LE VERDICT est tombé lundi en fin de matinée. Pour donner le ballon d’oxygène dont l’officine a tant besoin, le gouvernement a choisi d’augmenter le forfait à la boîte de 3 centimes d’euro. Une maigre satisfaction pour l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) qui demandait une revalorisation de 10 centimes d’euro. Une grande déception pour la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) et l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) qui plaidaient, elles, pour une hausse du seuil de la première tranche de la marge (voir « le Quotidien » du 25 octobre). Pour compenser le surcoût pour l’assurance-maladie engendré par cette mesure, estimé à 80 millions d’euros, les représentants du ministère de la Santé ont cette fois suivi la piste de la FSPF, c’est-à-dire l’application de nouveaux TFR.
Parallèlement, le gouvernement met d’autres propositions sur la table. Il envisage ainsi de doubler le forfait à la boîte pour les traitements de substitution aux opiacés et de faire passer dès à présent les indemnités de gardes de 75 à 150 euros ; un fonds dédié aux officines en difficulté installées dans les zones faiblement pourvues en pharmacies doit voir le jour (10 millions d’euros) ; l’IGAS est quant à elle missionnée pour étudier l’évolution de la marge des pharmaciens en regard des nouvelles missions prévues par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). Les pouvoirs publics se sont, par ailleurs, montrés favorables à la prise en compte de l’offre officinale lors de la création de maisons de santé afin de ne pas déstructurer le réseau, ainsi qu’au rééquilibrage entre marge grossiste et marge officinale dans les DOM.
Ouverture des négociations.
Enfin, les représentants du ministère ont confirmé qu’un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2011 avait été déposé afin de prolonger de deux ans l’expérimentation concernant la réintégration du forfait médicament dans le budget de soins des EHPAD*, comme la profession le réclamait. Ils ont aussi souligné que la réforme de la taxe professionnelle bénéficiera à l’officine à hauteur de 60 millions d’euros. Deux points déjà évoqués quelques jours auparavant par Roselyne Bachelot elle-même, à l’occasion du congrès national des pharmaciens, à Marseille. Au total, le plan pour sauver l’économie officinale présentée par le ministère rapporterait près de 200 millions d’euros au réseau.
« Il y a une réelle ouverture de négociations », se félicite Philippe Gaertner, président de la FSPF. « Nous allons enfin pouvoir travailler à partir des pistes proposées par le ministère », précise-t-il. « C’est mi-figue mi-raisin », juge pour sa part Claude Japhet, président de l’UNPF. « Le point positif est l’ouverture de discussions », déclare-t-il. Dans ces conditions, les deux syndicats ont d’ailleurs décidé de lever leur mot d’ordre de grève des gardes lancé début juillet. « Il y a des avancées », estime également Gilles Bonnefond, président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO).
Une enveloppe insuffisante.
Voilà pour la forme. Sur le fond, les syndicats semblent plus perplexes. D’abord, la FSPF et l’UNPF sont très réservées quant au principe retenu d’augmentation du forfait. « Les options stratégiques choisies ne sont pas, à notre avis, les plus pertinentes pour l’économie de l’officine de demain et d’après demain », explique Philippe Gaertner. Sans toutefois renier le bénéfice des 80 millions d’euros pour le réseau, reste que, au final, « le compte n’y est pas », insiste-t-il. Selon Philippe Besset, président de la commission Économie de la FSPF, les dispositions avancées ne permettraient, en effet, d’injecter que 100 à 130 millions d’euros. Par exemple, la réforme de la taxe professionnelle rapporterait seulement la moitié des 60 millions d’euros annoncés, la pharmacie ne relevant pas de l’exonération dont bénéficient certaines professions libérales. Conclusions de la FSPF : les mesures présentées sont « insuffisantes et incohérentes, même si certaines sont intéressantes ».
« La réforme de la taxe professionnelle est une mesure générale qui ne profitera pas plus à l’officine qu’aux autres entreprises », renchérit Claude Japhet. Quant à l’augmentation de l’indemnité d’astreinte à 150 euros, le président de l’UNPF fait remarquer que cette mesure avait déjà été déjà négociée dans le cadre de la convention avec l’assurance-maladie et qu’elle avait vocation à compenser l’investissement nécessaire au passage à la version 1.40 de SESAM-Vitale. Mais le pire, à ses yeux, est l’idée d’instaurer de nouveaux TFR en balance de la revalorisation du forfait à la boîte. « On a pris les plus mauvaises des solutions des uns et des autres », déplore-t-il. « Une augmentation de 3 centimes du forfait à la boîte rend la marge encore plus dégressive, est source de distorsion entre les officines et entraîne un revignetage des boîtes extrêmement coûteux », argumente-t-il. Et de réaffirmer sa volonté d’une revalorisation de la première tranche de la marge et son souhait de voir mettre en place des indemnités pour les services proposés par les pharmaciens. D’autant que, selon lui, au final, l’effort du gouvernement, en dehors des acquis, s’élève entre 30 à 50 millions d’euros seulement, ce qui reste « insuffisant ».
Réserves sur le TFR.
Satisfaite de voir son projet de revaloriser le forfait retenu, l’USPO juge toutefois que l’enveloppe de 80 millions d’euros allouée par le gouvernement est un peu légère. « Nous demandions une augmentation de 10 centimes d’euro », rappelle Gilles Bonnefond, soit 260 millions d’euros pour les pharmacies. Mais surtout, comme l’UNPF, le principe d’une revalorisation du forfait contre TFR ne l’enchante guère. Il faut dire que ce mode de financement pourrait bien en effet constituer un piège : plus les pharmaciens demanderont une augmentation du forfait et plus ils subiront les effets du TFR. « Nous avons demandé que le TFR ne soit pas la seule source de financement, mais que l’on travaille sur des pistes plus larges, telles des baisses de prix et les grands conditionnements », indique ainsi Gilles Bonnefond.
On le voit, le plan du gouvernement présente du bon et du mauvais. Une prochaine réunion avec les représentants du ministère est prévue à la mi-novembre. En attendant, les syndicats n’ont plus qu’à sortir leurs calculettes et à affûter leurs chiffres pour la suite des négociations.
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