IL DEVIENT DIFFICILE pour le médecin de s’impliquer dans les études post-AMM. Les organismes ayant besoin de données de santé ont donc pris l’habitude de travailler de plus en plus avec des panels de pharmaciens. Une nouvelle relation qu’ils plébiscitent pour l’excellente répartition pharmaceutique, le grand nombre de Français qui franchissent le seuil d’une officine chaque jour, l’implication renforcée des officinaux dans le suivi du patient et leur très bon équipement informatique facilitant la collecte des informations. Pour autant, les contraintes juridiques attachées à la collecte, le traitement et l’exploitation des données de santé sont lourdes. Me Étienne Papin, avocat associé au cabinet Feral-Schul/Sainte-Marie, souligne en effet que la France s’est dotée d’un « environnement où les pouvoirs publics ont multiplié les textes et les acteurs censés réglementer cette question ». Le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens l’a également rappelé en janvier dernier, en publiant un guide intitulé « Respect de la confidentialité des données de patients dans l’usage de l’informatique ».
D’une part, le patient a le droit au respect de sa vie privée, de son identité et donc de ses informations de santé. Le Code pénal prévoit d’ailleurs des sanctions en cas de divulgation non autorisée de secrets dont les professionnels de santé sont dépositaires. « C’est le principe essentiel de la confidentialité, d’autant plus quand les données de santé ont trait à l’identité de la personne », précise Me Papin. D’autre part, il y a nécessité à partager l’information avec les professionnels de santé, les organismes sociaux et les pouvoirs publics, ainsi qu’avec les industriels « dans un but d’amélioration des thérapeutiques et de la santé publique ». Pour sortir de cette dualité, l’une des solutions est d’anonymiser les données, mais leur usage nécessite néanmoins l’autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Tombé des nues.
Les études menées en officine présentent un véritable intérêt et les complexités juridiques ne doivent pas être un frein. Martial Fraysse, président du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens d’Île de France et titulaire d’une officine à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne), a déjà mené diverses études à l’initiative de laboratoires. « Le patient y trouve son intérêt car il bénéficie d’une écoute, de conseils et repart généralement avec un kit d’informations sur la pathologie et les contacts utiles », remarque le pharmacien. Il a participé aussi au suivi d’un médicament qui nécessitait une surveillance étroite. Dès la première commande auprès du laboratoire, celui-ci prend contact avec le titulaire, forme l’ensemble de l’équipe et organise la collecte des données pour savoir comment le patient supporte son traitement. « Le suivi d’un médicament en vie réelle est primordial. Je suis tombé des nues après les premiers entretiens pharmaceutiques sur les AVK menés auprès de patients que je connais depuis plus de 20 ans. Les deux tiers n’ont pas de carnet AVK, la moitié passe son INR quand il en a envie… Ils prennent une certaine liberté, que je respecte totalement mais qui les met en danger. »
Charles Taïeb, directeur des relations scientifiques extérieures et du market maintenance du groupe Pierre Fabre, note pour sa part que le pharmacien est un centre investigateur idéal, c’est pourquoi l’entreprise mène depuis déjà 13 années des études via les officines. Il cite notamment une enquête menée à la demande de la Commission de la transparence, afin de compléter le dossier de demande de remboursement du raloxifène. « L’officine est un lieu pertinent aussi parce qu’il n’y a pas de risque de modification de la prise en charge, alors qu’il y a un risque d’influencer le comportement du prescripteur lorsqu’on lui demande ce type de participation, car il aura naturellement tendance à inclure dans l’étude uniquement des patients qui correspondent exactement à l’indication du médicament. »
La plupart des sociétés d’études et de statistiques en santé, tout comme les laboratoires, ont bien compris la valeur ajoutée du pharmacien dans la collecte de données de santé, et n’hésitent pas à faire appel à lui.
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