FAUT-IL Y VOIR une spécificité française ? Pas sûr, la concurrence des pays de l’Est, d’Amérique latine et d’Asie touche nombre de pays européens qui constatent une baisse des essais cliniques réalisés sur leurs territoires. La cinquième édition de l’enquête bisannuelle du LEEM sur la place de la France dans la recherche clinique internationale révèle que la France stagne : « nous parvenons tout juste à maintenir notre position s’agissant des patients recrutés », déplore Patrice Zagamé, président de la commission des affaires scientifiques du LEEM. Pire, les études internationales proposées à la France sont en nette diminution : 40 % en 2010 contre 44 % en 2008 et 70 % en 2006. La baisse touche aussi les études effectivement réalisées : 28 % en 2010 contre 33 % en 2008 et 49 % en 2006. Selon l’agence du médicament, 920 essais thérapeutiques ont été menés en France l’an dernier ; les trois-quarts par l’industrie et le reste par la recherche institutionnelle. Les Allemands sont même passés en deuxième position en Europe devant la France, avec 9 % des patients recrutés pour des études (8 % chez nous). Si la France est à la traîne, c’est en grande partie parce que la professionnalisation est insuffisante, résume le LEEM. « Nous n’avons pas assez de candidats, de recrutements et d’investigateurs à temps plein », explique le LEEM.
Bénéfice pour les malades.
Pour Bruno Vellas, spécialiste d’Alzheimer au CHU de Toulouse, l’enjeu est de remobiliser l’ensemble des acteurs. Car, dit-il, « le bénéfice revient d’abord aux malades qui profitent d’un accès précoce à des molécules innovantes ». Le Dr Zagamé va dans le même sens : « On a tendance à oublier - et ça peut être décisif - que la recherche clinique permet à des patients d’accéder à des molécules innovantes avant tout le monde », parfois 3 ou 4 ans avant leur arrivée sur le marché. C’est notamment le cas chez les personnes atteintes du VIH. Selon Jean-François Delfraissy, directeur de l’Agence nationale de recherches sur le sida (ANRS) : « 18 % des patients VIH sont inclus dans des essais cliniques ou des cohortes de recherche ».
En dépit de ce constat implacable, des motifs de satisfaction laissent espérer une reprise. La France conserve une réelle expertise dans les domaines du cancer (30 % des études), des vaccins, des maladies cardio-vasculaires, la maladie d’Alzheimer et du diabète. D’autre part, elle reste une locomotive pour les essais de phase I et II (phases précoces), ce qui « est bon signe », se réjouit le Dr Soizic Courcier.
Le LEEM proposera dans les jours qui viennent des pistes pour réduire les délais et stimuler les partenariats dans des domaines « peu attractifs, comme l’Alzheimer ». En ce sens, Le Pr Delfraissy a souligné l’importance du partenariat public privé pour stimuler la recherche. Et d’appeler de ses vœux à une réflexion sur les carrières : « Un médecin chercheur doit pouvoir consacrer l’intégralité de son temps à la recherche et non pas donner 100 heures de cours en parallèle. Il faut mettre en place des carrières ou des temps de carrières. Tout le monde y gagnera. » Paul Vellas appelle, quant à lui, à poursuivre les efforts : « On apprend quand on fait même si, parfois, les essais sont négatifs ! Cela entraînera forcément des avancées considérables. »
Il en va de la compétitivité française et de la survie des essais cliniques qui représente près de la moitié des cinq milliards d’euros affectés à la recherche médicale en France. À quelques semaines de la fin des Assises du médicament lancées par le ministre de la Santé Xavier Bertrand dans la foulée de l’affaire Mediator, le Dr Zagamé a exprimé le souhait des laboratoires d’« éviter la mise en place de contraintes administratives qui pourraient être nuisibles au développement d’essais thérapeutiques ». Le LEEM met la pression.
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