DANS la droite ligne de ses arrêts rendus depuis 2009** sur le sujet, et qui avaient alors donné un coup d’arrêt aux tentatives de « libéralisation » des pharmacies, soutenues notamment par la Commission européenne, la Cour de Luxembourg vient de débouter trois pharmaciennes italiennes qui souhaitaient vendre des médicaments soumis à prescription dans leurs boutiques de parapharmacie.
Depuis 2004, l’Italie autorise la création libre de parapharmacies, qui peuvent vendre aussi des OTC non soumis à prescription et non remboursables. Les médicaments prescriptibles sont réservés, eux, aux seules pharmacies, dont la création est en revanche réglementée par des quotas géographiques et démographiques. Trois pharmaciennes de la région de Varèse, en Lombardie, propriétaires de parapharmacies mais pas de pharmacies, ont souhaité vendre elles aussi des médicaments prescriptibles mais non remboursables. Arguant de leur qualité de pharmacien, et du fait que ces médicaments ne sont pas pris en charge par la Sécurité sociale, elles ont estimé que l’interdiction qui leur est faite de les vendre entraînait une distorsion de concurrence par rapport aux pharmacies qui, elles, les commercialisent librement. Les agences sanitaires locales et le ministère de la Santé ont rejeté leur demande, et l’affaire a finalement abouti devant la Cour de Justice européenne.
Santé publique.
Cette dernière a estimé que la loi italienne, qui « gêne et rend effectivement la création de parapharmacies moins attrayante » constitue bien « une restriction à la liberté d’installation ». Toutefois, poursuit la Cour, « cette restriction est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général » : la réglementation pharmaceutique italienne vise en effet à assurer un approvisionnement en médicaments couvrant l’ensemble du territoire, en tenant compte des régions géographiquement isolées ou désavantagées. Cette couverture harmonieuse ne peut être obtenue sans planification, poursuit l’arrêt : « permettre de commercialiser certains médicaments soumis à prescription dans les parapharmacies conduirait à les concentrer dans les localités jugées les plus rentables (…) et risquerait d’entraîner une perte de revenus des pharmacies, pouvant aboutir à la fermeture de certaines d’entre elles : une pénurie de pharmacies dans certaines parties du territoire conduirait à un défaut d’approvisionnement de médicaments sûrs et de qualité. »
Cet arrêt, très protecteur pour les pharmacies, reconnaît donc une nouvelle fois leur intérêt pour la santé publique et l’organisation de celle-ci. Il le rappelle en termes particulièrement clairs et, au-delà de la question du monopole, reprécise les limites de compétence des parapharmacies, même lorsqu’elles sont dirigées par des pharmaciens. Si les tentatives d’atteintes au monopole ne sont plus aussi violentes qu’elles le furent entre 2005 et 2009, cet arrêt vient enrichir la série de textes qui garantit la survie du monopole. Enfin, la Cour dispose, une nouvelle fois, que « chaque État membre peut décider du niveau auquel il entend assurer la protection de la santé publique et la manière dont ce niveau doit être atteint ».
** Rappelons que le 19 mai 2009, la Cour de Justice européenne avait confirmé dans un arrêt considéré comme historique que le fait de réserver la propriété des officines aux seuls pharmaciens ne constituait pas une entrave à la liberté d’installation, mais une mesure de protection de la santé publique, qui prime sur les traités européens. Cet arrêt concernait déjà l’Italie, qui faisait alors l’objet d’une plainte de la Commission européenne en raison de sa réglementation sur le capital des pharmacies. Il a été confirmé depuis par plusieurs autres décisions comparables.
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