui inquiète la profession, que la disparition des données qu’elle contient. En effet, si la mention du prix venait à disparaître des emballages, comment s’assurer que le prix auquel on vend un médicament correspond bien au prix auquel on l’a acheté. « Nous voulons une neutralité financière sur tout changement concernant nos stocks », explique Philippe Besset, président de la commission économie de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Il ajoute : « nous sommes ouverts aux propositions qui répondraient à cet objectif, car il n’y a pas que la vignette pour y répondre. »
Des prix sur les boîtes.
Consciente du risque de perte pour les officinaux en cas de changement de tarif, l’IGAS propose dans son rapport la mise en place d’une procédure de changement de prix progressive, par paliers, assurant globalement la neutralité de ses effets sur les stocks de l’officine. Un système qui ne semble pas convaincre Gilles Bonnefond. Le président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) insiste pour que le prix des médicaments soit clairement inscrit sur les boîtes. Il juge également nécessaire de changer les modalités d’écoulement des stocks. Il préconise tout simplement de relier un prix à un numéro de lot. Le nouveau tarif entrerait ainsi en vigueur quand les boîtes du nouveau lot arriveraient dans les officines. Au-delà du prix, le président de l’USPO souhaite que le numéro de lot, la date de péremption et le taux de remboursement continuent de figurer clairement sur les boîtes. « Les informations concernant le prix et la prise en charge ne doivent pas pouvoir être contestées par les patients, notamment en cas de TFR », argumente Gilles Bonnefond, qui souhaite aussi que l’ensemble de ces données figure dans le code Datamatrix. Car aujourd’hui ce code ne comprend en effet aucune donnée relative au prix. C’est également ce qu’a fait valoir la présidente de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) lors de sa rencontre avec la ministre de la Santé la semaine dernière. « Nous avons fait entendre que nous ne voulions pas que la suppression de la vignette représente une charge supplémentaire pour l’officine et avons proposé que le prix soit incorporé dans le code Datamatrix », indique Françoise Daligault.
Pas prêt pour juillet.
« Il est essentiel de garder le lien de confiance entre le patient et le pharmacien, souligne de son côté Philippe Besset. C’est à l’État d’assumer la responsabilité de dire que c’est lui qui fixe le prix et le taux de remboursement. » Pour le représentant de la FSPF, « le plus simple est donc que ces informations soient écrites sur les boîtes, mais ce n’est pas interdit d’avoir de l’imagination à partir du moment où l’on répond à cet objectif d’information des patients ». La transformation du « ticket Vitale » en une facture informative obligatoire, au contenu normalisé, tel que proposé par l’IGAS, ne lui paraît pas suffisante.
Philippe Besset estime également que, avant de supprimer complètement la vignette, il est indispensable que toutes les officines françaises soient équipées de lecteurs Datamatrix. « Beaucoup l’ont déjà fait, indique-t-il. Mais le prochain avis aux fabricants et distributeurs doit également contenir une consigne d’équipement. » Surtout, le responsable syndical demande que la fin de la vignette coïncide avec l’entrée en vigueur de la nouvelle rémunération des pharmaciens. En effet, explique-t-il, celle-ci s’accompagnera obligatoirement d’une large modification des prix. Alors, afin d’éviter une gigantesque valse des vignettes, autant que ces deux changements s’effectuent en même temps. De toute façon, la date du 1er juillet lui semble optimiste. Si les pouvoirs publics maintenaient ce délai coûte que coûte, « il y aura des bugs en pagaille, augure Philippe Besset. De nombreuses pharmacies ne pourront pas lire les codes Datamatrix, ne pourront ni facturer, ni commander. On ne va pas mettre en place un système qui nuit à la santé publique ».
Et puis, des questions restent encore sans réponse : comment procéder en cas de panne informatique si le prix et le taux de remboursement ne sont plus visibles ? Comment un patient qui refuse un générique fait-il pour se faire rembourser s’il ne peut plus coller de vignette ? Se passer des petits autocollants colorés ne sera peut-être pas aussi simple qu’on le pense.
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