26 avril 1954. Nous sommes à McLean, une ville tranquille de Virginie. C’est dans son école qu’un petit garçon s’avance crânement vers le médecin qui va faire l’injection. Randy Kerr, c’est son nom, est le premier des patients inclus dans ce qui reste connu comme l’un des plus importants essais cliniques de l’histoire, placé sous la direction du professeur Thomas Francis (1900-1969) par la National Foundation for Infantile Paralysis (NFIP) américaine. Il s’agit là de tester l’efficacité et la tolérance d’un vaccin inactivé récemment mis au point par un virologue, Jonas Salk (1914-1995). Un vaccin visant à protéger d’une infection virale terrifiante : la poliomyélite.
Financé pour plus de 17 millions de dollars par la NFIP, cet essai inclut environ 1,8 million d’enfants de 6 à 9 ans, les « pionniers de la polio », aux États-Unis mais aussi au Canada et en Finlande (1,2 million ne recevant rien, 440 000 recevant du vaccin et 210 000 un placebo). Il nécessita le bénévolat de plus de 150 000 personnes : médecins, infirmières, enseignants, parents. Il impliqua un déploiement logistique sans précédent pour produire des doses vaccinales en suffisance : divers laboratoires furent mis à contribution dans une certaine précipitation…
Il faut dire que le pari de Salk était ambitieux. Ayant tout misé sur le vaccin inactivé qu’il avait conçu en 1952 et testé à petite échelle sur lui-même et sa famille, il devait essuyer de nombreuses critiques, dont celles d’un autre virologue américain œuvrant à la conception d’un vaccin atténué oral, Albert B. Sabin (1906-1993), qui ne se gênait guère pour affoler par médias interposés les parents des jeunes pionniers… : la NFIP n’avait-elle pas, disait-on, déjà acheté des dizaines de petits cercueils pour enterrer discrètement les futures victimes du vaccin de Salk ?
Fin juin 1954, tous les participants avaient pu néanmoins être traités. Les registres furent regroupés au centre de collecte des données à Ann Arbor (Michigan) pour un suivi qui devait durer 9 mois.
12 avril 1955, 10 h 20
C’est face à des journalistes du monde entier rassemblés dans le Rackham Hall de l’université du Michigan que Thomas Francis livra les conclusions de l’essai. Avec un enthousiasme indescriptible, ils apprirent que le vaccin Salk était sûr et puissant : il était efficace à 94 % contre la polio bulbaire, cette forme terrifiante de la maladie à laquelle les patients ne survivaient qu’enfermés dans un « poumon d’acier ». Les journaux firent leurs manchettes sur l’événement : « Polio sérum OK », « Polio routed ! ». Le vaccin reçut son AMM le jour même. Salk devint un héros : son vaccin ne compte-t-il pas au nombre des cinq découvertes médicales majeures du XXe siècle pour la prestigieuse revue Nature ?
Mais, moins de deux semaines plus tard, le rêve vira au cauchemar. Six cas de polio se déclarèrent le 24 avril chez des enfants ayant reçu du vaccin fabriqué par la société Cutter de Berkeley. D’autres suivirent. Des cas se déclarèrent chez des proches des enfants vaccinés. Le vaccin Cutter fut retiré du marché le 27 avril. Le 7 mai, le programme de vaccination américain fut suspendu par le Surgeon General, Leonard A. Scheele (1907-1993), qui, le lendemain, mit un embargo sur les exportations du vaccin.
Il devint rapidement évident que ces cas n’étaient observés que chez des sujets exposés au vaccin Cutter (des lots préparés précipitamment avaient échappé à l’inactivation) qui fit 204 victimes dont 11 décès. Le programme Salk reprit aux États-Unis dès juin 1955 : il y réduit l’incidence de la polio de 14 à 0,5/100 000 entre 1954 et 1961, des chiffres retrouvés dans les divers pays où il fut pratiqué.
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