Depuis les bons résultats de la campagne « les antibiotiques, c’est pas automatique » au début des années 2000, les actions de sensibilisation qui se sont succédé sont restées vaines. Or il y a urgence face à la montée des multirésistances bactériennes.
Pourtant, le phénomène est connu de longue date, rappelle Arno Muller, agent de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à la section des médicaments et produits de santé essentiels, mais il est passé inaperçu grâce au renouvellement de l’arsenal thérapeutique. Ce qui n’est plus le cas. « Si on ne fait rien, les bactéries vont devenir résistantes à tous les antibiotiques et on se retrouvera dans une ère pré-antibiotique, où il y aura un risque d’infection à la moindre opération et des infections impossibles à traiter. » D’où le plan de l’OMS signé en 2015 qui vise à éduquer les populations, surveiller les résistances et la consommation d’antibiotiques, réduire le nombre d’infections, optimiser l’usage des antimicrobiens chez l’homme, l’animal et dans l’environnement, et encourager la recherche.
Des objectifs que l’on retrouve dans les plans européen et français, souligne le Pr Christian Brun-Buisson, délégué ministériel à l’antibiorésistance. Pour lui, la première action à mener est de sensibiliser le public et surtout les professionnels de santé, notamment les prescripteurs pour qu’ils utilisent les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) mis à leur disposition pour distinguer une angine bactérienne d’une angine virale, et ainsi éviter des prescriptions inutiles d’antibiotiques aujourd’hui estimées à environ 30 %. Il les invite également à se tenir informés des modifications des durées de traitement recommandées et appelle au développement de TROD capables de cibler l’antibiotique nécessaire dans chaque infection.
Une seule santé
L’antibiorésistance exige une prise en compte globale, associant santé humaine, animale et environnementale. Ce que l’OMS réunit dans le concept de « OneHealth », un seul monde, une seule santé. Le Dr Jacques Guérin, président du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires, se félicite des progrès de ses pairs depuis 2012, qui ont permis de diminuer largement l’usage des antibiotiques chez les animaux de rente, en particulier des antibiotiques critiques comme les fluoroquinolones et les céphalosporines. Un succès que Claude Monneret, président honoraire de l’Académie nationale de pharmacie, aimerait pouvoir appliquer à la santé humaine. S’il s’insurge de voir réapparaître des cas de rougeole en France ou de tétanos en Italie, il préfère mettre en avant « les raisons d’espérer » et appelle tous les professionnels de santé à montrer l’exemple en se vaccinant. Il compte sur les pharmaciens pour promouvoir l’information sur les antibiotiques, sur les professionnels de santé pour utiliser les TROD à disposition, et sur les chercheurs et industriels pour développer de nouveaux antibiotiques et de nouvelles solutions comme les adjuvants aux antibiotiques ou les bactériophages.
« Tous les pharmaciens ont un rôle à jouer, qu’ils soient industriels, distributeurs, hospitaliers, dispensateurs à l’officine ou biologistes, affirme Anna Sarfati, membre du bureau du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP). Ils peuvent faciliter le bon usage des antibiotiques, prévenir la survenue d’infections en éduquant sur les méthodes de prévention, sensibiliser tout le monde, à tous les niveaux, pour que tous ensemble nous sauvions les antibiotiques. »
Débat organisé dans le cadre de la Journée de l'Ordre des pharmaciens.
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