Un jour, Golda Cohen a reçu le témoignage d'une personne illettrée. « Elle souffrait de maux de ventre après avoir pris un médicament. Elle a appelé SOS Médecins mais comme elle ne savait pas lire, elle n'a pas pu donner le nom du médicament en question. Le médecin a finalement réussi à savoir de quel médicament il s'agissait en lui faisant dicter lettre par lettre. Il s'est alors rendu compte qu'elle avait consommé un médicament pour chiens. » Si le drame a pu être évité, la présence d'un pictogramme facilement compréhensible aurait peut-être pu éviter à ce patient bien des désagréments.
Les notices de médicament sont indéchiffrables pour les patients en situation d'illettrisme (7 % de la population âgée de 18 à 65 ans), mais aussi pour beaucoup d'autres patients, dont de nombreuses personnes âgées. Maître de conférences en psychologie sociale à l'université d'Angers, Golda Cohen a commencé à s'intéresser à ce sujet lorsqu'elle a consacré sa thèse aux représentations sociales du médicament sous un angle iconographique. « C'est de là qu'est née l'idée de créer des pictogrammes pour aider les patients à avoir facilement les informations nécessaires sur leur traitement. » Pour concevoir ces pictogrammes, Golda Cohen va interroger des résidents d'EHPAD, les grands-parents de ses étudiants, des personnes illettrées… en leur demandant d'exprimer, par le dessin, ce à quoi ils pensent instinctivement lorsqu'on leur donne une information déterminée. « Je vais parler par exemple de maux de ventre et leur demander de dessiner cette information. Ensuite, je regarde l'ensemble des dessins réalisés. L'objectif final, c'est d'aboutir à un pictogramme qui sera identifié par le plus grand nombre. »
Si des pictogrammes sont apparus ces dernières années sur les boîtes de médicament (pour indiquer qu'un médicament est déconseillé aux femmes enceintes par exemple), ces informations par l'image pourraient être étendues à d'autres domaines. En tout, Golda Cohen a réussi à créer près de 120 pictogrammes, avec l'aide d'une graphiste. « Environ deux tiers des pictogrammes sont intuitifs, il suffit de les voir pour comprendre. En revanche, si on parle d'un médicament qui peut entraîner des lésions du foie, aucune image collective ne permet d'illustrer.cela. Un tiers des pictogrammes nécessiterait donc un apprentissage. » Son projet, baptisé Psymages, est financé jusqu'à la fin de l'année par l'université d'Angers et la région des Pays de la Loire.
S'inspirer des initiatives menées aux États-Unis et au Québec
Aider les patients à mieux comprendre leur traitement, leurs bénéfices et leurs risques, grâce à l'image, certains pays y ont déjà pensé. « Au Québec, les médicaments sont donnés dans un contenant sur lequel une étiquette mentionne les informations essentielles que le patient doit connaître, explique Golda Cohen. Aux États-Unis, un logiciel a été créé à destination des pharmaciens, il donne accès à une centaine de pictogrammes. Avec le médicament, le pharmacien peut ainsi ajouter des pictogrammes sur une feuille A4 pour que le patient comprenne facilement à quoi sert le médicament, quels sont les effets secondaires, quelles interactions éviter… »
Golda Cohen veut désormais réussir à « démocratiser ce système d'information », en France. Elle espère tout particulièrement séduire les pharmaciens. « La piste la plus accessible serait de mettre à disposition des professionnels de santé des autocollants ou des gommettes reprenant les pictogrammes. Les pharmaciens, par exemple, pourraient les coller sur l'ordonnance ou sur une feuille à part et matérialiser ainsi les informations données à l'oral. » Cette solution serait la plus pratique, selon elle, pour les personnes âgées et pour celles en situation d'illettrisme.
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