Selon une étude expérimentale

Les antioxydants pourraient favoriser la progression du cancer pulmoniare

Publié le 03/02/2014
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Une supplémentation en vitamine E et acétylcystéine chez des souris prédisposées au cancer du poumon, accélére la progression tumorale via une baisse du p53. Un effet confirmé sur des cellules humaines. La prudence est requise chez les patients atteints de cancer du poumon ou à risque, fumeurs et bronchitiques chroniques.

UNE AURA de multiples bienfaits entoure les antioxydants, un terme regroupant les vitamines, carotènes, isoflavones et autres composés chimiques qui neutralisent les radicaux libres connus pour endommager l’ADN et les cellules. On leur prête ainsi des propriétés anticancéreuses. Toutefois, de larges essais cliniques randomisés ont eu des résultats contradictoires.

L’étude de Sayin et coll jette à nouveau le trouble et suggère un effet néfaste des antioxydants sur le développement du cancer du poumon. Elle montre que chez des souris prédisposées au cancer du poumon (mutations B-RAF ou K-RAS), une supplémentation en vitamine E et en acétylcystéine augmente la progression tumorale et l’agressivité (d’un facteur 3) et réduit la survie de 50 %.

De fait, ces antioxydants diminuent, comme prévu, le stress oxydatif et les dégâts de l’ADN, mais ils réduisent aussi l’expression de la protéine p53, un suppresseur de tumeur majeur. Ces résultats ont de grandes chances de s’appliquer à l’homme. Les modèles souris étudiés sont bons et les doses d’antioxydants sont celles prises par la population. De plus, cet effet a été confirmé sur des cellules humaines de cancer pulmonaire.

Avec prudence, voire pas du tout

« Puisque les mutations somatiques de p53 surviennent à un point tardif de la progression tumorale, les antioxydants pourraient accélérer la croissance des tumeurs débutantes ou des lésions précancéreuses dans les population à haut risque, tels que les fumeurs et les patients atteints de BPCO qui reçoivent l’acétylcystéine pour soulager la production de mucus », conclut l’équipe. « Notre étude ne permet pas de dire si les antioxydants chez les personnes en bonne santé influencent leur risque futur de développer un cancer du poumon », précise au Quotidien le Dr Martin Bergo (Gotenburg, Suède). « En revanche,chez les sujets à risque, les antioxydants devraient être utilisés avec prudence, voire pas du tout ».

Les prochains objectifs : évaluer d’autres types de cancer et d’antioxydants et mener des études cliniques dans la BPCO.

Science Translational Medicine, Sayin et coll., 29 janvier 2013.
Dr Véronique Nguyen

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3065